Il faudra dire que deux événements marquants ont retardé la célébration, prévue en décembre dernier, du cinquantenaire des journaux Al Bayane : la tenue du XI ème Congrès national du Parti du progrès et du socialisme (du 10 au 13 décembre 2022) et l'organisation du Mondial de football au Qatar ( du 20 novembre au 18 décembre 2022). A cela, il faudra ajouter l'essoufflement produit par la fin de l'année et l'indispensable repos des guerriers... Aujourd'hui, le projet de célébration des cinquante années de l'existence des journaux Al Bayane reprend ses droits. Il faudra rappeler que la parution d'Al Bayane fut, d'abord, en langue arabe, le 24 novembre, puis en français le 6 décembre 1972. Revendication de l'indépendance du Maroc En 1942, les communistes marocains étaient les premiers à l'avoir demandé dans «Al Watan » (La Patrie) La démarche entreprise par le fondateur du parti et de ses journaux, feu Ali Yata, s'est inscrite dans la continuité de l'action journalistique que le Parti communiste marocain, dans les conditions de la clandestinité et de la semi-clandestinité, avait inscrite comme une tradition de la lutte politique et idéologique dans notre pays. Dans ce combat, notamment celui de l'indépendance du Maroc, le parti a édité plusieurs titres et ce depuis 1943. A commencer par Al Watan (La Patrie), en langue française puis arabe. Et pour cause, alors que la Maroc célèbre le 79 ème anniversaire du Manifeste de l'Indépendance (11 janvier 1944), il y a lieu de rappeler que, contrairement aux allégations proférées contre le PCM sur la question de la revendication de l'indépendance du Maroc, le Parti communiste du Maroc (il s'appelait ainsi avant de devenir Parti communiste marocain en 1945) avait publié toute une page, en arabe comme en français, pour réclamer l'indépendance du Maroc. Hélas, bien des «historiens» ont feint de l'oublier... par sectarisme politique. Signalons qu'avant la création du Parti communiste du Maroc, son journal Al Watan (La Patrie) était édité, déjà en 1942, par les premières cellules communistes. De plus, le titre du journal était en arabe et rien que cela suffit pour affirmer le caractère patriotique des communistes, en intransigeants militants, y compris les Français, contre le colonialisme. D'ailleurs, les autorités coloniales avaient censuré la page parue en arabe, de peur qu'elle aie des échos « perturbateurs et d'étincelle » dans les milieux populaires et les nationalistes marocains, et, par contre, la version française avait été tolérée, sachant qu'elle était surtout lue par les Français... Outre l'archive historique de cette décision historique qui met à nu les accusations fallacieuses des rivaux politiques du parti, nous n'en voulons pour preuve que le témoignage historique de l'historien marocain Jamaâ Baida, directeur des archives du Maroc. Citons ses écrits parus dans « Orient-Institut Studies 1 (2012) – Rethinking Totalitarianism and its Arab Readings », sous le titre de « Le communisme au Maroc pendant la période coloniale (1912-1956) » « Pendant la Seconde Guerre Mondiale, la répression qui s'abattit sur les forces de gauche n'empêcha pas l'apparition éphémère, en 1942, d'un journal clandestin portant un titre en arabe, El-Watan, bien que rédigé en langue française. Ce journal, ou plutôt cette brochure, lança le mot d'ordre d'indépendance dès sa première livraison. Ce sera plus tard une fierté des communistes marocains quand il va falloir mettre en exergue leur patriotisme pour rivaliser avec les militants du parti d'Allal El-Fassi, l'Istiqlal. C'était une nécessité car les communistes français du Maroc n'ont pas toujours applaudi les appels à l'indépendance du Maroc perçus comme des « mots d'ordre aventureux ». » Et, suite encore, le PCM avait réaffirmé, en janvier 1943 sa position sur « le droit du Maroc à l'indépendance » dans le même journal du parti «Al Watan». Rien que ce témoignage suffit pour débusquer les mensonges historiques et rétablir la vérité historique qui restera têtue : Les communistes marocains étaient les premiers à revendiquer l'indépendance du Maroc, en 1942 , soit deux années avant la signature du Manifeste du 11 janvier 1944, alors que le reste du mouvement nationaliste était plus préoccupé par les revendications d'ordre social... Espérons que l'amalgame ne puisse pas continuer à tromper les générations actuelles et celles à venir. ***** Quelques repères sur les journaux du parti Voici un récapitulatif des publications éditées par le PCM entre 1942 et 1969 1942 : Al-Watan (La Patrie) Un journal clandestin paraissant en français mais portant un titre en arabe, El Watan, qui sera édité sous forme de brochure en arabe 1943 : Egalité 1945-1950 : Le Petit Marocain » devient propriété de l'Union générale des Syndicats confédérés du Maroc (U.G.S.C.M.), une branche de la CGT française, unique structure syndicale au Maroc et dirigée par le PCM. 1950 : Le groupe Mas reprend le contrôle de « Le Petit Marocain » dont la situation financière était catastrophique. * 1950-1960 : Le PCM a lancé plusieurs publications militantes, notamment de nombreuses brochures 1960-65 : Hayat Achâab (La Vie du Peuple) a été publié clandestinement à cause du refus des autorités d'autoriser une publication communiste. Le journal Espoir en arabe est dirigé par Abdessalam Bourquia. La version française « Espoir » est dirigée par Docteur El Hadi Messouak et Edmond Amran El Maleh 1960-1964 : Almokafih (Le combattant » en arabe : 1964 : interdiction d'Al Moukafih 1965 : Al Kifah Al Watani Nouvel hebdomadaire Al Jamahir (Les masses) en langue arabe dont la direction avait été confiée à Abdallah Layachi et Simon Lévy. Abdeslam Bourquia lancera, de son côté, la revue Al Mabadia (les principes), une revue culturelle et idéologique pionnière. Elle deviendra ... l'équivalent de la Nouvelle revue internationale.