Nabil EL BOUSAADI Comme il fallait s'y attendre, dix-huit mois après s'être emparé du fauteuil présidentiel après le décès de son père et pris la direction de la junte militaire au pouvoir au Tchad, le président de transition, le général Mahamat Idriss Déby Itno, 38 ans, a été « désigné » définitivement, samedi 8 Octobre, par le « Dialogue National Souverain et Inclusif » (DNSI), président d'une « transition » prolongée de deux ans jusqu'à la tenue d'élections « transparentes ». Pour rappel, au moment de sa prise de fonction et après avoir dissout le Parlement et le gouvernement et abrogé la Constitution, le Conseil Militaire de Transition avait promis d'organiser des « élections libres et démocratiques » au terme d'une transition de 18 mois renouvelable une fois. Bien qu'ayant été boycotté par une très grande partie de l'opposition, de la société civile et de plusieurs mouvements rebelles armés qui dénoncent la « succession dynastique » au pouvoir, le DNSI a, également, entériné la possibilité pour le chef de la junte militaire au pouvoir de se présenter à la présidentielle à l'issue de la « transition » alors même qu'il avait promis à la communauté internationale – Union Africaine et Union européenne avec la France en tête – de ne pas se porter candidat. Ouvert laborieusement le 20 Août dernier après plusieurs reports, ce Dialogue National qui a adopté « par consensus » diverses résolutions dont la prolongation de 24 mois de la transition avec Mahamat Idriss Déby Itno comme président, s'est achevé le 8 Octobre par un discours du nouvel homme fort du pays. Dans cette allocution, le général Mahamat Idriss Déby Itno, qui avait déjà été proclamé par l'armée, le 20 Avril 2021, président de la république en prenant la tête d'un Conseil militaire de transition (CMT) formé de 15 généraux, a exprimé sa « fierté » devant des assises qui ont permis de « sortir du scénario de l'horreur », promis « une nouvelle phase de transition » qui s'achèvera par un « retour à l'ordre constitutionnel » dans les délais fixés. Il a réitéré, enfin, son engagement de libérer les « prisonniers de guerre » conformément aux dispositions de l'accord de paix signé le 8 Août dernier, à Doha, avec certains groupes rebelles même si le Front pour l'Alternance et la Concorde au Tchad (FACT), le plus puissant des mouvements armés accusé d'avoir tué l'ancien président et d'autres groupes rebelles réunis au sein du Cadre Permanent de Concertation et de Réflexion (CPCR) ayant boycotté la rencontre de Doha ont dénoncé un « carnaval (...) qui ne fait que légitimer la succession dynastique et pérenniser un régime corrompu ». Mais, après avoir exigé, le 19 septembre dernier, que la junte ne prolonge pas les 18 mois de transition, l'Union Africaine avait, également, insisté sur le fait qu'il avait été convenu « qu'aucun membre du Conseil Militaire de Transition ne pourra être candidat aux élections à la fin de la transition » alors que l'Union européenne a fait part de sa « préoccupation » et regretté que les résolutions du DNSI « ne tiennent pas compte » des engagements de la junte « relatifs à la durée de la transition et à la clause d'inéligibilité ». En considérant, enfin, que ces reniements qui sont fermement dénoncés par le FACT et le CPCR vont, sans conteste, plonger dans l'embarras les partenaires internationaux du Tchad qui auront du mal à le « soutenir » auprès de la communauté internationale, il est clair que des bouleversements sont à craindre mais attendons pour voir... Nabil EL BOUSAADI