La Russie a qualifié mercredi de « destructive » l'idée de sanctions contre son président Vladimir Poutine, évoquée par les Etats-Unis en cas d'invasion de l'Ukraine, Kiev estimant toutefois encore insuffisant le nombre de troupes russes pour une attaque d'envergure. Ces propos interviennent peu avant une réunion à quatre à Paris entre des conseillers diplomatiques des présidents russe, ukrainien, français et du chancelier allemand, destinée à désamorcer la crise après une série de pourparlers entre Russes et Américains la semaine dernière. Les tensions n'ont cessé de monter ces derniers mois autour de l'Ukraine, Moscou était accusé d'avoir massé des dizaines de milliers de soldats à la frontière en vue d'une invasion. La Russie exige, elle, des garanties pour sa sécurité dont le rejet de l'adhésion de Kiev à l'Otan. Le président américain Joe Biden a affirmé mardi qu'il pouvait « concevoir » de sanctionner personnellement Vladimir Poutine, promettant « d'énormes conséquences » si Moscou attaquait l'Ukraine, une décision qui « changerait le monde ». Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov a lui balayé ces menaces en estimant mercredi que de telles sanctions ne seraient « pas douloureuses politiquement » pour le dirigeant russe, bien que « destructives » pour les relations entre Moscou et les Occidentaux. Si M. Biden n'a pas précisé la nature de ces éventuelles sanctions contre M. Poutine, les sanctions américaines passent le plus souvent par un gel de leurs avoirs et une interdiction de transaction avec les Etats-Unis. M. Peskov a ainsi souligné que la loi russe interdit en principe aux hauts responsables du pays de posséder des avoirs à l'étranger, estimant donc que de telles mesures « ne sont pas du tout douloureuses » pour les autorités. Le président de la chambre basse du Parlement russe, Viatcheslav Volodine, a lui assuré que des sanctions contre Vladimir Poutine seraient l'équivalent de sanctions contre « le choix du peuple russe ». Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a lui martelé que « si l'Occident poursuit sa voie belliqueuse, Moscou prendra les mesures de riposte nécessaires ». La Russie a multiplié ces dernières semaines les manoeuvres militaires, y compris aux frontières ukrainiennes avec des exercices lancés mardi impliquant quelque 6.000 hommes, des avions de chasse et bombardiers dans le Sud et en Crimée, péninsule que Moscou a annexé en 2014. Moscou avait précédemment annoncé des manoeuvres navales dans l'Atlantique, l'Arctique, le Pacifique et la Méditerranée ainsi que des exercices conjoints avec le Bélarus, aux frontières de l'Union européenne. Un détachement de la flotte russe du Nord est entré mercredi en mer de Barents dans le cadre de ces exercices, et celle de la mer Noire a déployé une vingtaine de navires. La Russie a également massé jusqu'à 100.000 soldats aux frontières ukrainiennes. Si l'Ukraine s'est alarmée pendant des semaines d'une invasion imminente, elle a néanmoins estimé mercredi que ce nombre était encore « insuffisant » pour lancer une attaque d'envergure contre le pays. Ce nombre « est important, il représente une menace pour l'Ukraine » mais « à l'heure où nous parlons, ce nombre est insuffisant pour une offensive à grande échelle contre l'Ukraine le long de toute la frontière ukrainienne », a déclaré le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba. « S'il vous plaît, plus jamais la guerre! », a imploré mercredi depuis le Vatican le pape François devant les inquiétudes sur une potentielle invasion russe de l'Ukraine. Les Etats-Unis ont pour leur part placé en alerte lundi quelque 8.500 soldats, qui pourraient renforcer la Force de réaction rapide de l'Otan de 40.000 militaires. La décision de leur déploiement n'a toutefois pas été prise. L'Otan a, elle, annoncé placer des forces en attente et envoyer des navires et des avions de combat pour renforcer ses défenses en Europe de l'Est, et cela alors que la Russie considère les troupes de l'Alliance dans son voisinage comme une menace existentielle. Après un cycle de pourparlers, Washington doit remettre cette semaine une réponse écrite aux exigences russes. Paris accueille aussi mercredi une réunion de conseillers de haut rang avec l'Allemagne, la Russie et l'Ukraine, pour tenter de raviver un format de dialogue datant de 2015, celui dit de « Normandie », aujourd'hui au point mort.