Cambodge : Nabil EL BOUSAADI Ce lundi 16 Août 2021, s'est ouvert, devant le CETC, « Chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens », le procès en appel de Khieu Samphân aujourd'hui âgé de 90 ans. Ce tribunal spécial crée en 2006 par les autorités cambodgiennes et l'ONU a fait, pourtant, l'objet de vives critiques puisqu'après avoir nécessité la bagatelle de 300 millions de dollars, il n'a pu condamner, à ce jour, que trois anciens dirigeants khmers. Dernier haut dirigeant du « Kamputchéa démocratique » – nom officiel du pays sous le régime des khmers rouges – encore en vie après que Pol Pot, Premier ministre de 1976 à 1979, chef de ce mouvement ultra-nationaliste et principal instigateur du génocide qui aurait coûté la vie à un quart des cambodgiens, soit mort en 1998 avant même d'être jugé, Khieu Samphân nie toute responsabilité dans les exterminations massives commises au Cambodge entre 1975 et 1979. Appelé à répondre de ses actes, le vieux dirigeant khmer rouge récuse donc toute implication dans les exactions qui s'étaient soldées par le massacre de quelques deux millions de cambodgiens, constituant le quart de la population, morts du fait de la famine, de l'épuisement ou de la torture et son avocat, Kong Sam Onn, demande « l'acquittement de (son) client du chef d'accusation de génocide ». Pour rappel, pour mettre en place, entre 1975 et 1979, « une utopie agraire autarcique, dépouillée des influences capitalistes et de la religion », Pol Pot avait contraint des centaines de milliers d'habitants des villes – hommes, femmes et enfants – à s'exiler à la campagne pour y travailler la terre dans des conditions très souvent proches de l'esclavage qui firent qu'un grand nombre d'entre eux moururent de faim ou de fatigue quand ils ne furent tout simplement exécutés pour n'avoir pas pu « accomplir » leur mission. Mais si Khieu Samphân et Nuon Chea, l'idéologue du régime, avaient déjà été condamnés, en 2014, à la perpétuité pour « crimes contre l'humanité », pour « génocide » mais aussi pour une longue série de crimes comme des mariages forcés et des viols ou encore pour leur responsabilité avérée dans l'évacuation de Phnom Penh en 1975 et pour avoir participé aux massacres dont furent victimes les « Chams », une minorité musulmane qui vit au Viet Nam et au Cambodge et que cette peine fut confirmée en appel deux années plus tard, ils furent tous les deux condamnés, en 2018, à la prison à vie pour génocide avant que Nuon Chea ne décède en 2019 et ne laisse Khieu Samphân, seul face à la justice à devoir témoigner, ce lundi, depuis une pièce séparée des juges à cause de la pandémie du coronavirus. S'il convient de rappeler, enfin, que l'actuel Premier ministre et homme fort du Cambodge, Hun Sen, est un ancien cadre des Khmers rouges qui s'était déjà prononcé contre toute nouvelle condamnation de l'intéressé au motif qu'elle pourrait replonger le pays dans l'instabilité, quelle sera alors la suite de cette nouvelle comparution du vieux dirigeant du « Kamputchéa démocratique » ? Attendons pour voir…