Nabil El Bousaadi Les premiers signaux en provenance de Washington indiquent clairement que le nouveau président américain Joe Biden est pour une reprise des négociations avec Téhéran au titre d'une réactivation de l'accord de Vienne. Mais, si les chancelleries du monde entier semblent, à priori, être prêtes à applaudir un éventuel retour de Washington à cet accord dans la mesure où, en encadrant le programme nucléaire de l'Iran, il donne l'occasion d'éteindre, une bonne fois pour toutes, les braises toujours fumantes d'un incendie à même de détruire toute la région, l'Etat hébreu crie encore, haut et fort, qu'il serait contre tout arrangement entre la communauté internationale et l'Iran qui n'aboutirait pas à un démantèlement total du programme nucléaire iranien. Pourquoi cela alors même que, depuis 1967, l'Etat juif est le seul pays du Moyen-Orient à être doté de l'arme atomique ? Pour la simple raison que, tout en refusant d'admettre, officiellement, qu'il est une puissance nucléaire, Israël qui, à ce titre et pour ne jamais être mis en accusation, n'a jamais signé le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) de 1968, entend bien, au nom de sa sempiternelle sécurité, continuer à détenir ce «monopole» dans la région tout en cultivant cette ambigüité («amimout» en hébreu) qui l'a toujours empêché de commenter ce que certains pourraient dire ou écrire sur cette question même si, au sein de l'establishment israélien, il y en a qui plaident, désormais, pour l'adoption d'une stratégie de dissuasion nucléaire pleinement assumée, notamment face à l'Iran. Aussi, même si, au cours de son audition par le Sénat, Antony Blinken, le nouveau secrétaire d'Etat américain aux Affaires étrangères, a tenu à rappeler que bien que la réactivation de l'accord Vienne reste une priorité de la politique du nouveau président américain, la nouvelle administration de Washington s'engage, «avant le décollage des négociations avec Téhéran» à consulter ses alliés proche-orientaux – principalement ceux qui entretiennent des rapports pour le moins conflictuels avec l'Iran – des conditions de son retour audit accord, Israël entend étudier « toutes les options » à sa disposition, notamment militaires, pour empêcher Téhéran d'accéder à l'arme nucléaire. C'est à ce titre, d'ailleurs, que la diffusion, par les chaînes de télévision israéliennes, de la cérémonie d'investiture de Joe Biden, avait été émaillée de commentaires particulièrement pessimistes de la part d'un grand nombre de personnalités politiques israéliennes. La classe politique de l'Etat hébreu reproche, en effet, au nouveau locataire de la Maison Blanche, de vouloir d'abord revenir à l'accord de Vienne avant d'envisager l'élaboration éventuelle d'un texte qui pourrait comporter de nouvelles conditions se rapportant aux « points oubliés » par l'accord initial et qui auraient trait notamment à l'encadrement du programme balistique de Téhéran et à l'interdiction des activités « déstabilisatrices » de l'Iran au Moyen-Orient. N'oublions pas que lorsque Barack Obama avait tenté d'avoir une relation moins antagoniste avec Téhéran et pris le risque d'affronter Netanyahou, il avait déclenché l'ire du camp républicain, voire même celle de certains députés démocrates, à telle enseigne que certains d'entre eux l'avaient qualifié de « sponsor du terrorisme » et avaient offert l'occasion au Premier ministre israélien de prononcer un discours devant le Congrès américain dans lequel ce dernier avait ouvertement dénoncé la politique du président américain vis-à-vis de l'Iran. Est-ce à dire qu'en s'engageant aussi frontalement contre la volonté israélienne sur un dossier aussi stratégique que celui du nucléaire iranien, Joe Biden s'expose à de nombreuses attaques et pressions susceptibles de lui compliquer la tâche et de ternir son mandat ? Attendons pour voir...