Dans un jugement rendu ce mardi par la Cour d'Appel de La Haye, les Pays-Bas ont été jugés partiellement responsables du massacre de Srebrenica et devront, à ce titre, «verser une compensation partielle» aux familles des victimes a déclaré la juge Gepke Dulek. Mais comment se fait-il que les Pays-Bas puissent être jugés responsables en tout ou en partie d'une tuerie qui s'est déroulée loin de ses frontières durant la guerre de Bosnie-Herzégovine alors que la Hollande n'y était pas partie prenante ? Le «massacre de Srebrenica» ou «génocide de Srebrenica» comme l'appellent certains, désigne l'assassinat de plus de 8000 hommes et adolescents bosniaques à Srebrenica en Bosnie-Herzégovine en Juillet 1995. Considéré comme étant «le pire massacre commis en Europe depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale et ayant été qualifié de «génocide» par le Tribunal International pour l'ex-Yougoslavie et par la Cour Internationale de Justice, cet abominable carnage a été perpétré par les soldats de l'Armée de la République Serbe de Bosnie sous le commandement du Général Ratko Mladic dans une ville déclarée «zone de sécurité» par l'O.N.U. qui y maintenait une force composée de près de 400 Casques bleus néerlandais. Mais pourquoi si l'Etat néerlandais a été jugé coupable en cette affaire, il ne l'a été que partiellement ? Considérant dans ses attendus qu'il n'est pas certain «que ces personnes n'auraient pas été tuées plus tard même si elles étaient restées dans l'enclave» sous la protection des soldats onusiens, la Cour a donc condamné l'Etat néerlandais à ne verser que 30% des dommages et intérêts réclamés par les familles des victimes musulmanes dont une grande partie a fait le déplacement jusqu'à La Haye pour être présente au moment de l'annonce de la décision de justice ; une décision qualifiée de discriminatoire par Munira Subasic, la présidente de l'Association des Mères de Srebrenica qui se réserve encore le droit de saisir la Cour Suprême. Il convient de signaler, à ce titre, que si le massacre de Srebrenica s'est soldé par plus de 8.000 morts, l'Etat néerlandais n'a été reconnu responsable que de la mort de 350 d'entre eux quand les Casques bleus hollandais avaient, selon la juge GepkeDulek, «facilité la séparation des hommes et des garçons musulmans tout en sachant qu'il y avait un risque réel qu'ils subissent un traitement inhumain ou qu'ils soient exécutés par les Serbes de Bosnie». Retranchés dans leur base, les hommes du bataillon néerlandais appelé «Dutchbat» avaient d'abord assuré la protection de milliers de réfugiés dans l'enclave des Nations-Unies. Mais rapidement submergés, ils furent contraints de refuser d'accueillir de nouveaux arrivants puis de permettre aux Serbes de Bosnie d'évacuer les réfugiés ; ce qui a fait dire à la juge de la Cour d'Appel de La Haye que «le Dutchbat aurait dû prévenir ces hommes des risques qu'ils couraient... (donc)... de leur laisser le choix de rester dans l'enclave». Ainsi, le massacre de Srebrenica, cette enclave limitrophe de la Serbie qui était placée sous la protection des Casques bleus hollandais lorsqu'elle a été prise par les forces serbes de Bosnie le 11 Juillet 1995, reste une des pages les plus noires de cette guerre de Bosnie-Herzégovine qui a duré de 1992 à 1995 et constitue une tâche indélébile dans l'histoire des Pays-Bas. Ce malheureux évènement suscite, enfin, une grande controverse dans le pays à telle enseigne que 200 anciens soldats de la Dutchbat réclament aujourd'hui 22.000 euros chacun de dommages et intérêts pour avoir été envoyés par leur gouvernement remplir «une mission irréaliste dans des circonstances impossibles».