Maintenant qu'elle a obtenu le feu vert officieux pour se développer vers l'Afrique, Air Arabia devrait enfin pouvoir déployer son business plan de départ qu'elle pensait développer en s'implantant au Maroc. Le départ tonitruant de Driss Benhima de la RAM aurait eu entre autres pour cause le bras de fer permanent auquel se livrait la compagnie nationale avec Air Arabia. La RAM voyait d'un mauvais œil le développement d'une low-cost sur son terrain de prédilection, l'Afrique de l'Ouest. Elle ne s'en est d'ailleurs jamais cachée. En effet, l'accord signé entre le gouvernement marocain et Air Arabia prévoyait aussi des dessertes vers les pays africains. Mais après le lancement de la compagnie, l'Etat lui a refusé de couvrir l'Afrique «afin de protéger la compagnie nationale». Depuis, l'Afrique sur laquelle l'entreprise misait gros ne démarre toujours pas. «Si les lignes africaines s'ouvraient, notre flotte marocaine se porterait à huit avions au lieu de quatre et nous pourrions doubler les effectifs», avait lancé en 2012 Adel Ali, PDG d'Air Arabia, comme pour essayer de séduire les autorités et leur faire changer d'avis. Des résultats encourageants Bien que les résultats 2015 de la compagnie n'aient pas encore été communiqués, le management affirme qu'Air Arabia enregistre de bonnes performances sur le Maroc. «Malgré la conjoncture actuelle, l'année 2015 est très positive en termes de trafic de passagers. Notre réseau grandit et le nombre de passagers que nous transportons augmente», a déclaré Laila Mechbal, directrice générale d'Air Arabia Maroc, lors de l'ouverture de la ligne Marrakech- Francfort en décembre dernier. Avec plus de de 4 millions de passagers transportés à fin 2014, Air Arabia Maroc serait devenue autonome financièrement selon les propos de son PDG, mais ce n'est que depuis fin 2013, soit cinq ans après le démarrage de ses activités, qu'elle atteint le seuil de rentabilité. Des performances enregistrées grâce à un investissement permanent, notamment dans la maintenance des avions pour les rendre aptes à supporter de nombreuses rotations liées à l'extension continue du réseau. En effet, en 2015, Air Arabia envisageait l'ouverture de 7 nouvelles lignes pour porter le nombre de liaisons à 30 entre le Royaume et l'Europe. Objectif atteint. Par ailleurs,la compagnie low-cost, fruit d'une joint venture entre le groupe Holmarcom et d'Air Arabia Groupe, a mis les petits plats dans les grands en proposant des navettes aéroportuaires depuis juillet 2015. En collaboration avec Supratours, Air Arabia Express dessert les villes d'Errachidia et Erfoud vers et au départ de l'aéroport de Fès ainsi que Béni-Mellal, Fkih Ben Salah et Khouribga vers et au départ de l'aéroport de Casablanca. Depuis le 27 Mars dernier, de nouvelles lignes de navettes aéroportuaires desservent les villes de Meknès vers et au départ de l'aéroport de Fès, Tétouan vers et au départ de l'aéroport de Tanger et Al Hoceima via Midar et Imzouren vers et au départ de l'aéroport de Nador. Autrement dit, Air Arabia ne lésine pas sur les moyens pour doper ses revenus et atteindre son objectif de 10% de croissance annuelle. Une seule issue, l'Afrique Pour autant, les spécialistes du secteur affirment que la compagnie stagne et que les réalisations financières visées ne sont pas en ligne avec les prévisions initiales. «L'Afrique de l'Ouest est la seule issue pour Air Arabia pour dépasser cet immobilisme dans lequel elle se retrouve cantonnée. D'ailleurs, l'Afrique est la motivation première qui l'a poussée à s'implanter au Maroc», rappelle l'ancien PDG d'une compagnie low-cost marocaine. Pour d'autres opérateurs, Air Arabia devrait être appelée à jouer un rôle encore plus important dans le paysage aérien marocain afin de drainer davantage de flux de voyageurs. «Le Maroc a besoin d'une compagnie low-cost. Il faudrait qu'Air Arabia devienne une compagnie pleinement marocaine dans son business, une compagnie aérienne stratégique pour le marché marocain, non seulement sur le plan interne, en reliant pourquoi pas des villes marocaines entre elles, mais aussi sur l'Europe en offrant davantage de fréquence notamment de nuits, et surtout sur l'Afrique », avance Othman Chérif Alami, PDG d'Atlas Voyages. En effet, l'intérêt d'une représentation d'Air Arabia au Maroc était justifié par l'emplacement géographique du Royaume. «Ce pays nous donne une visibilité de couverture dans deux continents à savoir l'Afrique et l'Europe. Et c'est dans cet esprit que notre business plan a été établi il y a 4 ans», n'avait de cesse de répéter en 2012 Adel Ali, PDG d'Air Arabia. A priori, l'année 2016 devrait constituer un tournant pour Air Arabia au Maroc. L'arrivée de Hamid Addou à la tête de la RAM est censée détendre les relations avec Air Arabia et de là, lui permettre de prendre enfin son envol vers l'Afrique. Dans une récente déclaration à l'occasion de l'implantation de la compagnie à bas coûts en Jordanie, Adel Ali a annoncé qu'Air Arabia s'implanterait dans 7 nouveaux aéroports, portant le nombre d'aéroports desservis dans la région MENA de 115 à 122. Sachant que les perspectives au Moyen Orient restent réduites, pour ne pas dire absentes, vu le climat d'insécurité qui y règne, cette annonce sonne comme une confirmation du feu vert des autorités marocaines dont la place se fait l'écho depuis quelques mois déjà. N'en déplaise aux détracteurs des low-cost, les vols à bas coûts constituent un enjeu vital pour le tourisme, car les clients ont tendance à donner plus de valeur au prix qu'au service. En outre, plusieurs travaux de recherches sur l'impact économique des compagnies low-cost au niveau local et régional mettent en évidence l'effet positif sur la demande dans un environnement concurrentiel. Au-delà d'une augmentation globale des flux, les effets attendus sont multiples : une dessaisonalisation et une diversification de la demande, notamment avec l'augmentation des courts séjours. Et le Maroc en aurait bien besoin ! *** Une DG très discrète Elle est la tête d'Air Arabia depuis janvier 2014, et personne, du moins dans le gotha du tourisme marocain, ne la connaît. Mais il faut dire que son prédécesseur, un certain Amin Alhaimi, un yéménite, ne l'était pas davantage. Seulement, voir une femme à la tête d'une low-cost, ou plus justement d'une filiale de low-cost, n'est pas chose commune. En réalité, Laila Mechbal est en quelque sorte un «produit maison». Ayant démarré sa carrière à Air Arabia en tant que Finance Manager en avril 2009, cette experte comptable diplômée de l'ISCAE, avait été à la bonne école avant d'intégrer la low-cost émiratie. En effet, pendant plus de 4 ans, elle a officié en tant que senior manager au sein de la feue «Atlas Blue». Mais ce n'était pas là son expérience la plus probante puisqu'avant d'intégrer le secteur aérien, cette lauréate de l'ENCG Tanger a été plus de 5 ans Auditrice au sein du cabinet Mohamed Drieb. A Air Arabia, elle gravit peu à peu les échelons jusqu'à devenir directrice générale de la compagnie low-cost leader sur le Maroc. Hormis ces brèves apparitions lors des inaugurations de nouvelles lignes, à l'instar de celle de Marrakech-Pau le 4 avril dernier, la directrice générale reste sourde aux demandes d'interviews. «Il est vrai que nous ne travaillons pas beaucoup avec Air Arabia, simplement il est vrai que l'équipe est complétement absente des radars des professionnels des agences de voyages en terme de communication. Peut-être devrait-elle ne serait ce que se présenter vu les enjeux à venir pour la compagnie », suggère Othman Chérif Alami, PDG d'Atlas Voyages. A sa décharge, il faut dire que toutes les prises de parole évoquant la stratégie d'Air Arabia ont toujours été menées par son PDG Adel Ali. Vraisemblablement, les directeurs de filiales d'Air Arabia sont désormais plutôt des managers exécutifs qui n'ont pas vocation à prendre la lumière. Car aussi bien Laila Mechbal qu'Amine Alhaimy, sans rien renier de leurs compétences ni de leur savoir faire, n'ont pas le même profil que le premier DG d'Air Arabia Maroc nommé en 2009. En effet, Jason Bitter avait à son actif plus de 15 ans d'expérience dans le domaine, aussi bien en Europe qu'en Asie. Avant de rejoindre Air Arabia, il occupait le poste de Chief Executive Officer de la première compagnie aérienne low-cost de l'Europe Centrale, Sky Europe Airlines en Slovaquie, et auparavant, celui de Chief Operating Officer de la première compagnie aérienne lowcost en Inde, Spice Jet Limited, à New Delhi. *** Aux origines du low-cost au Maroc Après les Etats-Unis, le phénomène de libéralisation s'est étendu à d'autres pays: l'Union Européenne tout d'abord, où la libéralisation s'est appliquée progressivement entre 1988 et 1997, puis de façon plus ponctuelle en Asie (Asie du Sud-Est, Inde) et en Amérique du Sud et Centrale (Brésil, Mexique). Au moment du lancement du plan Vision 2010 en 2001, une demande auprès de la Commission Européenne fut faite par le gouvernement marocain afin de négocier un accord de libéralisation avec les Etats membres de l'Union. Les négociations débutent en 2005 et aboutissent le 12 décembre 2006 à la signature d'un accord qui a pris effet en 2007 après ratification de l'accord par les pays de l'Union Européenne. L'application de l'accord se traduit par la fin de la situation d'oligopole qu'avaient les compagnies traditionnelles. Si on prend le cas des liaisons internationales entre la France et le Maroc, seules la Royal Air Maroc (RAM), Air France et quelques compagnies charter affrétées par des tour-opérateurs possédaient des droits de trafic. La libéralisation a permis à n'importe quelle compagnie européenne d'effectuer une liaison depuis n'importe quel pays européen vers n'importe quel aéroport du Maroc, sans limitation de capacité́ et de fréquence. La réciprocité́ s'applique, permettant aux compagnies marocaines de desservir sans contrainte l'Europe. L'ouverture à la concurrence a entraîné l'arrivée de low-cost. Grâce à une compression des coûts d'exploitation des avions et de la masse salariale, ces compagnies peuvent proposer des prix inférieurs aux compagnies traditionnelles Ces compagnies proposent des liaisons court-courriers et moyen-courriers régulières en privilégiant des dessertes directes point-à-point. Le choix d'aéroports secondaires n'est pas partagé par toutes les compagnies, celles qui suivent strictement le modèle des low-cost privilégient des aéroports de petite taille, moins saturés et offrant des taxes moins élevées, mais la majorité́ des compagnies préfèrent des aéroports plus proches des marchés à desservir. Ces deux stratégies correspondent respectivement au choix de développement des deux compagnies dominant le marché en Europe : Ryanair, compagnie irlandaise et EasyJet, compagnie britannique. La première privilégie des aéroports de taille modeste quitte à s'éloigner de la ville à desservir, alors qu'Easy Jet préfère les grands aéroports internationaux. Outre les compagnies déjà présentes sur le territoire européen et qui ont profité de cette opportunité́ pour conquérir de nouveaux marchés, on a assisté à la création de nouvelles entreprises. Trois compagnies marocaines sont ainsi apparues entre 2004 et 2009. La première à avoir vu le jour est Atlas Blue, en 2004, suivi de Jet4You en 2005 et enfin, d'Air Arabia Maroc en 2009. Elles se positionnent toutes sur le segment des low-cost, mais leur actionnariat diffère. Ainsi, Atlas Blue était la filiale de la compagnie nationale marocaine, la RAM. Cette compagnie aura eu une courte existence puisqu'elle a disparu en 2009. Jet4You, devenue depuis JetAir Fly, était détenue à la fois par des actionnaires marocains et par le plus gros tour-opérateur européen, l'Allemand TUI, aujourd'hui unique maître à bord. Enfin, Air Arabia Maroc est une filiale de la compagnie Air Arabia qui opère déjà aux Emirats Arabes Unis (elle appartient à l'émirat de Sharjah). Au Maroc, la part de marché des compagnies low-cost a fortement progressé, passant de 7 % en 2005 à 30 % en 2011, selon les derniers chiffres disponibles. Le territoire marocain est desservi par les principales low-cost, avec à leur tête les deux compagnies dominantes en Europe : Ryanair et EasyJet, mais aussi par Transavia, Vueling, Germanwings ...s Elle est la tête d'Air Arabia depuis janvier 2014, et personne, du moins dans le gotha du tourisme marocain, ne la connaît. Mais il faut dire que son prédécesseur, un certain Amin Alhaimi, un yéménite, ne l'était pas davantage. Seulement, voir une femme à la tête d'une low-cost, ou plus justement d'une filiale de low-cost, n'est pas chose commune. En réalité, Laila Mechbal est en quelque sorte un «produit maison». Ayant démarré sa carrière à Air Arabia en tant que Finance Manager en avril 2009, cette experte comptable diplômée de l'ISCAE, avait été à la bonne école avant d'intégrer la low-cost émiratie. En effet, pendant plus de 4 ans, elle a officié en tant que senior manager au sein de la feue «Atlas Blue». Mais ce n'était pas là son expérience la plus probante puisqu'avant d'intégrer le secteur aérien, cette lauréate de l'ENCG Tanger a été plus de 5 ans Auditrice au sein du cabinet Mohamed Drieb. A Air Arabia, elle gravit peu à peu les échelons jusqu'à devenir directrice générale de la compagnie low-cost leader sur le Maroc. Hormis ces brèves apparitions lors des inaugurations de nouvelles lignes, à l'instar de celle de Marrakech-Pau le 4 avril dernier, la directrice générale reste sourde aux demandes d'interviews. «Il est vrai que nous ne travaillons pas beaucoup avec Air Arabia, simplement il est vrai que l'équipe est complétement absente des radars des professionnels des agences de voyages en terme de communication. Peut-être devrait-elle ne serait ce que se présenter vu les enjeux à venir pour la compagnie », suggère Othman Chérif Alami, PDG d'Atlas Voyages. A sa décharge, il faut dire que toutes les prises de parole évoquant la stratégie d'Air Arabia ont toujours été menées par son PDG Adel Ali. Vraisemblablement, les directeurs de filiales d'Air Arabia sont désormais plutôt des managers exécutifs qui n'ont pas vocation à prendre la lumière. Car aussi bien Laila Mechbal qu'Amine Alhaimy, sans rien renier de leurs compétences ni de leur savoir faire, n'ont pas le même profil que le premier DG d'Air Arabia Maroc nommé en 2009. En effet, Jason Bitter avait à son actif plus de 15 ans d'expérience dans le domaine, aussi bien en Europe qu'en Asie. Avant de rejoindre Air Arabia, il occupait le poste de Chief Executive Officer de la première compagnie aérienne low-cost de l'Europe Centrale, Sky Europe Airlines en Slovaquie, et auparavant, celui de Chief Operating Officer de la première compagnie aérienne lowcost en Inde, Spice Jet Limited, à New Delhi.