Les accidents de la route demeurent un fléau dans notre pays. On atteint le triste record de 4.000 tués par an, des milliers d'handicapés à vie, des centaines de milliers de blessés… Pourtant, on peut remédier un tant soi peu à cette situation en développant et en mettant en place une politique de proximité de la prise en charge des urgences hospitalières et surtout pré- hospitalière grâce à un système d'assistance médicale urgente ( S.A.M. U). L'idée princeps qui prévaut est d'amener aussi vite que possible un médecin sur les lieux de l'accident, celui-ci pourra procéder à la médicalisation des interventions sur les lieux mêmes des accidents. Pour ce faire, l'hôpital doit sortir de ses murs. Développer une politique de proximité de la prise en charge des urgences suppose la mise en œuvre effective d'une médecine d'urgence pré-hospitalière. Celle-ci nécessitera une nouvelle organisation plus performante qui devra prendre en considération plusieurs éléments qui sont des préalables à la réussite de la médecine pré-hospitalière. Tout d'abord, il faut en finir avec la théorie de la porte fermée au niveau de nos hôpitaux. Il est inadmissible, voire aberrant qu'au 21eme siècle , à l'heure de la télémédecine, de la greffe d'organes, de constater que nos établissements hospitaliers voient leurs responsabilités s'arrêter à leurs portes, en conséquence les professionnels de santé ( médecins- infirmiers...) ne peuvent pas sortir pour apporter aide et secours aux blessés graves, aux patients en situation d'urgence, aux parturientes et aux nouveau-nés là ou ils se trouvent afin de leur assurer un accès au système de soins par une prise en charge rapide et adéquate. La vie d'un blessé dépend dans bien des cas de la célérité avec laquelle celui-ci sera traitée, tout peut se jouer dans les 15 premières minutes et toutes les études et recherches montrent que le pronostic vital est étroitement lié à l'efficacité réelle de cette conception de l'urgence pré-hospitalière. Comme il n'est plus à démontrer que l'accueil hospitalier d'ailleurs décrit comme étant une étape ultérieure, et les techniques de réanimation spécialisées ne serviront à rien si les gestes des premiers secours ne sont pas réalisés à temps. L'organisation du fonctionnement de l'urgence pré-hospitalière améliore notablement le pronostic, et ce d'autant plus que l'alerte est précise, rapide et circonstanciée. 11 milliards par an soit 2 % du P.I.B Au Maroc, en matière de médecine curative, l'urgence et plus particulièrement l'urgence pré-hospitalière est la situation la plus fréquente chez nous, et bien entendu la plus préoccupante : 50% des consultations hospitalières sont effectuées au niveau des services des urgences soit trois millions sur six. Plus de 70% sur les trois millions sont des urgences ressenties dites à tort (fausses urgences). 25% des hospitalisations émanent des services des urgences dans les hôpitaux. 11% de la charge de morbidité globale sont constitués par les accidents et les traumatismes Le nombre d'hospitalisés de la pathologie traumatique occupe actuellement un lit de réanimation sur trois dans les centres hospitaliers et enfin ces accidents de la voie publique (AVP) coûtent à l'Etat 11 milliards de dh/an, soit 2,5% du PIB. Les conclusions de l'étude épidémiologique des AVP au Maroc, réalisée par le laboratoire des biostatistiques de la faculté de médecine de Casablanca montrent que la problématique des urgences par traumatismes est une priorité de santé publique. Puisque son impact en termes de morbidité et, de mortalité est de loin supérieur à celui des pathologies sous programmes. Une autre étude dans la même métropole de Casablanca sur la mortalité des traumatismes s'est avérée être de 63%, sur les lieux de l'accident. Ce qui confirme que la survie ou la diminution de la surmortalité par AVP est en rapport direct avec la précocité et la qualité des soins qui peuvent être prodigués sur les lieux de l'accident. Des anomalies inconcevables Soulever aujourd'hui le problème de la médecine pré-hospitalière, c'est à l'évidence mettre le doigt sur les anomalies inconcevables, inadmissibles qui ont toujours prévalu depuis des décennies concernant les secours qui sont apportés aux blessés de la route. Sans chercher à critiquer tel ou tel procédé, telle ou telle démarche, tel ou tel responsable ou décideur, nous dirons tout simplement que lorsqu'il y a un accident de la route avec des blessés qu'ils soient légers ou graves et dont le pronostic vital dépend d'une intervention immédiate, les ambulances de la protection civile mettront toujours un laps de temps incompressible pour se rendre sur les lieux, un délai qui peut dépasser 30 voire 40 minutes en milieu urbain. L'exemple le plus récent c'est celui des jeunes étudiants ingénieurs de Mohammedia qui ont fait une chute du 2eme étage et dont l'un est décédé, l'ambulance a mis 30 minutes pour arriver sur les lieux. On devine aisément ce qu'il en est en milieu rural. Médicaliser l'intervention sur le lieu même de l'accident Concevoir un système préhospitalier d'urgence s'appuyant sur un réseau de services efficace et efficient permettant d'offrir à la population de toutes les régions du royaume une prise en charge immédiate et des soins préhospitaliers de qualité est une démarche qui permettra de réduire considérablement la mortalité routière et autres incidents et accidents et surtout d'éviter des milliers d'handicaps. L'idée de médicaliser l'intervention sur le lieu même de l'accident n'est pas nouvelle Depuis des années, plusieurs réflexions, études , projets concernant la médecine pré-hospitalière sont entrepris par différents intervenants et plus particulièrement par le comité de pilotage des urgences à la Wilaya du grand Casablanca dans les années 2000 et par la suite par la société marocaine de médecine d'urgence et de catastrophe afin de soumettre des recommandations permettant d'implanter dans toutes les régions du royaume des services pré hospitaliers d'urgence. La médecine d'urgence pré hospitalières comme on peut le comprendre sera d'un apport considérable dans la réduction de la mortalité et de la morbidité, c'est une médecine qui se caractérise par la rapidité des prestations appropriées, efficientes et de qualité dont l'objectif Est de venir en aide immédiatement à la personne en situation de détresse. Mais pour ce faire une volonté politique et administrative de prioriser le secteur préhospitalier et d'y accorder les ressources humaines, financières, matérielles et informationnelles sont nécessaires à la réalisation de ces objectifs et de ce projet qui remonte a quelques années Qu'est-ce que le service d'aide médicale urgente (SAMU) ? Le SAMU est un service médico-technique de l'hôpital, à vocation régionale ; c'est une unité fonctionnelle 24h/24. Il est sous l'autorité du directeur de l'hôpital, mais dirigé dans la majorité des cas par un médecin anesthésiste-réanimateur qui est le responsable technique. Il doit obligatoirement être équipé d'un centre de réception et de régulation des appels, doté d'un numéro unifié, simple et facilement mémorisable. Au Maroc, la genèse de l'organisation du système des urgences et de prévention routière, nous renvoie en premier lieu, au décret du 15 juillet 1977. Ce décret porte sur la création du comité national de prévention des accidents de la circulation (CNPAC). Trois ans plus tard, le ministère de la santé créa la direction de la médecine des urgences et des catastrophes naturelles (DMUCN), dont quelques réalisations avaient vu le jour, notamment la création d'antennes routières avec ambulances et infirmiers sur l'axe routier de Rabat-Casablanca et Rabat-Khémisset. Depuis janvier 2002, un embryon de SAMU (SAMU.01) a vu le jour au CHU Ibn Rochd à Casablanca avec un CESU et un centre de régulation. Ce centre de régulation assure une écoute médicale continue provenant du moins actuellement des centres hospitaliers préfectoraux (CHP) du grand Casablanca. Il organise et réalise les transferts interhospitaliers, en attendant la création d'un vrai SAMU. Il faut passer à l'action La situation actuelle de la prise en charge des accidentés et blessés graves reste en deça de ce que nous sommes en droit d'attendre. La protection civile fait ce qu'elle peut avec ses moyens et ses propres personnels, elle est le seul intervenant en phase pré-hospitalière, une situation qu'elle n'a pas choisie. Ces dysfonctionnements dans la chaine de secours et de la gestion médicalisée des urgences sur le lieu même de l'accident sont inhérents au retard accusé dans la mise en œuvre effective du SAMU de Casablanca qui pourra servir de modèle aux autres SAMU qui viendront par la suite. L'implantation des SAMU au niveau des différentes régions du royaume doit pouvoir s'inscrire dans les mesures prioritaires et stratégiques du ministère de la santé , des mesures qui doivent être mises en place au cours des cinq prochaines années au cours desquelles l'actuel gouvernement pourra mettre en exécution un projet très important pour notre pays car il permettra l'implantation dans toutes les régions du Maroc d'une chaîne d'intervention rapide qui sauvera des milliers de vies humaines . Avec l'actuel ministre de la santé, le Pr Houcein Louardi, spécialiste en urgentologie, il y a tout lieu de croire que la mise en œuvre de ce projet et des changements indispensables pour les urgences pré- hospitalières pourront se réaliser plus facilement. C'est en tous les cas ce que nous souhaitons, ce que nous espérons et ce pourquoi nous militons au PPS depuis des années afin de permettre au système national de santé de jouer pleinement son rôle qui consiste à garantir la santé pour tous les citoyens là où ils se trouvent dans un esprit d'équité et d'égalité des chances.