72e Foire du livre de Madrid La librairie Diwan, qui a occupé le seul stand d'un marocain exposant à la 72e Foire du livre de Madrid (31 mai - 16 juin), s'est distinguée par la forte affluence des visiteurs pour la commercialisation d'ouvrages spécialisés sur le monde arabe et l'islam. Elle s'est érigée ainsi en une plateforme de diffusion des ouvrages et essais écrits par des marocains, dont "Maroc-Espagne : plaies non cicatrisées" du sociologue-journaliste Mohamed Boundi, dont la version française a été publiée en chapitres dans Al Bayane durant le précédent mois de ramadan. Participant pour la première fois à cette foire, Diwan s'est convertie, en l'espace de deux semaines, en un lieu de rencontres obligé d'intellectuels, de chercheurs et d'étudiants s'intéressant aux relations entre l'Espagne et le monde arabe, aux perceptions réciproques entre marocains et espagnols, au patrimoine culturo-historique hispano-arabe et aux développements actuels sur la scène arabe comme conséquence des mouvements sociaux. Elle s'est aussi distinguée pour abriter des cérémonies de signature d'ouvrages écrits par des marocains et espagnols qui traitent de la thématique marocaine. De ce fait, Diwan adhère aux objectifs de la Foire du Livre de Madrid qui visent à promouvoir le livre, la lecture et l'activité des entrepreneurs, entités et institutions se consacrant à l'édition, la distribution ou la vente au public de livres. Selon l'annuaire des statistiques culturelles d'Espagne en 2011, plus de 284 millions d'ouvrages ont été publiés sur la base de 83.000 titres édités, soit une moyenne de 3.441 exemplaires par titre. Dans un premier bilan rendu public lundi, les organisateurs de la Foire de Madrid signalent dans un communiqué que les ventes des exposants ont été de 7,1 millions d'euros soit une augmentation de 9,3% par rapport à 2012. Au moins, 3.600 auteurs ont défilé aux stands pour la signature de leurs ouvrages. Le succès de cette édition se mesure par le taux d'affluence et d'acquisition d'ouvrages de différents thèmes aux 353 stands ainsi que par la participation de 457 exposants (dont neuf organismes officiels, neuf distributeurs, 61 libraires spécialisés, 59 libraires généralistes et 308 éditeurs). Plaies non cicatrisées dans l'imaginaire collectif : "Maroc-Espagne : Plaies non cicatrisées", qui a été retenu parmi les ouvrages à signer à la 72e Foire du Livre de Madrid, est le premier essai sociologique sur l'image du Maroc et des marocains dans l'opinion publique espagnole, écrit par un marocain en espagnol. L'ouvrage décortique le discours des médias espagnols sur le traitement de la question marocaine et explique les causes qui motivent la persistance dans le temps et dans l'imaginaire collectif espagnol d'un ensemble de préjugées, stéréotypes et images déformées sur la société marocaine. L'objectif principal de cet ouvrage (Edition Diwan, 304 pages) est l'étude de la construction de l'image que les médias espagnols communiquent à l'opinion publique en relation avec le Maroc à travers différentes lignes éditoriales et approches idéologiques. Historiquement, les tensions entre les deux Etats sont récurrentes et avaient conduit à des conflits armés, une décolonisation graduelle et des appréhensions aux plans économique, territoriale et culturel. L'étude se divise en quatre chapitres construisant une argumentation commune. Le premier présente le cadre théorique qui permet de déceler les facteurs qui exercent une incidence sur la construction de la réalité sociale et sur le rôle des moyens de communication de masse. Le deuxième explique la situation de déséquilibre qui a marqué durant un siècle l'histoire des relations maroco-espagnoles (1850-1956). Durant cette étape, se sont renforcés les stéréotypes et préjugés négatifs collés aux marocains qui meublaient les manuels scolaires, la littérature, la presse, le cinéma et les discours politiques dans l'objectif de dénigrer leur culture et style de vie. La persistance par la suite de contentieux insolubles (tel le cas des possessions territoriales dans le nord du Maroc), la recherche d'une solution du conflit du Sahara et les problèmes dérivés des récents contacts directs des populations à travers l'immigration, le tourisme et les investissements rendent souvent difficile l'éradication totale des motifs de tension. Au troisième chapitre, l'auteur opte pour l'analyse de contenu des journaux d'audience nationale d'Espagne dans l'objectif de vérifier si ces perceptions négatives ont disparu ou continuent d'être inaltérables dans la presse espagnole, particulièrement dans les moments de crise. Durant les périodes de tension, soutient l'auteur, la presse espagnole enregistre un haut niveau de production d'éléments informatifs, interprétatifs et graphiques relatifs au Maroc. L'étude permet ainsi de constater que les thèmes traités sont les mêmes qui sont abordés durant les quatre dernières décennies (1956-2012): Sahara, pêche, possessions territoriales, immigration, religion, monarchie et système politique. Ce sont également les mêmes questions qui se considèrent comme des éléments de tension pour occuper de larges espaces dans la presse et le discours des leaders politiques en Espagne. Enfin, au quartier et dernier chapitre, l'auteur recourt à d'autres techniques de la recherche sociologique et ressources méthodologiques, tels les sondages d'opinion et l'entretien en profondeur avec des journalistes marocains et espagnols, pour pouvoir aboutir à une idée globale sur les effets de la crise dans les relations bilatérales et le comportement des acteurs sociaux et politiques. Parmi les conclusions auxquelles est parvenue l'étude, l'auteur soutient que le contentieux territorial ravive, plus d'un demi-siècle après la fin du protectorat espagnol sur le nord du Maroc, l'ensemble des relations bilatérales. En dépit des bonnes intentions enregistrées au niveau officiel, les germes de tension et le climat de crispation dominent en permanence les rapports politiques entre Rabat et Madrid. Toutefois, au plan social, la situation est distincte puisque les contacts entre les deux sociétés civiles demeurent exemplaires. A l'exception de cas isolés, les rapports de convivialité n'ont pas été infectés par des comportements collectifs racistes ou xénophobes à l'égard de la communauté marocaine en Espagne. Le mécontentement du gouvernement marocain se justifie souvent par le traitement journalistique qui se fait en Espagne des informations relatives à ses institutions, aux relations commerciales et humaines ou à la question du Sahara et qu'il qualifie de tendancieux Conscients de la prérogative de favoriser le dialogue officiel et fortifier les échanges entre les sociétés civiles, les médias aussi bien marocains qu'espagnols tentent, dans la nouvelle phase des relations maroco-espagnoles d'atténuer les stéréotypes négatifs et connotations péjoratives. L'étude du rôle des mass media devient ainsi très utile dans le rapprochement de l'opinion publique à la réalité de chacun des deux pays. C'est la raison pour laquelle cet essai, œuvre d'un chercheur marocain, vient remplir un vide dont souffre la bibliographie académique, et pour contribuer à comprendre le contenu de ce qui s'écrit sur le Maroc et comment se présente son système politique aux lecteurs de la presse d'Espagne.