Le Maroc aura, bientôt, son «Sommet social». Jamal Bellahrach, président de la Commission Emploi et affaires sociales à la CGEM, l'a annoncé aux journalistes, lors d'un point de presse, jeudi au siège de l'organisation patronale à Casablanca. Mais, a-t-on vraiment compris les raisons du patronat et le « pourquoi et le comment » de cette initiative, prise juste après l'accord signé entre la CGEM et l'UMT pour la mise en place du « Médiateur social » ? Pour l'heure, l'idée est au stade de projet. Le patronat est à l'œuvre pour associer le plus grand à cette idée « utile ». La problématique du chômage et de l'employabilité des jeunes, conjuguée à la dégradation ambiante des conditions de travail, ont fini par installer une profonde lassitude. Le débat demeure biaisé et le « dialogue social » semble dans l'impasse. Le Maroc, dans le contexte du « Printemps arabe », ne peut continuer à traiter les problèmes d'aujourd'hui avec des « logiciels d'antan ». Le « Sommet social » serait, aux yeux de Jamal Bellahrach, une « opportunité exceptionnelle de faire un bilan objectif et surtout de définir et de trouver un accord avec les parties prenantes sur les priorités de la nouvelle législature ». Il ne s'agit point de palabres, mais d'un moment historique » pour « mettre sur la table tous nos dossiers à enjeux structurants et définir un agenda à court, moyen et long termes ». Il n'est pas question, non plus, de remettre en cause les acquis sociaux, et encore moins, de pleurer le bilan social, déjà désastreux, mais d'opter pour une véritable alternative faite de confiance et de responsabilité, permettant à chaque acteur -centrale syndicale et organisation patronale- de comprendre la problématique de l'autre. Car la crise actuelle est, à bien des égards, une crise de l'emploi. Et vouloir reproduire le choix de continuité, les vieux schèmes, revient à se tirer une balle dans le pied. « Un sommet social, écrit M. Bellahrach, dans un document distribué aux journalistes, me semble un bon moyen pour initier cette dynamique –et comme tout le monde semble vouloir contribuer à la réussite de la nouvelle mandature- le gouvernement gagnerait à prendre cette initiative en s'appuyant sur les partenaires sociaux et la société civile pour aboutir à une feuille de route commune, totalement assumée en faisant en sorte que chacun se sente responsable du devenir du pays sans stigmatiser telle partie par rapport à telle autre. L'idée est nouvelle et ne manque certainement pas d'intérêt. M. Bellahrach, bien qu'il donne l'impression de brasser des illusions, affiche sa conviction que « ce sommet pourrait poser les bases d'une véritable démocratie sociale ». Parce qu'il va permettre de « clarifier les rôles et surtout d'identifier ce qui relève de la négociation et ce qui revient au parlement ». Lors du point de presse, M. Bellahrach a passé en revue plusieurs dossiers sociaux sur l'agenda de la commission qu'il préside, notamment le code du travail, le droit de grève, la promotion des conventions collectives. Mais, au-delà, la commission développe aussi des projets pour, disait-il, une forte mobilisation des forces vives en faveur de l'employabilité et l'amélioration des conditions de travail. C'est le cas, entre autres, de « l'Observatoire Emploi et Employabilité » et du « Pacte national pour l'emploi » avec ses 18 mesures. Emploi des jeunes, régime des retraites, flexibilité responsable, compétitivité des entreprises, liberté syndicale, évolution du SMIG, fiscalité des salaires, financement de la protection sociale, réforme de la formation professionnelle… autant de « problématiques en souffrance » qui doivent interpeller les parties prenantes, rappelait avec force Jamal Bellahrach. Quant au « Dialogue social », il est « caduc dans sa forme actuelle ». « Il doit être réformé, confiait M. Bellahrach, pour se concentrer sur le pilotage de la mise en œuvre des décisions et des orientations stratégiques du sommet social ». Il ne peut y avoir de progrès social sans croissance économique. Une lapalissade. Il se trouve cependant que le modèle économique marocain ne permet guère d'aller plus loin pour une répartition équitable des revenus. Faut-il alors bâtir une nouvelle économie qui ne fait pas nécessairement dans le «low cost» pour pouvoir élaborer un modèle social approprié, où la pauvreté et le chômage ne seraient plus une fatalité.