Dans un discours franc et fuyant la langue de bois, le président du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, a informé, mercredi matin, le parlement de la délicate situation économique dans laquelle se trouve le pays. S'appuyant sur les dernières mesures adoptées par l'Euro-groupe concernant le sauvetage de la banque espagnole, les conditions imposées par l'UE pour l'ajustement structurel et la réduction du déficit public, Rajoy a égrené une interminable liste de mesures drastiques que son gouvernement compte appliquer au cours des prochains 24 mois. Dès les premières minutes de son intervention durant une séance conjointe de députés et sénateurs, il a exposé les grandes lignes de son programme d'urgence de gouvernement. Le diagnostic de la situation qu'il avait présenté résume la profondeur de la crise dans laquelle est immergée l'Espagne et déborde toute prévision pessimiste que pourrait avoir un observateur averti. L'Espagne se trouve réellement au bord du précipice et risque de connaître en tout moment le même sort que la Grèce, le Portugal ou l'Irlande. Albayane avait, dans de précédentes chroniques, signalé certains aspects de la crise financière qui plombe l'action du gouvernement et sème le désarroi au sein de la population. Les dernières réunions du Conseil d'Europe et de l'Euro-Groupe ont révélé au grand jour les faiblesses du système économique espagnol. Qu'avait-il communiqué Rajoy aux parlementaires ? En deux mots, il a présenté les derniers accords atteints au sein de l'Union Européenne (UE) concernant le futur de son pays et les grands axes des prochains plans d'ajustement à adopter par son exécutif. Avant de continuer, il a demandé un geste de « compréhension » de la part des forces politiques, spécialement les partis d'opposition. «Nous avons ouvert la porte à un nouveau modèle d'union européenne », a dit Rajoy faisant allusion aux dernières décisions adoptées par le Conseil Européen, qui s'était tenu, estime-t-il, «à des moments spécialement critiqués pour l'euro». Sans vouloir s'attarder sur les tournures idiomatiques ou rhétoriques, il a reconnu que l'Espagne va connaître une décroissance de 2% en 2012 (contre une chute de 1,7% selon les prévisions du gouvernement) et que toutes les estimations avancées pour 2013 conduisent à une deuxième récession et à la stagnation économique (taux de croissance nul). «L'Espagne se trouve dans une situation d'extrême faiblesse», a affirmé sans mâcher les mots en confiant qu'il est appelé, selon les décisions adoptées par l'UE, à «travailler pour la consolidation du système fiscal, économique et politique ainsi que des réformes des institutions, la stabilité financière tout en œuvrant pour le renforcement de l'Europe». De même, il est mandaté pour donner une impulsion «à la compétitivité, lutter contre le chômage et moderniser l'administration». Le déficit public de l'Espagne ne doit transcender 6,3% en 2012, comme l'exige l'UE. En d'autres termes, ces mesures devront se traduire à travers la prise de décisions douloureuses. Rajoy a ainsi annoncé au parlement une profonde réforme des administrations publiques (régionales, municipales et locales), l'élimination de certaines compétences des municipalités et un strict contrôle de leurs finances. Comme première mesure, il sera procédé à la réduction de 30% du nombre de conseillers municipaux et l'élimination d'entreprises publiques agissant dans l'environnement local, de la prime de fin d'année des fonctionnaires, hauts cadres de l'administration et parlementaires en vue d'économiser quatre milliards d'euros. En 2013, seront éliminés 30% des subventions accordées par l'Etat aux partis politiques et syndicats. Comme l'avait annoncé Albayane, dans son édition de vendredi dernier, Rajoy a annoncé la hausse du type général de l'Impôt sur la Valeur Ajoutée (IVA) de trois points pour le porter à 21% et le type réduit qui passera de 8% à 10%. Le type super-réduit sera maintenu à 4%. Le programme d'ajustement proposé par Rajoy devra permettre à l'Etat des réductions additionnelles des dépenses publiques de 65 milliards d'euros d'ici à 2015. Dans la loi de finances de 2012, ont été éliminés plus de 33 milliards d'euros des dépenses publiques, rappelle-t-on. Le discours de Rajoy s'inscrit dans la ligne directe des mesures adoptées, dans la nuit de lundi à mardi, par l'Euro-groupe et contenues dans le mémorandum d'Entente qui comporte 32 conditions pour que l'Espagne puisse accéder aux 100 milliards d'euros nécessaires à la recapitalisation directe de sa banque privée. Ce texte sera signé le 20 juillet. L'Espagne est ainsi pointue du doigt par ses partenaires en Europe. Elle est appelée à ne commettre aucun faux pas. L'UE a apporté le soutien dont elle a besoin pour sauver son système bancaire et le président du gouvernement s'est engagé à appliquer les mesures exigées et tenter de tirer le pays du précipice. C'est ce qu'il a tenté de faire, mercredi, lorsqu'il s'est adressé aux représentants de la Nation pour leur informer de la situation d'extrême danger dans laquelle se trouve l'Espagne.