Un kamikaze a tué dix militaires dans un attentat contre une caserne de l'armée algérienne à Lakhdaria. LES MÉTHODES d'al-Qaida se pérennisent en Algérie. Trois mois jour pour jour après les sanglants attentats d'Alger (30 morts et plus de 200 blessés), les islamistes armés ont à nouveau utilisé l'arme de l'attentat suicide. Un kamikaze a jeté hier à vive allure un camion frigorifique chargé d'explosifs contre une caserne de l'armée à Lakhdaria, une ville située à une centaine de kilomètres au sud-est d'Alger, au lendemain de la visite du président Nicolas Sarkozy. L'attaque s'est soldée par dix militaires tués et trente-cinq blessés. Le chauffeur du véhicule piégé, un « martyr » âgé d'une vingtaine d'années, est passé à l'action alors qu'Alger, la capitale, était placée sous haute surveillance pour cause d'ouverture des 9e Jeux africains, la première grande manifestation sportive organisée dans le pays depuis le retour à la paix civile à la fin des années quatre-vingt-dix. Des milliers de policiers sont disposés autour des sites de compétition et les villages d'athlètes regroupant 8 000 participants. L'attentat a été revendiqué par al-Qaida pour un Maghreb islamique, l'ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). Les maquisards islamistes opérant dans le secteur de Lakhdaria, une région montagneuse et boisée appartiennent au noyau dur de l'organisation clandestine dirigée par Abdelmalek Droukdel, alias Abou Moussaab Abdel Ouadoud. Forte d'environ 500 hommes, cette phalange couvre les trois préfectures de Kabylie. Elle est particulièrement active dans les gorges de Palestro (l'ancien nom de Lakhdaria) qui furent l'un des grands foyers d'activisme indépendantiste durant la guerre de décolonisation. La région qui est un verrou de sécurité pour la protection d'Alger est située sur la ligne du pipeline reliant les zones pétrolifères du Sud aux débouchés maritimes. La charte pour la paix L'attentat est un camouflet pour le ministre de l'Intérieur, Yazid Zehrouni. Celui-çi avait affirmé voici quelques jours que les cellules kamikazes de l'ex-GSPC avaient été mises hors d'état de nuire à la suite d'opérations contre la nébuleuse terroriste. Le 5 juillet, le président Bouteflika, ministre de la Défense et chef des armées, avait à l'occasion de la fête nationale lancé un appel à la mobilisation générale devant ses généraux. Car les violences attribuées à al-Qaida persistent dans les zones proches des bastions des maquisards. Des attentats manqués ont visé récemment en Kabylie l'ambassadeur du Mali, un pays qui a affaire à la branche sahélienne d'al-Qaida pour un Maghreb islamique, ainsi que le préfet de Tizi Ouzou. Et une cinquantaine de personnes dont 28 islamistes ont été tuées, selon des bilans officiels et de presse, dans des violences depuis début juin. Cette « guerre » de basse intensité persiste alors qu'une « charte pour la paix et la réconciliation nationale » est censée y mettre fin. Quelque 2 200 détenus islamistes ont été libérés l'an dernier et 300 extrémistes ont rendu les armes mais une nouvelle génération influencée par l'idéologie d'al-Qaida a pris le relais. Déterminée à maintenir la pression, l'organisation clandestine avait mardi mis à profit la visite de Nicolas Sarkozy à Alger pour lancer une mise en garde à la France en l'appelant à reconnaître ses « crimes » en Afrique du Nord.