DEUX PERSONNALITÉS ayant fait leur classe sous le premier régime né de l'indépendance, en 1960, vont s'affronter, le 25 mars, au second tour de la présidentielle mauritanienne. Dimanche, au premier tour, selon des résultats qui ne devraient guère évoluer, se sont qualifiés Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, avec 23 % des voix, et Ahmed Ould Daddah, avec un peu plus de 21 %. L'issue de ce scrutin est difficilement prévisible : il s'agit de la première élection présidentielle vraiment démocratique en Mauritanie, pays qui n'a connu dans son histoire que des coups d'état ou des victoires acquises, par la grâce de la fraude organisée par le pouvoir, dès le 1er tour. Il revient donc à ceux que la rue surnomme Sidi et Ahmed de refermer une double parenthèse : celle de « la période de transition » commencée avec le coup d'état de 2005, et celle du précédent régime autocratique d'Ould Taya, qui avait mis en coupe réglée le pays de 1984 à 2005. La classe politique mauritanienne ayant été décimée par plus de vingt ans d'autoritarisme, le « changement » sera ainsi incarné par des hommes du même âge - environ 70 ans - qui ne sont pas sans points communs. L'un et l'autre sont issus de grandes familles maraboutiques du centre du pays. L'un et l'autre sont entrés dans la carrière sous le règne du « père » de la nation, Moktar Ould Daddah, le demi-frère d'Ahmed. Les deux ont également connu l'exil. Candidats «identitaires» La différence, de taille, est qu'Ahmed Ould Daddah symbolise la résistance active au despote Ould Taya, ce qui lui a valu la prison. Bien que personnellement irréprochable, Sidi Mohamed Ould Abdallahi peut d'autant moins incarner cette « lutte » qu'il est aujourd'hui soutenu par les dignitaires du régime honni. Issu du même camp que Sidi, le 3e homme, Zeine Ould Zeidane, avec ses quelque 14 %, sera courtisé. Mais la clé de ce scrutin, qui a été endeuillé par la mort d'un militaire dimanche, est aussi détenue par des candidats « identitaires » : Messaoud Ould Boulkheir, le représentant des anciens esclaves, Ibrahima Saar, la figure de proue des Négro-Africains et, dans une moindre mesure, par les islamistes d'Ould Hanena.