KINSHASA (Reuters) - Le président Joseph Kabila a obtenu 58,05% des suffrages au second tour de l'élection du 29 octobre en République démocratique du Congo, contre 41,95% pour son rival Jean-Pierre Bemba, a annoncé le président de la Commission électorale indépendante (CEI) dans une allocution télévisée. Ces résultats provisoires, d'ores et déjà contestés par le clan Bemba, doivent encore être confirmés par la Cour suprême. "C'est pourquoi, ayant obtenu la majorité absolue des voix au second tour, M. Joseph Kabila Kabange est déclaré président de la République démocratique du Congo", a annoncé Apollinaire Malu Malu. Auparavant, Kabila avait lancé un appel au calme aux Congolais après le rejet par Bemba des résultats partiels lui accordant une nette avance. Le chef de l'Etat sortant a déclaré que la police et l'armée lui restaient fidèles, laissant entendre que les forces de l'ordre ne tolèreraient pas de nouveaux troubles après les heurts survenus au cours du week-end entre ses partisans et ceux de Bemba, vice-président et ancien chef rebelle. Mais il a également tendu la main à son rival. "Je crois que le vice-président Bemba et les membres de son parti ont un rôle à jouer, peut-être pas nécessairement au gouvernement, mais au sein d'autres institutions, parce que l'effort doit consister maintenant à bâtir la nation, à la reconstruire", a-t-il dit. "Je dirai à la population de notre pays, à la population congolaise, aux citoyens de ce pays qu'ils doivent continuer à garder le calme en attendant la publication des résultats officiels par la CEI", a confié le président sortant à des journalistes étrangers. "GESTICULATIONS DE POLITICIENS" "Il y des institutions qui sont en place. En cas de dérapage, il y a la justice, bien sûr. Et il y a des forces de l'ordre qui sont là pour, n'est-ce-pas, protéger les citoyens, la population et leurs biens, protéger les institutions, protéger la CEI, protéger tout le monde", a-t-il dit. Quelques heures plus tard, il s'est adressé à la télévision nationale après proclamation du résultat provisoire par Malu Malu: "Je vous demande, ce soir, de rester unis, de vivre dans la fraternité et la tolérance, parce que la victoire d'aujourd'hui, c'est la vôtre", a dit Kabila. Kinshasa, dont les populations pauvres soutiennent pour une bonne part Bemba, était calme, si ce n'est quelques petits groupes de partisans du rival de Kabila. Dans des villes de l'est du pays où Kabila est populaire, la nouvelle de sa victoire a poussé la population à descendre dans les rues fêter l'événement. "C'est une immense fête ici. Il y a des milliers de jeunes gens dans les rues. Ils dansent et chantent", a témoigné Sylvie Van Den Wildenberg, porte-parole de l'Onu à Bukavu. Le scrutin présidentiel, organisé dans le cadre du premier processus électoral libre en RDC depuis 40 ans, est censé parachever la stabilisation de ce pays ravagé par cinq années de guerre (1998-2003). Mardi, la coalition de Bemba avait rejeté des résultats provisoires publiés par la CEI. "Nous n'espérions rien d'autre", a commenté mercredi Fidel Babala, directeur de campagne de Bemba. "Nous avons envoyé une nouvelle lettre de protestation mais il semble que les résultats vont être publiés quoi qu'il arrive". Son adversaire a balayé mercredi ces critiques, déclarant aux journalistes étrangers: "Le reste, ce ne sont que des rumeurs, ce ne sont que des gesticulations de politiciens qui sont soit au courant qu'ils ont déjà perdu les élections, soit qui ne savent même pas ce qui se passe, qui n'ont même pas suivi le processus". Au lendemain de la publication, en août, des résultats du premier tour, partisans de Kabila et de Bemba s'étaient affrontés lors de batailles rangées à l'arme lourde qui avaient fait une trentaine de morts dans la capitale. En visite à Bruxelles, Mark Malloch Brown, secrétaire général adjoint des Nations unies, a mis en garde contre un retrait prématuré des troupes européennes déployées en renfort des 17.500 casques bleus de la Monuc (Mission des Nations unies en RDC) pour assurer la sécurité du scrutin. Jugeant la situation stable, l'Union européenne a fait savoir que le retrait du contingent d'un millier d'hommes baptisé Eufor débuterait comme prévu le 30 novembre.