Le gouvernement libanais a approuvé hier la création d'un tribunal international chargé de juger les assassins de l'ancien premier ministre Rafic Hariri AU NEZ et à la barbe des alliés de Damas qui crient à la violation de la constitution, le gouvernement libanais a officiellement approuvé hier le projet de création d'un tribunal spécial chargé de juger les assassins de l'ancien premier ministre Rafic Hariri. La majorité parlementaire dirigée par le fils de la victime, Saad Hariri, est persuadée d'une implication syrienne dans l'attentat du 14 février 2005 et des 14 autres qui ont suivi. « Il s'agit d'une réunion historique et d'un pas important sur la voie de la découverte de la vérité, pour que justice soit faite », a déclaré le premier ministre Fouad Siniora, à l'issue d'une séance extraordinaire du Conseil des ministres consacrée à l'examen du texte onusien. Celui-ci doit encore être soumis au Conseil de sécurité des Nations unies puis être ratifié par le Parlement libanais avant d'entrer en vigueur. La réunion a eu lieu malgré la démission, samedi, des cinq ministres chiites du gouvernement - relevant des partis Hezbollah et Amal - suivie de celle du ministre de l'Environnement, Yaacoub Sarraf, un proche du président de la République, Émile Lahoud, dont le mandat a été prorogé sur ordre de la Syrie, en septembre 2004. Le chef de l'État estime que la décision du Conseil des ministres, qu'il a refusé de présider, est entachée d'irrégularités, car le gouvernement est inconstitutionnel depuis que sa composition ne respecte plus l'obligation de représentativité communautaire inscrite dans la charte fondamentale du pays. Il s'appuie aussi sur un article de la constitution pour faire prévaloir son droit à la négociation et à la ratification des traités dont il estime avoir été floué. L'opposant Michel Aoun a abondé dans son sens en jugeant « nulle et sans valeur », la décision du Conseil des ministres sur le tribunal international. Main tendue au Hezbollah Des arguments réfutés par la majorité selon qui la séance d'hier était « constitutionnelle à 100 % ». Le ministre de l'Éducation, Khaled Kabbani, un magistrat du Conseil d'État, a effectué un long exposé en ce sens devant les journalistes. Malgré la démission des ministres - qui n'est pas effective faute d'avoir été acceptée par Fouad Siniora - le gouvernement reste en place, tant que le quorum des deux tiers est réuni en Conseil des ministres, a-t-il souligné. Même si elle est juridiquement défendable, la position du gouvernement est de plus en plus affaiblie politiquement, à l'heure où ce dernier est appelé à prendre des décisions consensuelles pour l'avenir du pays, pour le sortir de la crise économique et financière. Malgré son passage en force sur la question du tribunal, la majorité a donc déclaré vouloir tendre la main au Hezbollah en l'invitant à renouer le dialogue. « Il n'est pas exclu qu'elle accorde au Hezbollah et à ses alliés la minorité de blocage du tiers des portefeuilles ministériels que celui-ci réclame, le danger d'une entrave au tribunal international étant écarté », estime Négib Aoun, rédacteur en chef du quotidien L'Orient-Le Jour. Ali Hamadé, animateur d'une émission politique sur la Future TV, estime pour sa part improbable un tel « scénario rose ». « La majorité ne va pas accepter de donner au Hezbollah les moyens de décapiter le gouvernement à tout moment », dit-il. « Le scénario le plus optimiste serait que le Hezbollah, qui est le seul à détenir vraiment les cartes chiites, estime avoir suffisamment renvoyé l'ascenseur à Damas et refuse d'aller plus loin dans la confrontation. » À court terme, l'option d'un durcissement du conflit est toutefois la plus probable, estimaient hier la plupart des observateurs. Le Hezbollah a d'ores et déjà averti qu'il envisageait d'organiser des manifestations massives et des grèves pour faire chuter le gouvernement.