La polémique de la viande halal n'est pas prête de désenfler. Un rapport confidentiel du ministère français de l'Agriculture est tombé entre les mains des journalistes du Point et révèle que 40% de la viande bovine et 60% de la viande ovine seraient abattues de manière halal ou casher dans les abattoirs français. Une association de certification de viande halal dénonce une instruction à charge contre l'abattage rituel. C'est un rapport qui va raviver encore plus la polémique sur la viande halal créée il y a trois semaines en France. Le magazine Le Point a réussi à se procurer un rapport confidentiel intitulé «La protection animale en abattoir : la question particulière de l'abattage rituel» et en a publié des extraits hier soir sur son site internet. Datant de novembre dernier, ce document a été rédigé par des experts du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux, un Conseil dépendant du ministère français de l'Agriculture. Le rapport affirme que 40% de la viande bovine et 60% de la viande ovine sont abattues de manière halal ou casher en France, «alors que la demande en viande halal ou casher devrait correspondre à environ 10% des abattages totaux, précise le document. Une phrase qui fait réagir Fethallah Otmani, General Manager d'AVS, une association de certification de la viande halal, qui a lu les extraits du rapport. «Une étude qui part du conditionnel pour comparer des chiffres, ne laisse pas présager de résultat très sérieux», lance-t-il. «On compare les chiffres de consommation avec la production. Or en France, le marché de l'ovin est dérisoire et il ne permettra même pas de répondre à la demande seulement en halal et casher. La France importe plus de 60% d'ovins chaque année. Il faudrait donc intégrer les chiffres d'importations pour comparer sérieusement. Mais les raccourcis indignes sont coutume en période électorale», ajoute-t-il. Couteaux mal aiguisés Par ailleurs, les experts du rapport ont voulu savoir dans quelles conditions sont abattus les animaux et évaluer la souffrance subie par les animaux lors de l'égorgement. Bien que le rapport comporte au total 54 pages, le Point a choisi de publier 5 pages seulement, des pages insistant et donnant des détails crus sur la souffrance subie par les animaux entre l'acte de l'abattage, un abattage avec et sans étourdissement jusqu'à la mort de la bête. «En cas d'abattage rituel, pour ne pas casser la cadence d'abattage, les opérateurs n'attendent pas l'inconscience effective de l'animal pour ouvrir la casting-pen [cage de contention] et l'animal encore conscient est laissé au sol en train de perdre son sang avec des mouvements de pédalage témoins de douleur et d'un état de conscience», explique le rapport évoquant que cette manière d'abattage permet de ne pas "casser la cadence d'abattage", et ainsi faire gagner du temps à la chaîne de l'abattoir. Le rapport parle également de «couteau mal aiguisé» pour abattre l'animal. Selon Fethallah Otmani, cette longue description sur l'abattage rituel est «une instruction à charge contre l'abattage rituel. «Tous les rapports scientifiques dignes de ce nom, qui étudient la situation en abattoir sans se focaliser sur l'abattage rituel, constatent que l'assommage est généralement cause de douleur, fréquemment mal pratiqué et certains procédés souvent remis en cause» ajoute-t-il. L'on rappelle qu'Yves-Marie Le Bourdonnec, l'un des bouchers les plus renommés de France affirmait dans son livre «L'Effet bœuf», que l'abattage par égorgement permettait à l'animal de ne pas souffrir et de mourir plus vite.