Vendredi dernier, 26 mars, nous avons publié un article sur l'obligation formulée par la préfecture de Belfort envers la famille Mechroubi de quitter le territoire français (OQTF). M.Mechroubi avait accepté un emploi dans un autre secteur que celui qui était inscrit sur son titre de séjour. Le lundi 29 mars, la préfecture nous a envoyé des éléments d'explication sur son évaluation de la situation. Comme nous l'indique le bureau des nationalités de la préfecture de Belfort, la régularisation de M. Mechroubi par le travail lui a été accordée en avril 2008 «au vu d'un contrat de travail pour un emploi d'ouvrier en bâtiment. Elle ne l'autorisait qu'à exercer cette seule profession et il ne pouvait pas l'ignorer, puisque cela était mentionné sur la carte de séjour.» Par conséquent, l'OQTF serait justifiée. D'ailleurs, le 21 janvier 2010, le tribunal administratif de Besançon a rejeté le recours en annulation de la famille Mechroubi et aurait donc «confirmé que la Préfecture [de Belfort] a fait une exacte application de la loi.» La préfecture est donc dans son droit ; elle peut faire reconduire la famille hors du territoire français. Mais en 2008, une décision contraire, celle de régulariser M.Mechroubi, était également «de droit». La famille Mechroubi n'avait alors pas de titre de séjour valable et le préfet de police de Paris avait «toutefois» pu décider de procéder à la régularisation par le travail de la situation de M. Mechroubi. Aujourd'hui, le reproche principal fait à M. Mechroubi est qu'avant de changer de métier, il n'aurait pas fait de démarches pour modifier son titre de séjour. Au vu de la préfecture, «il a ainsi méconnu les limitations dont était assorti ce titre déjà délivré pour régulariser sa situation.» En d'autres termes, en 2008, le fait d'avoir un contrat de travail dans le secteur du bâtiment a engendré la régularisation de la famille. Aujourd'hui, elle risque d'être reconduite aux frontières parce-que M.Mechroubi a fait une faute d'appréciation. Il a sous-estimé le besoin de contrôle de la préfecture sur le destin des immigrés en France. Le droit en matière d'immigration laisse un pouvoir discrétionnaire important aux préfets. Cela pose problème, surtout en considérant les différences de jugement qu'il peut y avoir entre différentes préfectures. Un de nos lecteurs a commenté à ce sujet : «Non mais faut pas penser non plus que ceux qui bossent dans les Préfectures sont des lumières. Certains ne connaissent pas même la France, alors un problème d'interprétation du texte, relève de la performance. Certains Français devraient s'expatrier pour avoir une expérience ailleurs que dans leurs pantoufles!!» Il est vrai que si certains des responsables des dossiers de régularisation faisaient l'expérience de procédures semblables les concernant, des décisions comme celle envers la famille Mechroubi se feraient plus rares. Mais le problème de fond reste celui d'une situation juridique en France qui donne à quelques agents de l'Etat, le droit en matière d'immigration, de décider à leur guise du destin de familles entières.