Le Maroc accordera-t-il un cadeau au prochain gouvernement de coalition de gauche en Espagne ? Le projet d'achat de deux patrouilleurs pourrait préserver des centaines d'emploi chez l'entreprise publique Navantia. La France, laissera-t-elle son voisin ibérique la concurrencer sur un marché qu'elle considère le sien ? Il est encore trop tôt pour parler de l'acquisition par la marine royale de deux patrouilleurs espagnols. En effet, «des sources officielles» au sein de l'entreprise publique Navantia affirment qu'il s'agit pour l'instant d'une «offre» soumise à l'approbation de la partie marocaine, rapporte le média ibérique La Voz de Galicia. Bien qu'elles la considèrent comme une «opportunité commerciale intéressante», elles se montrent prudentes quant à l'issue des futures négociations : «Pour l'instant, il n'y a aucun délai pour la conclusion d'un éventuel accord commercial». Des «offres» comme celle de la société espagnole, le Maroc en reçoit beaucoup. Les Russes sont passés maîtres en la matière. Après la visite du Premier ministre Dimitri Medvedev, effectuée en octobre 2018, la presse moscovite avait annoncé que Rabat pourrait acheter des batteries de missiles du système S-400 et le sous-marin Amur 1650. Sans oublier que le vice-ministre russe de l'Industrie et du commerce, Viktor Evtukhov avait révélé en avril 2016 que le Maroc pourrait acquérir 20 avions Sukhoï SSJ-100 via la Royal air Maroc (RAM), ainsi que des avions Irkut MC-21. Finalement, les démarches concrètes dans ce sens n'ont jamais vu le jour. Et pour cause, les contrats d'armement obéissent à d'autres considérations. Le Maroc sauvera-t-il des centaines d'emplois à Navantia ? Si le processus de négociations entre les deux parties pour la vente de deux patrouilleurs à la marine royale s'avére concluant, le Maroc offrirait un cadeau au gouvernement espagnol. Les nouvelles en provenance de Navantia font état d'un carnet de commandes moins fourni. Des centaines d'emplois sont menacés, notamment dans les usines de San Fernando à Cadiz (Andalousie) et Ferrol à la Corogne (Galicie). Deux sites qui se disputent traditionnellement la réalisation de commandes, comme en témoigne la déception des galiciens de leur mise à l'écart de la construction, en 2018, de cinq frégates pour le compte de l'Arabie saoudite, revenue aux Andalous. De leurs côtés, les syndicats tirent la sonnette d'alarme sur le manque de nouveaux contrats. Un éventuel accord avec le Maroc serait le bienvenu, en attendant le lancement de la fabrication de cinq frégates de type F-100 pour la marine espagnole. Pour le Maroc, il tomberait en outre à un moment politique opportun, alors qu'un gouvernement de coalition de gauche se prépare à prendre le pouvoir, pour la première fois dans l'histoire de la démocratie en Espagne. Une manière pour Rabat de prendre une police d'assurance contre Podemos, à condition que la France, habituée à bénéficier de la construction des navires pour le compte du Maroc, ne chamboule cette configuration. D'ailleurs, le président français Emmanuel Macron est attendu en février prochain au Maroc. Pour rappel, c'est dans le cadre de la visite d'Etat de Nicolas Sarkozy au royaume, effectuée en octobre 2007, que les deux pays avaient conclu le contrat de construction de la frégate multi-mission Mohammed VI, livrée à la marine royale en 2014. Article modifié le 2020/01/01 à 22h31