Il y a près d'un demi-milliard d'années, les animaux ont eu des «comportements collectifs voire sociaux indispensables à leur survie». C'est l'hypothèse émise par des chercheurs à partir de fossiles découverts dans la formation de Fezouata (région de Zagora) au Maroc. Le Maroc aurait permis de découvrir le plus ancien «lien social», vieux de près d'un demi-milliard d'années. Une étude parue jeudi dans la revue Scientific Reports rapporte ainsi cette découverte, faite dans la formation de Fezouata (région de Zagora), qui évoque le «plus ancien comportement collectif jamais observé» chez des trilobites, des animaux anciens. Le fossile de trilobites, découvert par une équipe internationale, composée notamment de chercheurs marocains, daterait de 480 millions d'années. «Ce sont des arthropodes qui ont existé pendant la première période de l'histoire de la vie, le paléozoïque», explique Muriel Vidal, enseignante-chercheuse au CNRS à l'université de Bretagne, citée par RFI. Bien que de nombreux fossiles de ces animaux aient été découverts, ceux dénichés dans le massif des Fezouata restent particulièrement intéressants, car ils présentent plusieurs spécimens, «presque emboîtés les uns à la suite des autres, parfaitement alignés». Ces trilobites sont «tous orientés vers une même direction, forment des files régulières et maintiennent entre eux des contacts étroits via leurs très longs processus épineux», explique un communiqué de l'Université Cadi Ayyad (UCA) de Marrakech. Ces chercheurs ont contribué au sein d'une équipe internationale à «montrer que les animaux ont acquis (…) d'étonnants comportements collectifs, voire sociaux, indispensables à leur survie». Représentation des trilobites à partir des fossiles découverts au Maroc. / Ph. Scientific Reports Un «comportement similaire de migration» à cause d'un stress environnemental ? «Compte tenu de l'ampleur des modèles observés, cette linéarité cohérente et cette directionnalité ne sont probablement pas le résultat d'un transport passif ou de l'accumulation par les courants», déclarent les chercheurs, rapportés par Associated Press. Le co-auteur de l'étude, Jean Vannier, de l'Université de Lyon, estime que «les raisons possibles de ce comportement de groupe incluent les stress environnementaux ou la reproduction». En effet, l'étude évoque justement les conditions de fossilisation de cette colonie de trilobites. Ces animaux marins auraient ainsi été fossilisés lors d'un «comportement similaire de migration». Une hypothèse confirmée par l'analyse du terrain autour, dont la disposition permet de déduire que ces animaux se trouvaient au niveau de «la limite d'action des vagues de tempête sur le fond», indique Muriel Vidal. Car, selon la période de l'année et en fonction de la profondeur de l'eau, ces trilobites pouvaient être affectés par les vagues provoquées par les vents forts à la surface. «Cela donne du sens à une hypothèse de migration en rapport avec les périodes de tempêtes», estime l'enseignante-chercheuse. L'étude va plus loin, en donnant une hypothèse sur la période durant laquelle vivaient ces trilobites. «Il y a 480 millions d'années, au gré des mouvements tectoniques, le Maroc se trouvait près du Pôle Sud», précise RFI. Ainsi, cet exemple tiré de fossiles découverts au Maroc permet d'indiquer que «le comportement collectif a une origine très ancienne et s'est probablement développé au cours des deux grandes biodiversifications animales du Cambrien et de l'Ordovicien, en réponse à l'augmentation de pression sélective liée à la complexification des écosystèmes», souligne l'UCA dans son communiqué.