Condamnée depuis le 26 décembre 2018 à la dissolution, l'association Racines maintient ses activités, qui restent mises à mal lorsqu'elles sont prévues en dehors de ses locaux. Une question parlementaire a été adressée au ministre de l'Intérieur dans ce sens. Ce mercredi matin, le ministre de l'Intérieur, Abdelouafi Laftite, a été questionné sur le gel des activités de l'association Racines, condamnée à la dissolution le 26 décembre 2018. Député de la Fédération de la gauche démocratique (FGD), Omar Balafrej a en effet adressé une question écrite dans laquelle il interpelle le ministre sur «les conséquences de l'interdiction des activités de Racines par les autorités locales sans base juridique» et sur «les mesures à prendre dans le cadre légal». Ce courrier intervient quelques jours après la mise à mal d'une activité prévue samedi dernier aux Anciens abattoirs de Casablanca, en partenariat avec Théâtre Nomad. Elle a finalement été déplacée dans les locaux de l'association. Une source proche de Racines explique à Yabiladi que le co-directeur du Théâtre Nomad, Mohamed Hassouni, s'est vu signifier par la caïda d'Aïn Sebaâ-Hay Mohammadi qu'il ne pourrait accueillir la rencontre. Contacté par nos soins depuis la dernière visite de la caïda sur les lieux, Hassouni est resté injoignable. Cependant, son entourage explique qu'il aurait «subi un chantage de la part des autorités locales, lui rappelant que rien ne les obligerait à laisser Théâtre Nomad mener les activités aux Anciens abattoirs et qu'il devait ainsi se plier à certains arrangements». Racine continue ses activités dans ses locaux Directeur général de Racines, Mehdi Azdem explique à Yabiladi que cette situation laisse l'association entre le marteau et l'enclume. «Nous n'avons pas encore été notifiés du jugement comme la procédure le prévoit, afin que nous puissions accuser de sa réception, mais nous faisons appel malgré tout car nous ne pouvons pas rester dans une situation pareille», indique l'acteur associatif. «Nous avons encore de prochaines activités prévues, notamment dans d'autres régions, mais nous n'avons pas de visibilité sur les dates et la faisabilité», confie-t-il. De ce fait, Mehdi Azdem souligne que les rencontres prévues par Racines continueront de se tenir principalement dans ses locaux, en attendant d'abord une réponse du ministre de l'Intérieur à la question écrite d'Omar Balafrej. «Selon la constitution, le ministre est tenu de répondre dans les 30 prochains jours», explique le député en réitérant son soutien à l'association. «Le fait qu'elle interjette en appel signifie que la décision de dissolution n'est pas entrée en application. Or, il y a un gel anormal de ses activités et le but de ma question est de savoir pourquoi le ministère de l'Intérieur agit ainsi», affirme-t-il encore. «En tant qu'élu local, je soutiens une politique culturelle de proximité, qui ne vise pas les grands festivals mais qui rend accessible ces pratiques-là à tous les citoyens et dans les quartiers, et Racines le fait en levant le débat sur les politiques culturelles et l'importance de la culture au sein de la société.» Omar Balafrej, député FGD pour l'arrondissement Rabat Agdal – Hay Riad Dans un communiqué publié par Racines sur son site, celle-ci indique se pourvoir en appel et aller «jusqu'au bout de toutes les procédures juridiques possibles pour annuler ce jugement afin de continuer de militer pour la liberté d'expression, la citoyenneté, l'émancipation et la diversité culturelle au Maroc et en Afrique». Au lendemain de la restriction de l'activité des Anciens abattoirs, l'ONG internationale Freemuse pour la défense de la liberté artistique a réagi en indiquant continuer à suivre l'affaire de près. «Bien que sévèrement entravée par cette procédure, Racines est toujours capable de fonctionner», ajoute-t-elle. Le 26 décembre 2018, le tribunal de première instance de Casablanca a condamné Racines à la dissolution pour avoir hébergé dans ses locaux le tournage de la web-émission «1 dîner, 2 cons». Il la rend responsable de la tenue de cette activité, selon lui «contraire aux statuts de l'association». Un motif contesté par Racines, qui souligne que la défense de la liberté d'expression fait partie de ses objectifs énoncés expressément dans ses statuts.