En prononçant une lourde peine à l'encontre de Nasser Zefzafi, la justice marocaine le rapproche davantage de remporter le Prix Sakharov pour la liberté de l'esprit, décerné annuellement par le Parlement européen. Nasser Zefzafi, chef de file du Hirak du Rif, est condamné à 20 ans de prison ferme. Une sentence basée uniquement sur des «délits requalifiés» par la cour. Ce «pouvoir discrétionnaire» du juge soulève des interrogations. En effet, aucune preuve attestant de la participation des accusés dans de projets d'«atteinte à la sécurité intérieur de l'Etat» n'a été fournie. Pour rappel, dans son réquisitoire, le procureur général avait accusé Zefzafi de recevoir «3 000 dirhams» de l'étranger. Une somme dérisoire qui ne pourrait même pas déstabiliser une république bananière. «La peine maximale pour les délits est de cinq années d'emprisonnement», explique un avocat à Yabiladi. «L'ensemble des détenus du Hirak auraient dû être présentés devant le tribunal de première instance et non devant la Chambre criminelle de première instance près la Cour d'appel. Cette juridiction est exclusivement chargée d'instruire les dossiers se rapportant aux «crimes» et non aux «délits», précise notre interlocuteur. La justice marocaine balise le terrain à Zefzafi pour le Prix Sakharaov La même source met en garde contre les conséquences politiques des peines prononcées à l'encontre de Nasser Zefzafi et de ses camarades. Au-delà des condamnations, des ONG internationales des droits de l'Homme et de certains partis en Europe, le verdict rapproche davantage le leader du Hirak de remporter «Prix Sakharov pour la liberté de l'esprit», décerné chaque année par le Parlement européen. Le nom du rifain a été en effet proposé, fin décembre dernier, par des eurodéputés néerlandais. Cette année, le lauréat (personne physique ou morale) bénéficiera certainement d'une médiatisation toute particulière, sachant que le prix fêtera ses trente années d'existence. En 2011, les responsables marocains avaient frappé à plusieurs portes pour que la Sahraouie Aminatou Haidar, présidente du Collectif des défenseurs sahraouis des droits de l'Homme (CODESA) alors sous les feux de la rampe, soit exclue de la liste totale des candidats au Prix Sakharov. Sept ans plus tard, le même scénario risque de se reproduire.