Tout en affirmant en commission qu'il n'existe «qu'un seul rapport» de la Mission parlementaire d'information sur les prix des carburants au Maroc, Abdellah Bouanou n'a pas mâché ses mots devant les journalistes venant l'interroger mardi. Il reconnaît toutefois que le rapport final de sa mission ne contient pas toutes les informations et expose les recommandations phares dudit document. Alors qu'il a botté en touche mardi, au cours de son intervention lors de la présentation du rapport de la Mission parlementaire d'information sur les prix des carburants, devant les membres de la Commission des Finances et du développement économique à la Chambre des représentants, Abdellah Bouanou, chef de la mission parlementaire, s'est lâché devant le micro des médias, dont le site d'information Al3omk. «Les prix ont flambé depuis la fin du processus de la décompensation et tout le monde l'a remarqué. La mission parlementaire d'information est donc partie faire son travail», débute-t-il sa déclaration, en rappelant avoir rencontré «plusieurs responsables» pour réunir «des milliers de documents». En 2015, les marges des pétroliers se sont multipliés par trois, affirme Bouanou «Ce rapport répond-t-il aux attentes du peuple marocain ?», s'interroge le député du PJD, avant de reconnaître que le texte a été expurgé. «Je pense que ce que nous voulons, en tant que chef de mission, n'est pas dans le rapport mais nous avons géré cette question dans le cadre d'un processus démocratique où nous ne pouvons pas faire ce que nous voulons, mais plutôt ce sur quoi nous nous sommes mis d'accord», explique-t-il. Une reconnaissance pourtant de l'existence de données qui ne figurent pas dans le rapport présenté mardi. Mais Abdellah Bouanou se rattrape, arguant que «ce rapport contient tellement d'informations qui nécessitent des analyses pour en tirer des conclusions». «Pour la décompensation de 2015, les entreprises sont venues demander au gouvernement de fixer les prix. Ce que l'exécutif a fait, tout en précisant les marges, les prix, les dépenses… la différence entre le prix fixé et celui de vente au public était alors d'un dirham. Quand on multiplie un dirham fois 6,5 millions de tonnes de consommation, cela fait 7 milliard de dirhams de marges en un an et ce n'est que la marge donnée par le gouvernement.» Abdellah Bouanou. Le chef de la mission parlementaire affirme ensuite que certaines entreprises, opérant au Maroc, n'avaient pas réalisé de gain à l'étranger alors que pour leurs activités dans le pays, «leurs marges se sont multipliées par trois, passant de 300 millions à 900 millions de dirhams pour certaines sociétés». «Donc, rien qu'entre 2015 et 2016, soit en un an, ces marges ont explosé», lance-t-il. «Le citoyen ne doit pas rester entre le marteau et l'enclume» Abdellah Bouanou annonce des marges qui dépassent les 10 milliards de dirhams au moment où les investissements de ces sociétés n'ont pas dépassé la barre des «2 milliards de dirhams». Pour lui, «les entreprises pétrolières au Maroc gagnent le double si on les compare aux autres entreprises opérant à l'étranger». Un gain qui se fait au détriment du pouvoir d'achat. «Nous ne voulons pas qu'elles perdent, au contraire. Mais elles doivent réaliser qu'il y a un peuple, une consommation, qui seront affectés et donc un impact sur le pouvoir d'achat. Et cela a été prouvé par les données du HCP en 2016.» Abdellah Bouanou. Le député du PJD dit aussi regretter l'absence de deux institutions, en l'occurrence la Samir et le Conseil de la concurrence, qui se présentaient en tant que «références» pour le secteur. Il passe ensuite à la situation du citoyen marocain, affirmant qu'à la fin du processus de décompensation, «l'Etat a gagné, les entreprises ont gagné, mais le citoyen a été massacré par la hausse des prix». «En tant que parlementaires, nous disons que les entreprises doivent prendre en compte le niveau de vie au Maroc et le pouvoir d'achat du Marocain, parce que la vente de carburant impacte tout le monde. Le citoyen ne doit pas rester entre le marteau et l'enclume», assure-t-il. Il appelle ensuite à une réaction des entreprises pétrolières opérant au Maroc, à «différencier entre ceux qui importent, ceux qui stockent et ceux qui distribuent, parce qu'il est inconcevable qu'une seule entreprise fasse tout et donc récolte toutes les marges» et à la mise en place du Conseil de la concurrence. «Les différentes parties de ce dossier doivent prendre leurs responsabilités pour baisser le prix des carburants», conclut-il.