Le premier juillet prochain, les Marocains sont appelés à se prononcer sur le projet de constitution dévoilé hier lors du discours du roi Mohammed VI. Un texte de 180 articles sectionnés en quatorze «titres». Cette nouvelle constitution, renforce les pouvoirs du «Chef du gouvernement» certes, mais, force est d'avouer que l'essentiel des pouvoirs reste entre les mains du «chef de l'Etat», le «Roi, Amir Al Mouminine». Le nouveau texte prévoit le droit de vote et d'éligibilité pour les Marocains résidant à l'étranger. La nouvelle constitution, si elle est approuvée par le peuple dans les jours à venir, fera du Maroc «une monarchie équilibrée» plus qu'une «monarchie parlementaire». L'essentiel des pouvoirs sont encore concentrés entre les mains du roi. Ce dernier reste «Amir Al Mouminine» et devrait continuer d'exercer «par dahirs les prérogatives religieuses» selon l'article 41 du nouveau projet de la Loi fondamentale. La personne du roi n'est plus sacré mais demeure «inviolable, et respect Lui est dû», prévient l'article 46 du titre III du nouveau texte qui consacre 19 articles à la «Royauté». Le Roi : l'armée, la diplomatie et le pouvoir de dissolution Le «chef de l'Etat» (article 42) est également chef suprême des Forces armées royales (article 53). C'est lui qui nomme aux «emplois militaires» bien qu'il «peut déléguer ce droit». L'article 54 de la nouvelle constitution prévoit la création d' «un Conseil Supérieur de Sécurité» présidé par le roi. Ce Conseil est une «instance de concertation sur les stratégies de sécurité intérieure et extérieure du pays, et de gestion des situations de crise». Il «veille également à l'institutionnalisation des normes d'une bonne gouvernance sécuritaire». En outre, le pouvoir d'accréditation des ambassadeurs figure parmi les prérogatives du souverain. En ce qui concerne le gouvernement, le roi nomme son «Chef» au «sein du parti politique arrivé en tête des élections des membres de la Chambre des Représentants» (article 47). C'est lui qui nomme également, sur proposition du Chef du gouvernement, les membres de l'équipe gouvernementale. Toutefois, le souverain peut prendre l'initiative de démettre un ou plusieurs membres de cet exécutif, après consultation du Chef du gouvernement. Le Conseil des ministres est présidé par le roi, et exceptionnellement par le Chef du gouvernement. Les deux chambres du Parlement peuvent quant à elles être dissoutes par le souverain (article 51). La présidence, (article 56) du «Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire», nouvel organe qui prend le relais du Conseil supérieur de la magistrature est également assurée par le roi, à qui revient le droit de proclamer «l'état d'exception», selon l'article 59. Premier ministre : Un «chef» qui nomme et qui dissout La nouvelle constitution renforce un peu plus les pouvoirs du premier ministre qui devient «Chef du gouvernement». Ce dernier partage les pouvoirs avec le roi, sur le contrôle de l'équipe gouvernementale. Il propose à la nomination mais doit solliciter le roi pour que celui-ci mette fin aux fonctions d'un membre de son équipe. Le principal acquis du premier ministre est sans nul doute le pouvoir de dissoudre la Chambre des représentants (article 104) et celui de nommer aux emplois civils dans les administrations publiques et aux hautes fonctions des établissements et entreprises publics (91). Seul le roi jouissait de toutes ces prérogatives jusque-là. Le «Chef du gouvernement» pourra également délibérer de la politique générale de l'Etat au sein du «Conseil du gouvernement», qu'il présidera chaque vendredi. Un Parlement à la merci du Roi et du «Chef du gouvernement» Le pouvoir législatif, auquel est consacré le titre IV du nouveau projet, voit ses domaines de compétences élargies. C'est du Parlement que relève désormais le pouvoir de légiférer sur «l'amnistie générale» (article 71) qui est jusqu'à présent du seul ressort du roi. Les allocutions du roi au Parlement ne pourront toujours pas faire l'objet d'aucun débat. La nouvelle constitution paraît affaiblir plus qu'elle ne renforce le Parlement face au roi et au «Chef du gouvernement»... Une justice «indépendante»… L'article 107 de la nouvelle constitution est sans équivoque : «Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif». Le roi est le «garant» de cette indépendance. La justice sera toujours rendue «au nom du Roi» ajoute le nouveau texte. Les voix des MRE La nouvelle constitution précise dès son préambule que le Maroc est un «Etat musulman» et l'Islam reste la religion d'Etat. L'unité du Royaume, «forgée par la convergence de ses composantes arabo-islamique, amazighe et saharo-hassanie, s'est nourrie et enrichie de ses affluents africain, andalou, hébraïque et méditerranéen». L'article 19 consacre l'égalité entre les sexes et l'article 28 garantit «la liberté de la presse» avant que le vote des étrangers aux élections locales ne soit prévu par l'article 30. Last but not least, la nouvelle Loi fondamentale fait un clin d'œil aux MRE. En plus de la constitutionnalisation du CCME (Conseil de la Communauté Marocaine à l'Etranger, article 163), l'article 17 précise que les «Marocains résidant à l'étranger jouissent des droits de pleine citoyenneté, y compris le droit d'être électeurs et éligibles. Ils peuvent se porter candidats aux élections au niveau des listes et des circonscriptions électorales locales, régionales et nationales.» Les critères spécifiques d'éligibilité et d'incompatibilité seront fixées par la loi, ainsi que les modalités de l'exercice du droit de vote et de candidature à partir des pays de résidence. Consultez le texte intégral du projet de constitution en cliquant ici.