Le Maroc, une monarchie citoyenne. Mohammed VI a présenté les grands axes de la réforme constitutionnelle aux Marocains, vendredi soir. Selon lui, dans l'élaboration, la forme et le contenu, la réforme apporte d'importantes nouveautés. Les citoyens se prononceront par voie référendaire le 1er juillet. Sans le limiter à la présentation du texte, le roi a également appelé à voter oui lors du référendum. Le discours était long et détaillé, sur un sujet technique : la réforme de la constitution marocaine. Mohammed VI a expliqué durant presque 30 minutes les grandes lignes des travaux menés par la Commission consultative pour la révision de la constitution depuis trois mois, et approuvés par le Conseil des ministres quelques heures avant le discours, dans l'après-midi du 17 juin. Depuis environ deux semaines, des rumeurs circulaient sur le contenu et la portée de ces réformes, et de manière insistante, l'on pouvait lire que les réformes allaient surprendre plus d'un par leur audace, qu'elles iraient plus loin que les propositions de certains partis. A entendre le discours, le bilan reste mitigé. Des avancées calculées, avec un flou qui persiste sur les mesures qui touchent les Marocains résidant à l'étranger. Séparation des pouvoirs et un grand catalogue de droits humains Les 10 axes présentés comprennent toutefois quelques nouveautés, avec, en premier lieu, le renforcement, annoncé dès le 9 mars, du rôle du gouvernement et du Premier ministre. Issu de la majorité, il sera dorénavant «Chef du gouvernement» et aura notamment le pouvoir de dissoudre le parlement, ce que le roi, quant à lui, ne pourra faire que avec l'accord du Chef du gouvernement. L'article 19 de la constitution réformée détaille la séparation des pouvoirs. Un signe symbolique, car dans l'actuelle constitution, l'article 19 est l'un des articles les plus contestés par les manifestants et porte sur la sacralité du roi. Le roi, quant à lui, garde le statut d'Amir Al Mouminine, assurant la «protection de la foi et des fidèles, et le libre exercice des cultes», dans le cadre d'un «Etat musulman». Sa personne jouira de «l'inviolabilité» et il reste Chef Suprême de l'armée. Plus important peut-être, la consécration de toute une série de nouveaux droits dans la constitution. Premièrement, l'égalité homme-femme sur tous les domaines, économique, social, culturel, environnementaux... Peut-on s'attendre, par exemple, à une réforme de l'héritage, caractérisé aujourd'hui par une inégalité envers les femmes qui touchent moins ? La consécration constitutionnelle de «tous les droits de l'Homme» s'inscrit dans la même logique, et le roi a spécifié que toutes les conventions internationales ratifiées par le Maroc auront un statut constitutionnel. Sur cet aspect, le roi ne précisait cependant pas si la constitution allait reconnaître la primauté du droit international sur le droit national. A voir dans le texte... L'amazigh serait, selon ces réformes, reconnu comme langue officielle, dans un soucis de «réhabilitation de l'Amazigh, comme patrimoine commun à tous les Marocains». Les difficultés liées à l'instauration d'une nouvelle langue officielle sont cependant pris en compte : l'officialisation sera un «processus graduel, au moyen d'une loi organique, qui en définira les modalités d'intégration dans l'Enseignement et aux secteurs prioritaires dans la vie publique». Patience pour la mise en pratique des droits des Marocains résidant à l'étranger ? Sur les «concitoyens à l'étranger», Mohammed VI est resté vague. «Ils disposeront d'une représentation parlementaire dès que la formule démocratique y afférente aura muri, étant entendu qu'ils jouissent du droit de voter et de se porter candidat dans les deux Chambres du parlement», a-t-il expliqué. Quand est-ce que le temps sera consdiéré «mûr», et par qui ? Est-ce que, par ailleurs, le droit de vote sera mis en pratique en rendant possible le vote dans les ambassades et les consulats du Maroc à l'étranger ? Autre mesure, difficile à déchiffrer : Le Conseil de la communauté marocaine à l'étranger (CCME) devrait, selon le projet de réformes, gagner sa place dans la constitution. Le CCME ayant été concu pour être une institution transitoire, pourquoi lui donner un statut constitutionnel et ainsi permanent ? Ses compétences et fonctions seront-elles redéfinies ? Un roi arbitre ou partisan ? Pour finir son discours, Mohammed VI a vanté les mérites du travail effectué sur la constitution. Celui qui est défini comme «Arbitre Suprême», prend position pour la constitution, et la rend publique. S'adressant au peuple, il a affirmé que «ton Premier Serviteur remplira son devoir national en votant OUI pour le projet de nouvelle Constitution, soumis au référendum populaire.» Un référendum qu'il a fixé à la date du 1er juillet. A J-14 de cette échéance importante, le roi lui-même à lancé la campagne pour le Oui.