Le roi Mohammed VI a accordé samedi sa grâce à 415 personnes condamnées par les différents tribunaux du royaume, dont 13 détenus salafistes. L'initiative, un pas «positif» selon Abderrahim Ghazali, porte-parole de la Coordination mixte pour la défense des détenus islamistes, est «à saluer», même si le nombre reste «très timide». A l'occasion du 64e anniversaire de la Révolution du roi et du peuple, le roi Mohammed VI a accordé sa grâce à 415 personnes condamnées par les différents tribunaux du royaume, a annoncé samedi le ministère de la Justice dans un communiqué. Différents types de grâce ont été accordés, notamment au profit de certains détenus condamnés dans des affaires de terrorisme. Le souverain «a bien voulu, dans une initiative royale noble, accorder également sa grâce sur le reliquat de la peine d'emprisonnement ou de réclusion au profit de treize (13) détenus, condamnés dans des affaires de terrorisme et ayant participé au programme 'Mossalaha' (réconciliation), et la commutation de la peine de mort en peine limitée à 30 ans au profit d'un détenu», lit-on dans le communiqué du ministère de Mohamed Aujjar. La grâce royale accordée à ces détenus intervient «après avoir fait part officiellement de leur attachement aux constantes de la Nation, ses valeurs sacrées et ses institutions nationales, revu leurs positions et leurs pensées, exprimé leur rejet d'extrémisme et de terrorisme et affirmé qu'ils se sont remis sur le droit chemin, tout en faisant preuve de bonne conduite durant la période de leur incarcération», conclut le communiqué. Le programme «Mossalaha» n'existe pas, selon Abderrahim Ghazali Commentant la libération de ces 13 détenus salafistes, Abderrahim Ghazali déclare que la grâce royale a touché «des détenus normaux alors que les figures de proue en ont été écartées». Le porte-parole de la Coordination mixte pour la défense des détenus islamistes assure aussi que le programme «Mossalaha» évoqué dans le communiqué du ministère de la Justice, n'existe pas. «En réalité, ce programme 'Mossalaha' n'existe pas et n'a jamais été annoncé par l'Etat, ni officiellement ni officieusement. Aucune des institutions de l'Etat, y compris le Conseil national des droits de l'homme, le ministère de la Justice ou la Délégation générale de l'administration pénitentiaire et de la réinsertion (DGAPR), n'a communiqué sur ce programme auparavant.» Abderrahim Ghazali évoque toutefois des universités d'été et d'automne en plus de rencontres organisées par la DGAPR tous les six mois. «Ces rencontres regroupent des détenus en général, dont ceux condamnés dans des affaires de droit civil, certains détenus islamistes et des détenues. Elles ont été organisées en été à la prison Salé 2 et à la prison de Lâarjate une fois en automne», poursuit notre interlocuteur. Celui-ci de préciser que des personnalités du CNDH, de la DGAPR et de la Rabita Mohammadia des oulémas ont pris part à ces conférences. «A ma connaissance, il n'y a pas eu de dialogue ou d'initiative. La DGAPR avait elle-même démenti tout dialogue avec les détenus», explique-t-il. 13 détenus graciés, un chiffre «très timide» Revenant sur la grâce royale, Abderrahim Ghazali salue le geste émanant des plus hautes sphères de l'Etat. «Nous ne pouvons que saluer ce pas positif en tant que Coordination mixte pour la défense des détenus islamistes, en faveur duquel nous avons longtemps appelé», dit-il. Compte tenu du nombre de détenus islamistes dans les prisons marocaines, ce nombre reste toutefois «très timide», ajoute-t-il. «Nous appelons donc l'Etat à entamer des mesures plus audacieuses pour la résolution de ce dossier, qui a plus de 14 ans», affirme-t-il. L'occasion pour lui de citer un autre chiffre : selon Ghazali, près de 1 000 détenus salafistes sont incarcérés dans les prisons du royaume. «Les arrestations ont commencé en 2002, bien avant les événements de Casablanca (de mai 2003, ndlr)», fait-il savoir, évoquant le nom du Cheikh Abou Mouad Noureddine Nfiâa, condamné à 22 ans de prison ferme, qui serait l'une des dernières figures de proue du salafisme. «Il n'a jamais bénéficié de grâce ou de réduction de peine et se trouve actuellement dans la prison d'Oukacha après son arrestation et son extradition depuis la Mauritanie», relève Ghazali. «Les arrestations sont allées crescendo avec l'arrestation de 7 000 personnes puis l'inculpation de 3 000 salafistes», rappelle-t-il. «Ces arrestations se poursuivent puisqu'on entend parler à chaque fois de démantèlement de cellules terroristes», conclut-il.