Le Maroc était jusque-là épargné par la vague des contestations en cours dans le monde arabe. Une exception à laquelle les manifestations du 20 février sont venues mettre fin. Mais aux différentes marches, ont succédé des scènes de casses et de pillages dans pas moins de sept villes. D'autres manifestations sont pourtant prévues, d'où l'intérêt de s'interroger sur comment les violences peuvent être évitées, et par qui. On parlait d'une «exception marocaine» lorsque le Royaume était encore épargné, alors que la rue arabe grondait. Le déroulement sans heurts des marches du 20 février est venu consolider cette conviction. Mais les «actes de vandalisme» ayant suivi les manifestations «pacifiques» et les échauffourées du lundi à Rabat, Fès et dans d'autres villes laissent planer le spectre de tensions. Une issue inquiétante pour laquelle les jeunes du mouvement du 20 février refusent déjà de porter la responsabilité. Car selon eux, «l'encadrement, ce n'est pas (leur) responsabilité, c'est plutôt l'Etat qui doit encadrer les casseurs» avance Montassir Sakhi, membre du mouvement. Malgré cela, le mouvement met en place des comités de vigilance dans les villes où il y aurait un risque de violences, spécifie-t-il, citant l'exemple de Zagora. Cependant, ce militant actif de la jeunesse ittihadi ajoute que les jeunes du 20 février ne suspendront «jamais le mouvement, même en cas d'émeutes» semblables à ce qui se passe ailleurs. Quelle cohabitation ? Lors de sa conférence de presse du lundi dernier, le ministre de l'intérieur Taieb Cherqaoui avait pour sa part assuré que les pouvoirs publics veilleront à «garantir le climat de liberté d'expression». Non sans prévenir qu'ils feront également face «avec la force de la loi, à tout ce qui est susceptible de porter atteinte à l'ordre public, à la sécurité des citoyens ou à leurs biens». Comment sera donc cette cohabitation entre autorités et protestataires ? C'est là qu'une «exception marocaine» s'impose à nouveau. Déjà le lundi soir et hier après-midi devant la représentation libyenne à Rabat, la police a rappelé qu'elle pouvait changer d'attitude à tout moment. Les autorités ne semblent pas vouloir tolérer la tenue de sit-in quotidiens, alors que de l'autre côté, on compte sur ces genres de manifestations pour garder allumée la flamme des revendications. Un mouvement hétérogène Des revendications formulées par des entités «idéologiques hétérogènes» composant le mouvement du 20 février. Un mouvement (et non une organisation) dans lequel se côtoient gauchistes, militants d'Al Adl Wal Ihssane, du PJD, et d'associations de droits de l'Homme ainsi que des syndicalistes. Tous disent exiger des «réformes démocratiques» et appellent les dirigeants à mettre fin à «l'humiliation et aux calamités sociales et politiques». Le gouvernement doit avoir plus de pouvoir face aux «institutions» qui lui font ombre aujourd'hui. «Le parti de l'administration» figure également dans leur ligne de mire.