La DILCRA vient de rendre son bilan provisoire de l'islamophobie en France en 2015. Les statistiques révèlent que les actes antimusulmans ont été multipliés par 3 par rapport aux chiffres de 2014. Mais au delà des chiffres à compléter, 2015 reste une année noire pour les musulmans qui ont été la cible d'actes de stigmatisation parfois extrêmes que la DILCRA se propose de combattre. Après les chiffres du CFCM révélant une montée des actes islamophobes depuis les attentats de Charlie Hebdo, c'est au tour de la DILCRA de confirmer la montée en flèche des actes antimusulmans. Le bilan établi par la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme et l'antisémitisme (DILCRA) est à la fois provisoire et historiquement alarmant. Selon les chiffres de la délégation repris par Le Parisien, plus de 400 actes antimusulmans ont été officiellement recensés en France en 2015. Les chiffres du racisme antimusulman en 2015 sont en hausse de 200 % par rapport à 2014 où 133 actes antimusulmans ont été répertoriés par le même organisme. Pour Gilles Clavreul, le président de la DILCRA,«c'est une hausse spectaculaire et très inquiétante, qui s'explique essentiellement par la flambée des actes qui ont suivi les attentats de janvier». La fin de l'année a été marquée par les actes de la milice islamophobe d'Ajaccio en Corse. Cette milice de 250 à 300 personnes a mené une expédition punitive dans le quartier des Jardins de l'Empereur, en marge d'une manifestation pour «venger» l'agression de deux pompiers et d'un policier la nuit du réveillon de Noël. Les actes de cette milice ont conduit au saccage d'un resto Kebab et d'une mosquée où des exemplaires du Coran ont été partiellement brûlés. Mais ce n'est que la face visible d'une libération de la parole raciste visant la communauté musulmane de France. 2015, année noire pour les musulmans Le point de départ de cette hausse des actes antimusulmans ont été les attentats de Charlie Hebdo, suivis 11 mois plus tard des attaques meurtrières de Paris le 13 novembre dernier. Mosquées tagguées ou vandalisées, femmes voilées agressées, têtes ou abats de porc accrochés sur les portes des édifices religieux musulmans, injures racistes dans les transports publics, amalgames... Sur les réseaux sociaux, les musulmans sont la cible de campagnes de cyberhaine et la parole raciste antimusulmane fleurit sur internet. 2015 marque une montée en flèche de la stigmatisation de la plus importante communauté musulmane d'Europe. Il s'y ajoute un sentiment d'impuissance et d'inefficacité de la loi qui poussent les victimes musulmanes à passer sous silence les actes subis. «Les groupuscules identitaires s'en sont pris à des femmes parce qu'elles étaient voilées. Certaines ont vu leur foulard arraché, une autre a même été violemment frappée. L'inquiétude est très vive dans la communauté religieuse. Et encore, 15 % environ des gens ne portent pas plainte, parce qu'ils ont intégré l'idée que cela ne servait à rien», fustige le président de l'Observatoire contre l'islamophobie, Abdallah Zekri. Même si 1 000 mosquées sur les 2 500 mosquées de France sont aujourd'hui placées sous la protection des services de l'Etat et qu'«une unité de lutte contre la haine sur Internet est en place depuis cet automne», le racisme antimusulman est «insuffisamment réprimé. Mais cela va changer, nous allons mener un combat sans relâche», concède le président du DILCRA. Pour lui, «la société française, dans son ensemble, a su réagir avec solidarité. Elle n'est pas tombée dans le piège où les extrémistes de tous bords veulent l'entraîner». Ne reste plus qu'à espérer qu'avec la nouvelle année qui se profile, les 100 millions d'euros sur 3 ans du budget de la DILCRA permettront, enfin, de lutter efficacement contre l'islamophobie.