Les actes antimusulmans et antisémites ont augmenté en France au premier semestre 2012. C'est ce qui ressort du symposium européen des leaders juifs et musulmans qui s'est tenu à Paris, mardi dernier. Face à ce racisme, les leaders des deux communautés ont voulu faire front commun. Mais c'était sans compter, hélas, sur le poids des querelles ancestrales. Les explications. A l'occasion d'un dialogue judéo-musulman qui s'est tenu mardi 4 septembre au soir à Paris, les leaders des communautés juives et musulmanes de France ont fait savoir que les actes islamophobes et antisémites ont connu une hausse notable au premier semestre 2012, rapporte le Monde. «En 2010, nous avons enregistré 116 actes et menaces antimusulmans ; en 2011, 155 (...). En 2012, pour le premier semestre, nous en sommes à 79 actes, soit une augmentation de 14,49 %», a ainsi détaillé Abdallah Zekri, président de l'Observatoire contre l'islamophobie, en ouverture d'un symposium européen de leaders musulmans et juifs à Paris. Ces chiffres sont assurément «en dessous de la réalité», a-t-il ajouté, car ils ne correspondent qu'aux plaintes et mains courantes déposées dans les commissariats et les gendarmeries de France. Une désinhibition «de la parole raciste» Pour expliquer cette hausse, M. Zekri a invoqué une désinhibition de «la parole raciste». La période allant de février à mai a en effet été marquée par une campagne présidentielle qui a voulu faire ses choux gras en cassant du sucre sur le dos de l'idéologie musulmane. Après qu'elle se soit elle-même cassée les dents sur les urnes, les actes antimusulmans ont d'ailleurs diminué de façon notoire. Toujours est-il qu'entretemps, les débats sur le port du voile intégral, la viande halal ou l'identité nationale ont contribué à une «libération de la parole raciste», a estimé M. Zekri. «Tous ces débats sous prétexte de libérer la parole se sont transformés en un vaste exutoire islamophobe», a-t-il déploré. Même son de cloche du côté de la communauté juive où l'on a souligné «une nette recrudescence» des actes antisémites sur le premier semestre 2012. Selon le président du consistoire central, M. Joël Mergui, ces actes se seraient intensifiés depuis l'exécution sommaire par Mohammed Merah de trois enfants et d'un père juifs devant une école juive à Toulouse en mars dernier. «On aurait pu penser que cela créerait un frein, mais au contraire, ça a libéré un certain nombre d'esprits fragiles», a-t-il déclaré. Pour preuve, les actes d'intimidations ou de violence à l'encontre des juifs ont augmenté de 37% par rapport 2011, en passant de 226 à 310 actes répertoriés, selon le service de protection de la communauté juive. Qu'elle est belle la solidarité ! Face à ce racisme, les responsables des deux communautés ont pendant un certain temps souhaité faire front commun. Mais c'était sans compter, hélas, sur le poids des querelles ancestrales. Des divergences n'ont en effet pas tardé à voir le jour à l'issue de la rencontre de mardi. «Beaucoup de musulmans entretiennent la haine du juif» a ainsi lancé Michel Serfati, président de l'amitié – s'il-vous-plaît – judéo-musulmane de France (cité par le Monde). «Je mets au défi les responsables musulmans de dénoncer» cet antisémitisme, a renchéri le rabbin new-yorkais Marc Schneier, cité par la même source. «Il ne faut pas se tromper d'ennemi» leur a, pour sa part, rétorqué M. Abdallah Zakri, ajoutant par ailleurs : «on peut en discuter entre nous, mais en faire un tintamarre risque d'attiser l'islamophobie». Placées sous le coup du sécateur de la stigmatisation, il semblerait donc que ces communautés d'infortune aient choisi de se tirer dans les pattes plutôt que de chercher à se serrer les coudes. Le racisme qu'elles subissent ne leur suffit pas, encore faut-il qu'elles déterminent à laquelle des deux appartient la palme de celles qui en souffrent le plus. Dans ce jeu de la surenchère victimaire, l'essentiel n'est-il pas éludé ? En Allemagne, juifs et musulmans ont pourtant réussi à prouver qu'ils pouvaient être solidaires…