Le Maroc n'a jamais fait de ses revendications sur Ceuta, Melilla et les ilôts un casus belli dans ses relations avec l'Espagne. Privilégiant depuis les années Hassan II un règlement bilatéral de ces différends territoriaux, ce dialogue feutré pourrait connaitre un nouveau rebondissement avec la volonté de Rabat de saisir l'ONU, selon Madrid. Rabat se prépare-t-elle à revendiquer devant les Nations Unies la rétrocession de Ceuta, Melilla et de tous les ilôts occupés par l'Espagne en Méditerranée ? A en croire ECD, le département de José Margallo prend très au sérieux une telle perspective, sonnant le tocsin dans ses rangs. A cet effet, le ministère a rappelé tous ses diplomates -même ceux partis en retraite- spécialistes du Maroc en vue de lui fournir des arguments pour alimenter sa plaidoirie devant les membres de la 4ème commission de l'ONU, celle de la décolonisation et des régions non-autonomes. La demande marocaine présentée en août 2015 ? Une mobilisation annonciatrice d'une belle empoignade diplomatique, juridique et politique à New York entre les deux pays voisins. Elle s'ajouterait ainsi au dossier de la délimitation des frontières maritimes en Atlantique. Selon ECD, seuls deux mois nous sépareraient de la présentation officielle de la requête marocaine. Une échéance que des sources au sein du ministère espagnol des Affaires étrangères estiment en août prochain (Iles Canaries). La publication en ligne affirme que le choix de ce timing n'est pas fortuit. Il marquerait la commémoration du 40ème anniversaire de la première demande du Maroc déposée devant l'ONU en août 1975. Rabat profite de la faiblesse du pouvoir central de Madrid ? Pourquoi maintenant ? Au-delà de l'explication donnée par ECD, la situation interne en Espagne offre au Maroc une bonne occasion d'actualiser ses vielles revendications. Le pouvoir central est toujours chancelant. L'abdication de Juan Carlos, en juin 2014 au profit de son fils Felipe, n'a pas pu freiner l'élan nationaliste indépendantiste très prononcé en Catalogne et au Pays Basque et dans une moindre mesure en Aragon et en Galice. La classe politique de ses régions se préoccupe davantage de ses problèmes internes que de renflouer à coup de centaines de millions d'euros les économies fragiles de Ceuta et Melilla. Deux villes qui survivent grâce aux aides reçues du centre et surtout grâce aux «changes économiques» légaux et illégaux avec le Maroc. A cette explication d'ordre interne, il serait utile d'ajouter la vieille question du Sahara occidental. En soumettant ses revendications sur Ceuta, Melilla et les ilots en Méditerranée devant l'ONU, Rabat acculerait l'Espagne à continuer à observer une «neutralité positive» adoptée depuis 2004. Le communiqué final de la réunion de la haute commission mixte du 5 juin à Madrid, n'a pas salué le plan d'autonomie proposé en 2007 par le Maroc. Les traditionnelles références de «sérieux» et «crédible» ont tout simplement sauté du texte.