L'exemple des retraités marocains à qui la CAF de Perpignan retire les prestations familiales interpelle. A l'aide des tampons de la police marocaine des frontières, la CAF avait établie que ces personnes passaient plus de temps à l'étranger qu'il ne l'est permis pour bénéficier de l'aide au logement. Mais au delà de se cantonner à ce seul cas précis, l'affaire peut être l'occasion d'ouvrir un débat plus large des réformes possibles du système. Voici quelques pistes. Pour le moment, le système de la CAF se focalise trop sur des «miettes qui font vivre et survivre ces vieux», comme l'exprimait le gérontologue Dr. Omar Samaoli dans une interview récemment accordée à Yabiladi. Si l'on pousse le débat plus loin, une question fondamentale à poser est de savoir si l'on veut rester dans l'application stricte de la loi, sachant que cette loi s'éloigne de plus en plus de la réalité de vie des retraités (pas seulement marocains), où si l'on essaye d'assouplir un système qui pourrait sans trop d'efforts accommoder les deux partis. Clairement, la deuxième voie est plus constructive… alors voici quelques propositions. 1. Une durée minimale de 6 mois pour bénéficier de l'APL En premier lieu, est-ce que la durée minimale de résidence en France pour pouvoir toucher l'aide personnalisée au logement (APL), actuellement de 8 mois, ne peut pas être revue à la baisse ? Pourquoi ne pas l'aligner sur le régime fiscal ? Par définition, a son foyer fiscal en France toute personne résidant 6 mois plus un jour par an dans le pays. Si à partir de cette période, une personne est imposable en France, pourquoi ne pas lui accorder le droit de toucher les allocations logement ? Concernant le minimum vieillesse, la période de résidence obligatoire est déjà de 6 mois, et l'on comprend mal cette divergence avec l'aide au logement. 2. Progressivité des sanctions Ensuite, il est possible par d'autres moyens d'éviter de forcer les retraités marocains à choisir entre l'ici et là-bas. Un choix catégorique entre la France et le Maroc est de toute manière rendu de plus en plus caduque de nos jours, ne serait-ce que par la facilité et la rapidité des voyages entre les deux pays. Sans tout de suite pousser les retraités voulant passer une grande partie de l'année au Maroc dans l'illégalité, il serait possible de mettre en place une progressivité dans les aides perçues, par rapport au temps passé en France. Partant d'une période minimale de 6 mois pour percevoir la totalité des aides, si un retraité marocain décidait par exemple de passer un mois de plus au Maroc, la CAF pourrait lui demander de reverser le montant des prestations reçues pour ce mois à la fin de l'année. Ainsi, passer plus de temps au Maroc deviendrait une option réaliste, un choix où chacun devra peser avantages et inconvénients. La CAF ferait preuve de plus de souplesse, sans que cela fasse exploser ses coûts. Au contraire, il se pourrait bien que ce dispositif empêchera des comportements aujourd'hui illégaux, et sera donc bénéfique pour les deux partis. Pour ces deux propositions, il reste cependant à noter qu'elles reposent sur un contrôle efficace du temps passé en France ou même dans le logement. Ce contrôle a été effectué de manière douteuse par la CAF de Perpignan sur les retraités marocains incriminés, comme l'a soulevé l'avocat des intéressés : contrôle des passeports (sans raison policière) et des tampons de la police des frontières marocaines. Il n'y a pas de méthode propre à la CAF pour effectuer ce contrôle. Mais puisqu'il y a vérification, pourquoi ne pas instaurer une grille progressive de sanctions ? 3. Convention de couverture maladie contre installation au Maroc Sur un autre plan, il y a des retraités qui aimeraient s'installer au Maroc pour enfin vivre avec leur famille, mais qui craignent de perdre leur couverture maladie. Rappelons que les retraités marocains comme bien d'autres nationalités, ont ruiné leur santé dans des travaux pénibles et sont victimes de pathologies plus ou moins lourdes. Dans ce cas, il serait possible que la France négocie un accord avec le Maroc qui assurerait un remboursement au Maroc des soins prodigués aux retraités marocains ayant choisi de quitter l'hexagone. En contrepartie, ces personnes renonceraient au minimum vieillesse et à l'aide au logement. Comme les propositions précédentes, cette mesure élargirait les options possibles pour les retraités marocains sans les forcer à faire des choix anachroniques. Le cadre légal n'est jamais quelque chose de figé. Il doit prendre en compte l'évolution de la société et s'adapter aux nouvelles contraintes. Le retraité marocain n'est pas dans une optique de fraude. Il est juste prisonnier du retard du corpus législatif sur les questions de la mobilité internationale.