Si le Maroc s'abstient d'importer des dattes des voisins maghrébins notamment, il ne pourra satisfaire la demande intérieure. Et pour cause, sa production reste historiquement inférieure à la consommation, alors que le royaume a la capacité de produire plus. Comment expliquer cette situation? Eléments de réponse. A la veille du ramadan, les autorités s'activent pour assurer l'approvisionnement national en dattes, cet incontournable du mois de jeûne. Et disons-le toute de suite, une bonne partie des dattes que consommeront les Marocains au f'tour durant le mois sacré, proviendra, entre autres, d'Arabie Saoudite, de Tunisie ou d'Algérie. En effet, la production moyenne annuelle marocaine est d'environ 90 000 tonnes, quand la consommation s'établit aux alentours de 150 000 tonnes, comme indiqué par le ministre de l'Agriculture Aziz Akhannouch dans un entretien avec Usine Nouvelle. Il est vrai qu'en 2013, les importations de dattes ont diminué à 47 000 tonnes, contre 58 000 tonnes l'année précédente, comme le révèle le rapport annuel de l'Office des changes sur le commerce extérieur. Et ce en raison d'une légère hausse de la production enregistrée au cours de la dernière campagne agricole. Mais la même année, le Maroc a importé, uniquement de Tunisie, 18 000 tonnes de dattes. Ce qui fait du royaume l'un des plus gros clients de son voisin maghrébin. Assez triste constat pour un pays qui est lui-même pionnier dans une variété aussi lucrative que le Majhoul. Malgré tout, le cabinet britannique d'intelligence économique Oxford Business Group (OBG) prédit une croissance substantielle dans les mois à venir, pour la filière marocaine des dattes. Et ce, sur la base, du programme de développement de l'Agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l'arganier (ANDZOA), considéré comme un propulseur de la production. Les dattes marocaines se conservent moins longtemps que les algériennes et tunisiennes Cependant rappelons-le, le Maroc est toujours le seul pays producteur de dattes qui en importe. Et les conditions climatiques ou du sol n'ont rien à avoir avec cette situation, car à en croire Driss Benatia, Ingénieur agronome et enseignant à l'Institut agronomique Hassan II de Rabat, le royaume pourrait produire autant que ses voisins. A noter que la production moyenne annuelle de dattes en Algérie et Tunisie serait respectivement d'environ 600 000 tonnes et 190 000 tonnes. «Le problème qu'on a relevé, il y a quelques années, avec le déplacement du ramadan est que le gros de la récolte est réalisé en novembre. Or cette année par exemple, le ramadan tombe en juillet. De ce fait, la distance entre les deux périodes est énorme, alors que c'est à ce moment que la demande se fait plus importante», explique à Yabiladi M. Benatia. Ce facteur temporel peut effectivement avoir une influence sur le niveau d'importation des dattes par le Maroc. D'autant plus que, souligne l'Ingénieur, «la production de datte marocaine est une production de qualité, seulement le produit ne se conserve pas longtemps». Ici, on invoque des lacunes dans la chaine de commercialisation qui n'intègrerait pas toujours le système de froid. Mais parallèlement, «la variété sélectionnée en Algérie et en Tunisie, le deglet nour, peut être conservée longtemps», ajoute M. Benatia. C'est d'ailleurs ce qui ferait le succès de ces dattes sur le marché chérifien. Opter pour une agriculture marchande L'autre aspect portant préjudice à l'essor de la filière chérifienne des dattes, selon l'ingénieur, n'est autre que le type d'agriculture pratiquée. Les autres pays du Maghreb «pratiquent l'agriculture marchande avec notamment la mise en place de vergers, ainsi qu'une politique de l'Etat qui consiste à subventionner l'activité, alors que les oasis du Maroc n'ont rien à voir avec l'agriculture marchande», explique-t-il, soulignant la pratique est plus le fait de petits agriculteurs que d'entreprises bien structurées. Le Maroc compte actuellement 4,8 millions de palmiers dattiers (dont environ 41% sont productifs)et vise, dans le cadre de son programme de restauration et de renouvellement des palmeraies à l'horizon 2020, la plantation de trois millions de nouveaux palmiers. Normalement 1,4 millions de plants devraient être réalisés cette année 2014, mais pour l'instant, le ministère n'en a pas encore communiqué l'état d'avancement. Il est vrai que le Maroc a pris un certain nombre de mesure pour relever la filière des dattes, notamment la culture hors zones oasiennes, mais il faudra peut-être attendre quelques années pour en voir les retombées.