L'Espagne s'apprête à couronner roi, dans les trois prochains mois, le prince Felipe à la place de son père. Après 39 ans de règne, Juan Carlos vient d'abdiquer. Il laisse à son fils une monarchie en perte de popularité à cause des scandales économico-financiers et extra-conjugaux de certains membres de la famille royale. Vu du Maroc, quels seront les impacts sur les relations entre les deux monarchies ? Finalement, Juan Carlos abdique. Depuis son accident de chasse au Botswana, en avril 2012, et les révélations de sa relation avec une femme d'affaire allemande, Corinna zu Sayn-Wittgenstein, 49 ans, les ennuis se sont succédés sur le père de l'Espagne moderne. Son état de santé s'est nettement détérioré et la crédibilité et la grande popularité dont jouissait Juan Carlos auprès des Espagnols a chuté. Au point même que des voix dans le clan des politiques modérées, se sont élevées pour réclamer son départ au profit de son fils pour la continuité de la monarchie. Ce changement sera-t-il bénéfique pour le Maroc ? Sur le plan humain, le prince Felipe et le roi Mohammed VI entretiennent de très bonnes relations. Une amitié les unit depuis plusieurs années. Toutefois, le pouvoir à ses contraintes qui ne sont pas toujours compatibles avec les liens personnels. Felipe a grandement besoin durant les premiers mois de son règne, de montrer à l'aide droite au sein du palais de La Zarzuela, l'armée et les services secrets, qu'il est un roi intransigeant ne cédant pas devant les revendications territoriales marocaines sur Ceuta et Melilla. Déjà en avril 2012, le ministre des Affaires étrangères, José Manuel García Margallo, avait transmis une demande au palais afin d'autoriser une visite officielle du prince héritier aux deux villes occupées. Ce constat vaut également pour la Grande-Bretagne sur le dossier de Gibraltar. C'est le chef de gouvernement qui décide Au-delà de ce «gage d'assurance», Felipe a les mains liés. Comme son père, il ne pourra jouer un rôle dans la consolidation de relations diplomatiques apaisées avec Rabat qu'avec la bénédiction de l'autre palais, La Moncloa, le siège du chef de gouvernement. Pour mémoire, José Maria Aznar, durant son second mandat (2000-2004), en pleine crise avec le Maroc sur l'îlot Leila, avait formellement interdit à Juan Carlos de visiter, officiellement, le royaume chérifien. C'est dire l'influence et le contrôle du gouvernement. Le roi n'avait pu réaliser son rêve qu'en 2005 avec l'arrivée aux commandes du socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, dans le sillage des attentats du 11 mars 2004 à Madrid. Juan Carlos n'est ensuite revenu au Maroc qu'en juillet 2013. Là aussi, les relations entre les deux voisins étaient au beau fixe. Par ailleurs, le contexte géopolitique a totalement changé. Juan Carlos avait ordonné à son armée de quitter, en novembre 1975, le Sahara occidental. En échange il avait offert aux Espagnols la démocratie et un arrimage complet sur l'économie de l'Europe occidentale. En revanche aujourd'hui, le prince Felipe se trouve dans une situation plus délicate. C'est lui qui a besoin de la confiance de la population et de la classe politique, afin de restaurer l'image de la monarchie après les scandales économico-financiers et extra-conjugaux de certains membres de la famille royale.