Cela fait plusieurs mois que le Maroc surveille comme du lait sur le feu les jihadistes qui reviennent de Syrie. Une fois de retour des champs de bataille, ils sont aussitôt interpellés pour des raisons de sécurité. Certains ont déjà écopé des peines d'emprisonnement allant de 2 à 6 ans et Rabat songerait à un projet de loi pour criminaliser ces voyages de manière systématique. Décidément les opérations de démantèlement des cellules de recrutement de combattants jihadistes ne suffisent plus pour contrer la menace terroriste. Le Maroc est passé à la vitesse supérieure. Depuis plusieurs semaines, une véritable campagne est lancée contre les jihadistes qui reviennent des zones de conflit en Syrie. Selon des sources espagnoles, plus de 120 Marocains ont été arrêtés ces derniers mois à leur retour du pays de Bachar Al Assad. Certains ont été déjà condamnés et croupissent en prison. «Tous ces prisonniers ont été arrêtés ces derniers mois à l'arrivée à l'aéroport Mohammed V de Casablanca», explique à Efe, Abderrahim Ghazali, porte-parole de la Commission pour la défense des prisonniers islamistes. L'Intérieur est plus que décidé à faire disparaître les cellules de recrutements. Des combattants ont déjà écopé de peines de prison allant de 2 à 6 ans après avoir été accusés d'avoir des «intentions destructrices» pour le pays, ajoute le journal. Retour sur fond de déception ? Le retour des jihadistes marocains s'expliquerait du fait de la situation qui perdure en Syrie. En effet, des spécialistes laissent entendre que dans certaines zones, les combats peuvent parfois opposer des groupes jihadistes. Ce qui crée une confusion chez certains qui choisissent alors d'abandonner le terrain. «Leur retour confirme leur déception après s'être rendu compte qu'ils - les jihadistes - poursuivaient des chimères», souligne l'académicien marocain et spécialiste en sciences politiques, Rachid Mouqtadir, faisant allusion aux combats qui se produisent entre certains mouvements islamistes. Même s'il est difficile de donner des chiffres exacts, les estimations du gouvernement, des médias marocains et syriens, indiquent que plus d'un millier de Marocains se sont rendus en Syrie pour prendre part aux combats opposant les partisans de Bachar Al Assad aux rebelles et qu'une centaine aurait été tuée. Quelques grandes figures jihadistes ont déjà péri dans ces affrontements, dont Brahim Benchekroun, l'ancien chef de Sham-al-Islam, un groupe jihadiste marocain affilié à Al-Qaïda, tué récemment à Lattaquié. En outre, certains Marocains rejoignent la Syrie depuis d'autres pays comme la Turquie, la Belgique, l'Espagne… Vers un projet de loi pour criminaliser le voyage pour participer à des conflits armés Alors que les arrestations et le démantèlement des cellules, dont le dernier est intervenu mi-avril, se multiplient, Mouqtadir estime que la politique adoptée par les autorités marocaines pour les jihadistes de retour en Syrie est insuffisante et qu'il y a un manque de coordination entre la police, les autorités religieuses et le domaine des droits de l'homme pour résoudre ce problème. Une autre donne est aussi à prendre en considération. Selon ce spécialiste, le silence des autorités religieuses officielles du pays sur le conflit syrien a incité les jeunes plus sensibles à la cause religieuse de chercher des références chez des idéologues étrangers. Pour rappel, en décembre dernier, le coordinateur du comité national de défense des prisonniers islamistes, Anas Alaoui, avait rejoint la Syrie suite à une fatwa émise par des oulémas sunnites au Caire. Le jihadiste est mort au combat aux environs de Lattaquié. Alors que Casablanca, certaines villes du nord du pays, ainsi que les enclaves de Ceuta et Melilla, abritent des cellules jihadites, le Maroc surveille de très près les mouvements. Quelques cellules ont été déjà démantelées ces dernirs mois. Rabat pourrait également voter un projet de loi pour criminaliser le voyage à l'étranger en vue de participer à des conflits armés. Mais malgré toutes ces mesures, certains observateurs critiquent «le laxisme» des autorités marocaines lorsque les jihadistes quittent le territoire pour se rendre en Syrie, et leur détermination à les arrêter à leur retour.