Le journaliste marocain Ahmed Benchemsi et Eric Goldstein, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord de Human Rights Watch (HRW) ont, dans une lettre commune, interpellé le président américain Barack Obama sur l'urgence des réformes au Maroc. Une mise au point qui s'inscrit dans le cadre de l'importante visite du roi Mohammed VI à Washington. Le 22 novembre prochain, le roi Mohammed VI rencontrera le président américain Barack Obama dans le cadre d'une visite officielle à Washington. Le souverain, accompagné d'une forte délégation, et le locataire de la Maison Blanche échangeront sur des sujets d'intérêts communs à même de renforcer les relations maroco-américaines. Saisissant cette occasion, le journaliste Ahmed Benchemsi et le directeur adjoint de Human Rights Watch en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, Eric Goldstein, ont interpellé le président américain sur l'urgence des réformes dans le royaume. Ainsi, ils sont revenus sur les relations entre le Maroc et les Etats-Unis, matérialisées par l'accord de libre-échange, la tenue d'exercices militaires conjoints, et la coopération sur la lutte antiterroriste. Ils ont également rappelé les 697 millions de dollars accordés au Maroc ces cinq dernières années pour lutter contre la pauvreté et stimuler la croissance économique par le biais du Millennium Challenge Account. Toutefois, selon eux, le Maroc est plus que jamais dans l'obligation d'accélérer les réformes, notamment sur le plan juridique. Sahara, droits de l'homme, Anouzla Dans leur lettre, Benchemsi et Goldstein estiment que «ce que le président Barack Obama devrait dire au roi, c'est que le soutien américain au processus de réforme doit dépendre de progrès tangibles, au-delà de la rhétorique, sur des bases de changement visibles sur le terrain, notamment en matière de droits de l'homme et la fin de l'impunité de la police qui recourt à la violence lors des manifestations». En plus, les coauteurs du document font savoir que des centaines de marocains purgent encore injustement des peines dans les prisons du royaume. Pour cela, ils appellent Obama à évoquer la situation des jeunes marocains condamnés après les manifestations, des séparatistes sahraouis ainsi que des islamistes. Ils ont aussi rappelé l'affaire Anouzla et du rappeur L7a9ed, de même que celle des deux adolescents jugés à Nador pour s'être embrassés devant leur école et avoir posté la photo de leur baiser sur Facebook. Les réformes «pas encore mises en pratique» En plus, Benchemsi et Goldstein sont revenus sur l'adoption de la nouvelle constitution. Bien qu'ils reconnaissent les apports du nouveau texte, ils ne manquent pas de souligner le retard dans sa mise en œuvre. Pour rappel, la nouvelle constitution, donne entre autre le pouvoir aux citoyens de déposer des recours pour remettre en question la constitutionnalité des lois et impose la lecture des droits lors des arrestations. Pour HRW et Benchemsi, le roi avait promis en plein Printemps arabe de réformer la constitution afin d'apporter du changement. Même si cette réforme s'est finalement produite, «ces initiatives n'ont guère changé la pratique», fustigent-ils. «Obama devrait les prendre au mot» Selon les deux auteurs de la lettre, «à leur crédit, les autorités marocaines affirment ne pas vouloir se comparer à d'autres pays moins respectueux des droits mais aux standards universels». «Obama devrait les prendre au mot», pensent-ils. Ils estiment que «si le Maroc veut être vraiment «exceptionnel», dans sa région, et répondre aux aspirations de la population pour les droits de l'homme et la démocratie, tout en maintenant la stabilité, le pays devrait agir sur les réformes dont le roi a parlé pendant des années». Selon l'ONG et le journaliste, c'est ce genre de discours que Barack Obama devrait avoir face au roi Mohammed VI. Pour eux, «dire non n'est pas être détracteur de l'agenda de réforme du Maroc, mais montrer que les Etats-Unis connaissent la différence entre les réformes réelles et l'apparence». Récemment, elle a interpellé le royaume avant sa candidature au Conseil des droits de l'homme de l'ONU. L'organisation multiplie ces derniers temps les mises en garde contre le Maroc.