L'expérience de Mohamed Khoutoul illustre l'idée que l'espoir d'un avenir meilleur a toujours éclairé l'humain dans son parcours de vie. Natif de la région du Rif, il n'a pas fait de son évolution entre le Maroc et la France qu'une succession de déplacements. mais un voyage plein de défis qui ont contribué à façonner sa personnalité et son avenir. Mohamed Khoutoul est né au Maroc, près de la ville d'Al Hoceïma en 1971. Comme ses pairs, il a commencé son parcours dans une école coranique, au sein de laquelle il a mémorisé 35 parties du Coran. À l'âge de onze ans, il a rejoint ses parents travailleurs en France. Malgré son jeune âge, Mohamed Khoutoul a cultivé sa résilience en confrontant la barrière linguistique et le défi d'intégration scolaire par la persévérance et l'excellence. Puisque la volonté ne connaît pas de frontières, ces premières années au pays d'accueil auront été déterminantes dans la construction d'une partie de son identité, tout en lui permettant de joindre ses deux cultures. «Au début, l'intégration n'a pas été facile. Je n'ai jamais été à l'école primaire au Maroc et j'ai rejoint la France à un âge avancé», a confié Khoutoul à Yabiladi. Malgré cela, il a excellé dans son parcours jusqu'à cumuler diplômes et certificats, dont un master en sciences et développement de l'Université Paris 13 (1998) et un master en gestion, économie, droit et gestion de projets de l'Université d'Orléans (2005-2006). Il a également obtenu un certificat en gestion du changement de l'Ecole militaire relevant du ministère de la Défense, en 2008, en plus de plusieurs autres formations certifiantes. Le parcours professionnel de Mohamed Khoutoul dégage la capacité de celui-ci à évoluer dans les secteurs privé et public. Fonctionnaire de 1997 à 2000, il a été agent de développement local, au poste de directeur de la politique de la ville de Bourges. Il a servi également en tant qu'agent de développement économique au Mée Sur Seine et chef de la mission économique à Saint Etienne du Rouvray. Mohamed Khoutoul a ensuite exercé les fonctions de directeur général de la société d'insertion «RESPIRE», d'octobre 2000 à avril 2007. Grâce à lui, l'entité a été restructurée, enregistrant ainsi une croissance des revenus de 700 000 à 1,2 million d'euros en trois ans. En 2008, il rejoint le ministère français des Armées, en tant que directeur de la transformation. Jusqu'en août 2012, il a supervisé la restructuration de plusieurs sites militaires, avec la conception d'une méthodologie et la coordination avec les entités gouvernementales et privées. Il travaille ensuite en tant que directeur de la section du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) au département de l'Essonne, outre ses fonctions de trésorier du Syndicat des transports de la région Ile-de-France. Aujourd'hui, il est président de l'IUT d'Evry Val d'Essonne, où il dirige neuf départements, encadre plus de 170 salariés et 2 000 étudiants. Parallèlement, Mohamed Khoutoul est le directeur des affaires stratégiques et institutionnelles pour la région Ile-de-France, au sein du Groupe Keolis, gestionnaire de systèmes de transport public dans le monde. L'écriture, une démarche de dialogue et un pas vers l'autre En plus de sa carrière diversifiée, Mohamed Khoutoul est un auteur distingué, dont les écrits sont une chronique d'expériences humaines profondes. Par les mots, il s'efforce de transmettre un message qui célèbre la vie, tout en révélant des mondes invisibles. A son actif, il compte six ouvrages. Paru en 2005 aux édition L'Harmattan, son premier opus «C'est possible ?» est introduit par le Père Bernard Neveu. Il s'agit d'un témoignage sur «des choses merveilleuses qu'il a vues s'opérer en lui». A l'âge de quatorze ans, Mohamed Khoutoul est en France depuis quatre ans et ne parle le français que depuis trois ans. Il demande à voir l'inspecteur d'Académie, puis il est reçu par la secrétaire et voit ses désirs exaucés. Sans vouloir se mettre en valeur, il relate ce souvenir marquant pour «témoigner de Dieu et dire à tous les migrants : 'Bien vivre dans un pays qui n'est pas le sien, c'est souvent très douloureux, mais c'est possible'». «Le savoir ne se transmet pas de bouche à oreille, mais d'un cœur désireux de transmettre à un autre en attente de recevoir. C'est là que réside tout l'art de la pédagogie. Pour donner, il faut avoir reçu. On ne transmet pas que le savoir. Mais on transmet à l'autre ce qu'on est soi-même, son histoire, sa passion et son humanité…» Mohamed Khoutoul Un an plus tard, l'auteur publie dans la même maison d'édition le livre «Le Chêne et l'Olivier – Lettre à Marianne» préfacé par Claude Bébéar. «La France est le pays dont j'ai rêvé quand j'étais enfant, devenu réalité à l'âge de onze ans. La rencontre n'a pas été fortuite, mais mouvementée par des aléas. Ecrire à la France sous forme de lettre, c'est communiquer, partager des savoirs, des sentiments, des idées, mais c'est aussi communier avec vous. N'est-ce pas la plus belle chose que de passer du rêve à la réalité ? Tout cela est possible», nous confie-t-il. Guidé également par son intérêt pour les questions migratoires, Mohamed Khoutoul publie en 2017 le livre «Islam, Intégration, Insertion – Propositions pour la France» (éd. L'Harmattan). «L'Islam est la religion révélée du Livre, assimilée aujourd'hui à tous les maux de la société : immigration, intégration, barbarie de l'islamisme radical, banlieues…», explique-t-il. Dans ce sens, l'ouvrage présente de manière lucide et pragmatisme «une vision du message de l'Islam de transcendance, de paix, de fraternité». De cette manière, il a à cœur de montrer que «l'Islam, par essence, peut-être vécu à chaque époque, en chaque lieu, avec 'les yeux du contexte'». Mohamed Khoutoul est profondément convaincu de la possibilité de vivre et de faire ensemble dans la société française. Il livre ici ses réflexions et ses propositions pour l'avenir, soumises au débat. Selon lui, lire l'esprit critique de la pensée islamique éclairée dans les contextes fondateurs de l'islam «demande un effort, qui est l'assiduité recommandée par notre religion». Dans ce cheminement intellectuel, il reste nécessaire, au regard de l'auteur, «d'intégrer les outils des sciences sociales pour comprendre et définir le contexte des pratiques rituelles religieuses». Une démarche personnelle ouverte sur les autres La même année, Mohamed Khoutoul publie «C'était le Père Bernard Neveu 1920-2014» (éd. L'Harmattan), préfacé par Monseigneur Jacques Blaquart, évêque d'Orléans. Il s'agit d'un témoignage de «la foi vécue et partagée par un prêtre avec les siens et les autres croyances, plus particulièrement, avec des musulmans». Dans ce livre, «le père Bernard Neveu nous livre ses réflexions, ses prières et nous fait partager une relation exceptionnelle avec un jeune musulman, Mohamed Khoutoul, à qui il a apporté son aide pour ce qu'il est devenu aujourd'hui, dans l'amitié et la fraternité», nous dit l'auteur. «Cette relation est un témoignage inédit parce qu'il est ancré dans des pratiques spirituelles profondes et sincères où chacun est ce qu'il est, partagée dans le respect mutuel», ajoute-t-il. Dans son autre opus «Rencontres : le face-à-face sacré des relations» (éd. L'Harmattan, 2021), préfacé par Monseigneur Michel Dubost, Mohamed Khoutoul livre son témoignage sur ses nombreuses rencontres. Il parle de «la rencontre concrète expérimentée avec des personnes de tous rangs», comme élément révélateur du secret et du sens de l'altérité dans la rapport à l'autre. Pour l'auteur, «la rencontre ne se limite pas à celle du face-à-face : il y a, au-delà de l'apparence, un sacré à explorer pour une rencontre avec l'être de l'Être». Dans cet ouvrage, il invite ainsi à «se découvrir, à s'explorer et à lire dans la création la manifestation du sacré habité en l'Être». Se révélant véritablement un écrivain prolixe, Mohamed Khoutoul a publié son sixième ouvrage, en août 2024. Dans «Bienveillance : Au cœur de la vie et du sacré» (éd. L'Harmattan), préfacé par le cardinal Philippe Barbarin. Dans ce livre, l'auteur partage des réflexions sur la bienveillance, «ancrées dans une expérience personnelle et professionnelle» qui est «tout simplement de vie». «La Bienveillance, c'est bien veiller sur soi, sur les autres, et sur la création, cette dépendance innée dans la primordialité de l'être», nous dit-il. Par ailleurs, Mohamed Khoutoul donne des conférences et des cours dans plusieurs domaines, dont l'islam, la sociologie des cultures, le développement local, la gestion et l'organisation des entreprises. Il a également cofondé le Dialogue interreligieux d'Orléans. Ceinture noire de karaté, premier dan, il conserve également un lien fort avec le Maroc. «Je suis marocain, rattaché à mes racines qui sont mes fondations, pour mieux m'épanouir à l'extérieur du Maroc. J'aime le Maroc et j'aime mes racines berbères des montagnes du Rif. C'est ce qui fait ce que je suis aujourd'hui, parce que j'ai des racines solides: ma langue, ma culture, mes pratiques sociales, ma religion.» Mohamed Khoutoul «Je suis donc de naissance marocaine et de reconnaissance française. D'autre part, le Maroc est mon pays de toujours et la France mon pays de tous les jours. On ne peut pas choisir entre sa mère et son père. Les deux sont importants pour moi et je les porte dans mes gènes, dans ma façon de vivre au quotidien», conclut-il.