Au Maroc, les célébrations du Nouvel an au cours des décennies précédentes ont été marquées par des retrouvailles familiales autour d'un gâteau pour l'occasion, des programmes télévisés servant de fond sonore. Les cartes de vœux ou les appels pour le passage à la nouvelle année ont été aussi en vogue. Dans quelques jours, le monde accueillera une nouvelle année. Au Maroc, les célébrations du Nouvel an sont souvent familiales, avec des rituels qui ont marqué des générations. A l'approche de cette, les personnes qui ont grandi dans les années 1980 et 1990 dans le pays ont partagé avec Yabiladi leurs souvenirs de ces soirées à une époque où Internet, les smartphones et les réseaux sociaux n'étaient pas une normalité. Le gâteau : un incontournable du réveillon du Nouvel an A l'approche de la fin de l'année, les pâtisseries sont nombreuses à proposer des gâteaux à la crème et au chocolat. Nombre de famille s'activent à commander à l'avance ces préparations, incontournables de la soirée. Ce n'est pas une tradition nouvelle, selon Saloua, 42 ans. Cette mère de trois enfants se souvient très bien des réveillons avec sa famille, à la fin des années 1980. «J'habitais avec mes parents et mon frère à Lakhssas, une petite ville de la province de Sidi Ifni. Nous fêtions le réveillon comme toutes les autres familles marocaines», raconte-t-elle à Yabiladi. Le gâteau est incontestablement la vedette de la soirée. «J'allais moi-même à la boulangerie, même si nous vivions dans une petite ville avec peu de choix, pour commander le gâteau à l'avance», se souvient-t-elle. Le gâteau est généralement servi après le dîner. «Il était rond, avec beaucoup de crème et de chocolat, rappelant la forêt noire», plaisante Saloua. «Mais les restes, c'était pour le petit déjeuner du lendemain, c'est une règle», ajoute-t-elle. Histoire : La cassata, un gâteau de fêtes à la croisée des influences arabes en Sicile Youness, 30 ans, originaire de Casablanca, abonde dans le même sens. Pour sa famille de cinq personnes, la nouveauté a été d'ajouter des spécialités marocaines à cet ensemble. «En plus du gâteau, ma mère décorait la table avec des biscuits locaux. Ma famille est originaire de Safi, donc le kaak était un incontournable», nous dit-il. «Le petit-déjeuner du lendemain était composé de restes de la veille, ce qui ne manquait pas de me créer des difficultés digestives», plaisante Youness. A la télévision, une programmation spéciale Nouvel an Outre le célèbre gâteau, le réveillon de l'enfance de Youness signifiait aussi Atiq Benchikar, ancien présentateur vedette qui a animé nombre d'émissions de divertissement musical et du réveillon sur 2M, dans les années 1990 et au début des années 2000. La télévision et la programmation spéciale pendant la soirée a permis aux familles marocaines de se divertir tout en dégustant des douceurs, confortablement au chaud à la maison. Certains ont été marquée par la musique, le chaâbi en particulier, d'autres, comme Saloua, se souviennent du bêtisier. «A l'époque, il n'y avait qu'une seule chaîne de télévision, Al Aoula», se souvient cette mère de trois enfants. «Il y avait une émission spéciale du Nouvel an avec des spectacles et des concerts, et surtout, le segment qui nous passionnait le plus, mon frère et moi : le bêtisier. Regarder les présentateurs des journaux télévisés en fou rire, faire des erreurs ou des reprises, c'était un moment fort de la télévision pour nous.» Histoire : Le nougat, friandise populaire façonnée aux cultures arabo-musulmanes et européennes Mais certaines familles ne se sont pas contentées de la télévision marocaine. Les chaînes françaises ont été suivies également, avec un compte à rebours du Nouvel an à deux reprises. Mohamed, 35 ans, se souvient de ses soirées des années 1990. «On faisait le compte à rebours deux fois, une fois avec la télévision française, puis avec la marocaine», dit-il. Pour Faiza, 28 ans, originaire de Casablanca, les souvenirs d'enfance du réveillon au début des années 2000 sont liés à «L'année du silence». «J'ai beaucoup aimé les images muettes et des moments forts de l'année, en plus des bêtisiers, bien sûr», confie-t-elle à Yabiladi. «Je vous souhaite une bonne année» On ne peut apprécier un réveillon sans avoir échangé les vœux avec les proches, en fonction de la décennie et des technologies disponibles à ce moment-là. Enfant des années 1980, Saloua n'a pas vécu avec les téléphones portables et les réseaux sociaux. Comme beaucoup, elle a envoyé des cartes postales à ses amis et cousins et a attendu la leur avec impatience. «Mon père nous achetait souvent des cartes postales avec ses vœux pour la nouvelle année. Nous écrivions à nos cousins et mon père les envoyait plus tard», se souvient-elle. Saloua ne peut évoquer ces souvenirs sans mentionner ceci : «Je me rappelle encore que chaque année, j'envoyais une carte à un de mes cousins pour souhaiter une bonne année. Or, ce cousin est mon mari et le père de mes enfants.» Pour Mohamed, sa famille a préféré les appels, mais avec une exception. «Mes parents avaient pour habitude d'appeler la famille et les amis à 10 heures pour s'assurer que tout le monde était encore réveillé et qu'ils ne dérangeaient personne», raconte-t-il. Maroc : La truite pour remplacer le saumon Avec les téléphones portables, les gens se sont mis à envoyer des SMS, sous forme de tentatives de rimes : «Sana saida kif lka3ida», «Sana saida wa haloua ladida» ou le classique «à l'année prochaine», que Youness ne trouve «toujours pas drôle». Sourire à la caméra Le passage à la nouvelle année ne peut se dérouler sans une photo. Dans les années 1980, Saloua et sa famille ont utilisé l'analogique. Avec son frère, elle a toujours dû s'y préparer, faute d'options de filtres ou de reprises. «Nous mettions nos plus beaux vêtement, mon frère et moi, car il y aurait forcément une photo – une photo analogique, bien sûr, puisque mon père possédait un appareil», dit-elle. Pour les jeunes, une photo avec l'appareil du téléphone suffit. Après le repas et la télévision, «ma mère prend une photo en souvenir pour l'envoyer à la famille ou plus tard pour ma sœur aînée, qui est partie étudier en France», explique Faiza.