Le gouvernement autonome des Iles Canaries pense avoir trouvé la parade pour éviter que son gouvernement national, ainsi que le Maroc continuent à soutenir les prospections pétrolières dans la zone maritime qui les séparent du royaume chérifien. Il veut une zone d'exclusion environnementale européenne. Les îles Canaries veulent devenir un Artique bis. Non, que le réchauffement climatique ait viré sa cuti, mais le gouvernement autonome des îles espagnoles situées aux larges des côtes atlantiques marocaines veut obtenir une protection identique pour interdire toutes prospections pétrolières au large de ses côtes. La Commission européenne prépare actuellement une nouvelle règlementation sur la sécurité des activités de prospections, exploration et production de pétrole et de gaz off shore, suite au drame du golfe du Mexique. Les Iles Canaries souhaitent être inscrites dans ce règlement comme une zone d'exclusion environnementale, révèle, aujourd'hui, jeudi 7 février, la Provincia.es. La zone maritime glissée entre le Maroc et les Iles Canaries serait le siège de réserves pétrolières. Rien n'a été encore prouvé, mais plusieurs compagnies pétrolières y ont obtenu des concessions côté marocain, comme côté espagnol. Si l'affaire est ancienne, elle a été réactivée, l'an dernier, lorsque le 16 mars, le gouvernement espagnol de Mariano Rajoy a autorisé la compagnie Repsol à y initier des prospections off-shore. Problème n°1 : La frontière S'en est immédiatement suivi une passe d'armes entre le Maroc, le gouvernement autonome des îles Canaries, et le gouvernement espagnol. En mars, Abdelkader Amara, ministre marocain de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles technologies en Espagne, explique que ce genre de décision ne doit en aucun cas être prise de façon unilatérale. En cause, la délicate délimitation de la frontière maritime entre le Maroc et les îles. L'Espagne table sur une ligne à égale distance des côtes marocaines et canariennes, alors que le Maroc veut que le calcul commence à partir du plateau continental marocain. Au lieu d'un partage 50/50 km, la séparation se ferait à 20/80km au profit du Maroc. Dans ce dernier cas, la concession octroyée à Repsol serait à cheval sur la frontière. Problème n°2 : Le partage du pétrole Le gouvernement espagnol est le seul à souhaiter et soutenir la prospection de Repsol dans les eaux territoriales des Canaries. Si pétrole il y avait, ce serait une véritable aubaine pour le pays qui connait de graves difficultés économiques, alors que la compagnie pétrolière connait elle aussi des difficultés après avoir été chassée d'Argentine, en mai, l'an dernier. Le Ministre de l'Industrie, du Tourisme et du Commerce, M. José Manuel Soria, a laissé entendre, en mars 2012, que si l'Espagne renonce aux prospections qui sont déjà autorisées par le gouvernement, dans les eaux territoriales des îles Canaries, sous la pression du gouvernement autonome, le Maroc pourra conserver et exploiter seul tout le pétrole qu'il pourrait trouver dans la zone. L'Espagne veut sa part du gâteau. Un soupçon qui, au-delà de la question territoriale pure, a toutes les raisons d'être exact puisque le Maroc prospecte également. Tangiers Petroleum estime le potentiel de son bloc offshore de Tarfaya à 750 millions de barils, révèle, aujourd'hui Ecofin. La zone se situe précisément dans la même zone maritime mais dans une partie des eaux territoriales marocaines qui n'est pas sujette à débat. Problème n°3 : L'économie touristique des Canaries Le gouvernement autonome des Iles Canaries s'oppose à son gouvernement national. Il n'a jamais voulu de ces prospections pétrolières, dans la crainte d'une marée noire. S'il utilise aujourd'hui l'argument écologique pour se justifier, il en va surtout de l'existence même des Canaries. Toute l'économie de la région autonome est fondée sur le tourisme donc sur ses plages. Dans son opposition aux prospections de Repsol, le gouvernement autonome des Canaries rejoint théoriquement la position marocaine, mais il a également bien conscience, tout comme le gouvernement espagnol national, que les réticences du royaume tiennent aussi à sa volonté de se réserver la plus grosse part du gâteau. Le gouvernement autonome nourrit à l'égard des concessions offertes, dans la région, par le Maroc, à des sociétés comme Tangiers Petroleum Compagny, autant de défiance que vis-à-vis de son gouvernement national. Cependant, pour le président du gouvernement autonome, Rivero garde espoir de se concilier les deux royaumes au moyen de cette zone d'exclusion environnementale européenne. «Le Maroc s'est intéressé à cette zone parce que l'Espagne veut y chercher du pétrole, si l'Espagne renonçait, il devient possible de convaincre le Maroc de se désister à son tour, comme nous l'avons vu dans l'affaire de la centrale nucléaire de Tan Tan», estime Rivero.