Réputés pour être plus beaux et plus féroces que les lions d'Afrique, les derniers lions de l'Atlas restant au Maroc doivent leur survie...à leur captivité dans les zoos. Un bien triste destin pour ce félin qui jadis escaladait le mont Toubkal. A deux reprises, des programmes de réintroduction allaient être lancés au Maroc pour mieux préserver la survie de l'espèce, mais ils n'ont jamais vraiment vu le jour. Alors que son habitat naturel s'étendait du Maroc jusqu'à l'Egypte, le Lion de l'Atlas a quasiment disparu en Afrique du Nord. Au royaume, les derniers spécimens en liberté ont disparu dans les années 30-40. «Un lion a été abattu près de Taddert (versant nord du Tizi n'Tichka) en 1942, ce qui constitue la dernière mention de l'espèce au Maroc», rappelle Fabrice Cuzin, dans sa thèse présentée en 2003 sur les grands mammifères du Maroc. Les félins vivaient surtout dans les plaines, les montagnes et près des rivières pour mieux atteindre leurs proies. Dans sa thèse, le doctorant explique qu'en 1930, en plein été, des habitants auraient aperçu des lions gravir jusqu'à 3000 mètres d'altitude le Toubkal. Du Toubkal au zoo d'Aïn Sebaâ ! Les raisons de la disparition de cette espèce à l'état sauvage sont diverses. La première est la chasse au lion par l'homme. «La chasse au lion a de tous temps attiré les notables et, pendant le Protectorat, les chasseurs européens, l'utilisation d'armes modernes a sans doute été un facteur décisif dans l'efficacité de cette chasse», précise Fabrice Cuzin. Viennent ensuite les modifications de l'habitat du lion, principalement les diminutions des espaces forestiers mais également la chasse et la disparition des animaux proies du lion. Face à cette diminution de ressources alimentaires, le lion a dû rechercher d'autres nourritures et a du s'attaquer davantage au bétail, créant encore plus d'hostilité de la part des populations locales. Les seuls spécimens qui existent encore aujourd'hui au Maroc sont des lions qui vivent en captivité. Une trentaine d'entre eux sont au Zoo de Témara et deux autres dans le zoo d'Aïn Sebaa à Casablanca, mais ces derniers vivent dans des conditions déplorables, au milieu des déchets, sans que les autorités ne bougent le petit doigt pour les sauver des griffes de la direction du zoo qui n'en a que faire de leur sort. Ces animaux ont pu être sauvegardés car ils sont les descendants des lions qui ont été soigneusement gardés dans la fauverie royale. Echec du lancement des projets de réintroduction Dans les années 90, un regain d'espoir apparait pour tenter de réintroduire le lion de l'Atlas dans son habitat naturel. L'idée vient de scientifiques anglais de l'université d'Oxford. «Il s'agissait d'un programme d'une durée de 20 ans avec pour objectif final, le développement de l'écotourisme dans la région d'Azilal. Pour accueillir le félin, une réserve de 100.000 ha a été envisagée, dont un dixième de la surface devait être clôturée. C'était une région dépeuplée où le lion ne présentait aucun danger pour la population», précise le journal Le Matin dans un article datant de 2011. Cependant, ce projet est abandonné. Il faut attendre 2009 pour qu'un nouveau projet de réintroduction voit le jour avec la participation du Haut commissariat aux eaux et aux forêts et à la lutte contre la désertification. Le second projet prévoyait «une évaluation du patrimoine génétique de la population de cette espèce, à travers des analyses de l'ADN. Les résultats seront exploités pour la mise en place d'un programme d'élevage international ayant pour objectif la conservation et l'amélioration du patrimoine génétique de cet animal», poursuit le journal. En d'autres termes, l'objectif est de sélectionner les lions d'Atlas des zoos du Maroc mais également de ceux gardés dans d'autres zoos du monde, choisir les moins métissés ou hybridés, de les faire se reproduire et de relâcher leur petit dans leur milieu naturel au Maroc, dans un périmètre encadré par les autorités. Que va chasser le lion ? Cependant, ce projet sera également laissé à l'abandon. «Il n'y avait rien de concret !», lâche Michel Aymerich, auteur de plusieurs livres sur la faune et flore marocaine qui avait apporté son soutien à ce projet. Joint ce matin par Yabiladi, il explique que l'une des raisons qui a freiné ce projet provenait des populations locales qui craignaient que les lions réintroduits ne s'attaquent à leurs bétails ou même à eux. «Aujourd'hui, il n'existe plus un écosystème large permettant aux lions réintroduits de chasser ou de se déplacer librement. Les proies du lion ont disparu ou sont en voie de disparition ces dernières années, les Marocains se sont installés dans des régions forestières où il vivait jadis.», ajoute Oussama Abaouss, militant écologique. «Il y a 20 ans, peut-être que ce projet aurait été possible mais aujourd'hui, il l'est beaucoup moins !», regrette-t-il. A quoi il faut ajouter des raisons financières. Car réintroduire les lions de l'Atlas dans leur habitat naturel est coûteux et contraignant pour les autorités qui ont d'autres chats à fouetter. Il faut mobiliser les personnes qui devront veiller au bien-être des lions mais aussi déplacer certainement les habitants qui vivent en plein milieu de l'habitat du félin. A l'heure actuelle, le lion de l'Atlas ne peut que survivre dans un parc… derrière des barreaux. Reportage sur le lion de l'Atlas diffusé sur 2M Autre projet de réintroduction ? Yabiladi a tenté de joindre ce matin le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts pour savoir s'il envisageait un autre projet pour tenter de réintroduire le lion de l'Atlas ou mieux le protéger. Mais sans résultat. Néanmoins, une page Facebook intitulée « Tous pour la réintroduction des lions de l'atlas au Maroc » suit régulièrement toute l'actualité du lion de l'Atlas pour sensibiliser le public.