Le 5 décembre dernier, dans un vol Air France en partance de Casablanca pour Paris, le pilote d'avion lance une boutade à l'encontre du souverain. Une blague qui passe très mal auprès des dizaines de passagers marocains qui sont à bord. Yabiladi a retrouvé l'un de ses passagers. Il raconte comment il a vécu ce vol. Il n'y a pas à dire. Le pilote du vol Air France qui a osé lancer, début décembre dernier, une boutade à l'encontre du souverain est tombé sur les bien mauvais passagers marocains. Et il risque de s'en mordre les doigts. Car parmi les passagers du vol, il y avait Abderrahmane Mekkaoui, professeur universitaire et spécialiste en stratégie militaire qui, de surcroît, connait bien le droit aérien et les obligations d'un pilote d'avion. «Malheureusement il a fallu que ce pilote tombe sur moi !», lance en riant Abderrahmane Mekkaoui, joint hier après-midi par Yabiladi. Une blague qui passe mal Les faits remontent le 5 décembre dernier à l'aéroport Mohamed V de Casablanca. Abderrahmane Mekkaoui se souvient du moindre petit détail de ce fameux voyage. «Je connais même par cœur le numéro de mon vol qui est AF 2497 !», déclare-t-il. Ce jour-là, il doit se rendre à Paris pour participer à un séminaire international sur le conflit au Mali. Il est accompagné d'autres professeurs et intellectuels qu'il connait bien. 16h10 : tous les passagers sont confortablement assis. Il ne reste plus qu'à décoller. Mais soudainement, le commandant de bord prend la parole pour annoncer que le décollage aura du retard. Cela aurait pu suffir pour informer les passagers du vol mais le pilote décide d'en rajouter. Des mots en trop qui vont créer la stupeur chez les passagers marocains, qui resteront scotcher sur leur siège. «La tour de contrôle m'a empêché de décoller et ce jusqu'à ce que sa Majesté le Roi du Maroc ne finisse de se reposer au salon d'honneur de l'Aéroport» se moque-t-il, rappelle le site emarrakech.info. «Le pilote a ajouté que tous les passagers qui voulaient se plaindre des 20 minutes de retard devraient réclamer des dommages et intérêts en envoyant leur demande au palais royal de Rabat. Des mots qu'il répète en anglais en plus», se consterne Abderrahmane. «Il a certainement cru qu'il n'y avait que des passagers étrangers dans l'avion ou que nous étions des analphabètes qu'on peut injurier facilement, sans qu'on puisse nous défendre», lâche-t-il. Abus de pouvoir Néanmoins, comme le dit le proverbe, la vengeance est un plat qui se mange froid. Abderrahmane et les autres passagers marocains décident de ne pas réagir sur le coup. «Vous savez un commandant de bord a beaucoup de pouvoir dans son avion. Si on avait réagi, il aurait pu nous faire descendre de l'avion, nous accuser de vouloir troubler la tranquillité des passagers ou même, pire, nous accuser de terrorisme. Même en France, l'atteinte à l'image d'un chef d'état est punie par la loi !», s'exclame-t-il. L'avion finit par décoller. Commence pour Abderrahmane trois longues heures interminables où la pilule a du mal à passer. Choqué et blessé dans son amour propre, il ne comprend pas comment un pilote d'avion peut abuser de son pouvoir et se permettre de lancer des moqueries gratuites à l'égard du souverain. Il ne mange pas le repas qui lui est servi par l'hôtesse et ressasse les déclarations du pilote. Une plainte déposée Puis, l'avion atterrit enfin à Paris. Là, une dizaine de passagers marocains se regroupent à l'aéroport et écrivent ensemble une lettre de protestation qu'ils envoient à la direction d'Air France. Le PDG de la compagnie française présente ses excuses aux passagers vexés par la boutade du pilote. Néanmoins, ses excuses ne suffisent pas à calmer la colère des passagers marocains. «Ses excuses sont insuffisantes pour nous dans la mesure où nous considérons que par cette moquerie, c'est toute le peuple marocain qui a été visé. Nous réclamons donc des dommages et intérêts mais ce qu'on demande c'est qu'Air France participe financièrement à un projet de l'INDH pour rétablir l'image du Maroc, notamment à Angfou, village pauvre et isolé de l'Atlas, en construisant quelques maisons robustes, un projet qui ne représente que quelques gouttes dans le budget de la compagnie», explique-t-il. Une plainte a été également déposée à Paris contre Air France. Si les passagers marocains n'ont pas ce qu'ils demandent, ils prévoient de lancer un appel à boycotter la compagnie française. Quand au commandant de bord, il devra passer devant une commission de discipline de la compagnie pour s'expliquer. De son côté, Abderrahmane Mekkaoui promet, lui, d'entreprendre ses prochains voyages à bord de la RAM…