Depuis le 7 octobre dernier, certaines chaînes de télévision en France ont été épinglées pour avoir relayé des propos tombant sous le coup de l'incitation à la haine, dans le contexte de la guerre en cours à Gaza. Le CFCM a déploré que les premiers visés soient les civils palestiniens, sur le front comme dans les plateaux d'émissions d'information. En 80 jours de siège sur la bande de Gaza par Israël, la guerre a été accompagnée de «l'une des pires opérations de déshumanisation que l'histoire ait connues» à travers les médias en France, a déploré le Conseil français du culte musulman (CFCM). Dans un communiqué publié mercredi 27 décembre, l'instance a rappelé que la population palestinienne était taxée de servir de boucliers humains pour le Hamas. Les Palestiniens sont également «désignés comme étant tous des terroristes, y compris les enfants et les bébés». «Pour justifier la détention arbitraire d'enfants palestiniens dans les prisons israéliennes», Boaz Bismuth, franco-israélien et membre de la Knesset, a ainsi réitéré à trois reprises sur la chaîne française Cnews «qu'à Gaza, le terroriste le plus jeune, que je sache, il a dix mois, dix mois !», indique le CFCM. Sur cette chaîne aussi, l'avocate franco-israélienne Nili Naouri a justifié les assassinats répétés visant des enfants à Gaza. «Dès la naissance, ils apprennent à tuer du juif. La population civile n'est pas innocente», a-t-elle souligné. Une autre franco-israélienne déclare sur la chaîne i24News émettant en France que «les politiques doivent accepter d'appuyer sur le 'boum' (bouton de l'arme nucléaire). Nous sommes un pays avec une bombe atomique…. Personne ne doit habiter cette terre si ce n'est pas le peuple juif». Sur la même chaine, un franco-israélien, David Antonelli, a déclaré : «Je me fiche éperdument des deux millions de Gazaouis… Ceux qui font la distinction entre la population et le Hamas, ils oublient quelque chose, ils sont tous biberonnés par la même haine du juif.» Reprenant ces termes, le CFCM a exprimé sa condamnation de propos «qui font l'apologie de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité, de génocide ou de nettoyage ethnique». Par ailleurs, il a fait part de son incompréhension sur «comment ces propos ont pu être tenus en toute impunité par des Français, sur des médias français». Par ailleurs, le conseil a rappelé que certains politiques «ont demandé de déchoir de leur nationalité des concitoyens pour avoir manifesté leur soutien aux populations civiles palestiniennes». France : La justice saisie des propos d'Arno Klarsfeld sur les musulmans ayant «accès aux explosifs» Les médias français déjà épinglés pour déséquilibre de traitement Dans ce sens, le CFCM a salué «l'attitude de l'immense majorité» de ses concitoyens français, qui «n'ont jamais confondu les auteurs de ces propos avec l'ensemble [des] compatriotes de confession juive et de nombreux israéliens et juifs du monde épris de paix et de justice, également meurtris par la tragédie que vivent toutes les populations d'Israël et de Palestine». «Alors que les responsables israéliens viennent d'appeler à intensifier la violence et les massacres, le CFCM appelle à intensifier la mobilisation pour la préservation de la vie et de la dignité humaine», a souligné le communiqué. Dans ce même sens, le CFCM insiste que «tout doit être entrepris pour obtenir un cessez-le-feu immédiat, l'approvisionnement des populations civiles en eau, en nourriture et médicaments, une libération immédiate de tous les otages innocents et l'instauration d'une paix juste et durable, conformément aux résolutions des Nations unies». Il ne s'agit pas en effet du premier appel du CFCM aux médias de l'Hexagone, quant à la couverture de la guerre à Gaza. Après des signalements en masse concernant des propos tenus lors de programmes consacrés au sujet, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) a été interpellée par le CFCM, en novembre dernier. Dans une lettre ouverte, le Conseil a rappelé à l'institution son rôle à veiller à ce que les médias en France «assument pleinement leur rôle d'information et de communication, dans le respect de la pluralité des opinions et de l'égale dignité de tous». Dans ce sens, «les médias ne doivent pas participer à la déshumanisation du peuple palestinien», à travers ce que le CFCM a pointé comme un «traitement médiatique injuste et indigne». Au vu des pics de signalements ayant déjà pointé divers propos tenus sur les chaînes de télévision, tombant sous le coup de l'incitation à la haine, l'Arcom a réuni, le 7 novembre dernier, l'ensemble des chaînes télévisées et des stations de radio, publiques et privées. L'instance a assuré qu'il s'agissait plutôt d'un «un moment informel», mais cette rencontre tenue à huis clos a bien été consacrée au traitement médiatique et à la couverture du conflit au Moyen-Orient. Cette réunion a connu la participation des patrons de l'information des principaux médias, «après un afflux de saisines reçues» les derniers jours.