Plus d'une semaine après des signalements en masse concernant des propos tenus lors de programmes consacrés à la guerre à Gaza, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) a cette fois-ci été interpellée par le Conseil français du culte musulman (CFCM). Dans une lettre ouverte, ce dernier rappelle à l'institution son rôle à veiller à ce que les médias en France «assument pleinement leur rôle d'information et de communication, dans le respect de la pluralité des opinions et de l'égale dignité de tous». Dans ce sens, «les médias ne doivent pas participer à la déshumanisation du peuple palestinien», à travers ce que le CFCM a pointé comme un «traitement médiatique injuste et indigne». L'instance a souligné notamment le deux poids, deux mesures constaté dans le discours de chaînes de télévision et de radio, dans leur suivi de la guerre en cours dans la bande de Gaza, en état de siège depuis 43 jours par Israël, et ce par rapport au traitement consacré aux morts ou aux otages du côté israélien. Dans ce sens, le CFCIM a mis en avant la nécessité de rappeler aux médias que «toutes les vies se valent et que personne ne doit oublier que dans l'histoire, la déshumanisation d'un peuple a toujours été un préalable à la justification des pires atrocités envers lui et ce, dans l'indifférence générale». «La majorité des images transmises dans nos médias et tendant à illustrer les souffrances palestiniennes se résument à des plans aériens de bâtiments détruits à Gaza. Comme si cette souffrance se limitait à des "pertes matérielles". Comme si ce territoire assiégé et rasé n'était pas aussi porteur de vies et d'histoires humaines à partager», a ajouté le Conseil. Ce dernier déplore ainsi le fait que «les visages des victimes palestiniennes ont été rendus quasiment invisibles» dans les médias en France, alors que le nombre de morts dans la bande de Gaza uniquement a dépassé les 10 000, depuis le 7 octobre. «Aucun portrait de femmes, ni d'enfants avec leurs histoires personnelles n'a été présenté. Leur nom, prénom, identité, n'ont pas fait l'objet de sujet approfondis ni même simplement été retranscris», a ajouté le CFCM. Ce traitement médiatique a d'ailleurs réduit les civils palestiniens à des «boucliers humains», une métaphore «répétée sans cesse» et porteuse d'un «message autrement plus scandaleux». «Les Palestiniens sont donc d'abord définis par un objet de guerre avant d'être des humains. Un bouclier n'a ni nom, ni prénom, ni identité. Un bouclier n'a ni parents, ni enfants, ni proches. Un bouclier ne ressent aucune douleur et n'est donc pas sujet de compassion», insiste le CFCM. Dans les médias en France, cette déshumanisation «rend toute une classe d'hommes et de femmes politiques et intellectuels insensibles aux massacres et aux atrocités dont les palestiniens sont victimes», sous le motif qu'«Israël a le droit de se défendre», souligne encore le CFCM. A ce titre, le Conseil a rappelé que les chiffres de morts affichés cachaient «l'énorme drame humain de ceux qui survivent aux massacres : orphelins, enfants estropiés et amputés sans anesthésie, et surtout le choc post-traumatique que vivront toute leur vie, sans aucun accompagnement, la quasi totalité des civils palestiniens». Au vu des pics de signalements pointant divers propos tenus sur les chaînes de télévision, tombant sous le coup de l'incitation à la haine, l'Arcom a réunir, le 7 novembre, l'ensemble des chaînes télévisées et des stations de radio, publiques et privées. Si l'instance assure qu'il s'agit d'un «un moment informel», cette rencontre tenue à huis clos a bien été consacrée au traitement médiatique et à la couverture du conflit au Moyen-Orient. Cette réunion a connu la participation des patrons de l'information des principaux médias, «après un afflux de saisines reçues» les derniers jours.