Depuis le début des bombardements israéliens à Gaza, les évènements dédiés aux juifs marocains disparaissent des programmations culturelles au Maroc. Après l'interdiction du film les Juifs de Tinghir de Kamal Hachkar à Agadir, c'est aujourd'hui un colloque dédié à l'histoire des juifs marocains qui a été annulé à l'université Al Akhawayn à Ifrane. Les organisateurs parlent seulement d'un report. De leur côté, certains intervenants parlent, quant à eux, d'auto-censure. Au lendemain des manifestations à Casablanca et à Rabat en solidarité avec le peuple palestinien qui ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes, Yabiladi a appris ce matin l'annulation du colloque sur le thème de l'héritage et l'histoire de la communauté juive-marocaine censé avoir lieu du 2 au 4 décembre prochain à l'Université d'Al Akhawayn à Ifrane. Durant deux jours, des spécialistes et des universitaires du Maroc, d'Israël, des Etats-Unis, de France, d'Italie et d'Espagne devaient mener des conférences sur différents thèmes concernant les juifs marocains. Après un film, c'est tout un colloque qui est déprogrammé L'annulation de ce colloque intervient également quelques jours après l'interdiction de la projection du documentaire des Juifs de Tinghir de Kamal Hachkar dans la ville d'Agadir. «Je pense que mon documentaire dérange certains panarabistes et islamistes qui s'opposent à l'identité plurielle du Maroc.» avait déclaré le cinéaste dans une interview donnée à Yabiladi. «Le colloque n'est pas annulé, on l'a simplement reporté !», souligne l'un des membres du comité organisateur à l'Université d'Al Akhawayn qui a souhaité conserver l'anonymat, précisant qu'aucune nouvelle date n'avait été encore décidée. L'occasion de lui demander quelles sont les vraies raisons qui ont fait que cet évènement ait pu être «reporté». «La raison est simple. Nous avons eu un nombre de désistements de la part des participants du colloque à la dernière minute, et ce à l'intérieur comme à l'extérieur du Maroc. Ce qui fait qu'au final, l'équilibre des plannings des conférences n'était plus le même. », poursuit notre contact. Il explique par exemple que l'intervenante Mitchell Serels de Berkeley College aux Etats-Unis pour animer une conférence sur les juifs de Tanger durant l'occupation espagnole a annulé sa participation, que Jane S. Gerber de New York censée mener une conférence sur les juifs de la ville de Fès est tombée malade et qu'enfin un autre intervenant de New York a annulé sa participation car sa maison a été touchée par la tempête Sandy. Au total, 5 participants ont annulé leur participation au colloque. «Concours de circonstance» Yabiladi a également voulu savoir si l'Université Al Akhawayn avait reçu quelconques pressions de la part du gouvernement ou d'associations marocaines en soutien au peuple palestinien pour annuler ce colloque. «Non» répond notre source. «Pas du tout. Le Président de l'Université Al Akhawayn nous a même affirmé qu'il n'avait reçu aucune pression. Ce qui arrive, on ne l'a pas voulu. Le report de la conférence n'a aucun rapport avec la situation actuelle à Gaza. C'est un concours de circonstance.», poursuit-il insistant à dire que ce colloque avait été au départ organisé à la mémoire de Simon Lévy, un Marocain homme de paix avant tout qui n'hésitait pas à prendre part aux manifestations en soutien au peuple palestinien. Autocensure ? Malgré les explications données par l'Université Al Akhawayn, 4 des participants qui n'ont pas souhaité s'identifier, sont persuadés, eux, que l'annulation de ce colloque n'a rien à voir avec des désistements mais que les raisons sont avant tout politiques. «C'est probablement dû aussi à une auto censure des dirigeants de l'université.», lance l'un de ces participants soulignant que cette annulation est contradictoire aux relations qu'entretiennent les gouvernements marocain et israélien entre eux.