Dans une nouvelle étude, des chercheurs ont appelé à reclasser le chat des sables comme espèce «quasi-menacée» en démontrant que ses domaines vitaux sont «nettement plus vastes». Ils reviennent, par ailleurs, sur de nouveaux aspects caractérisant ces félins découverts au Maroc. Après une première révélation, en 2017, sur les chats des sables au Sahara marocain, l'équipe de Panthera France est revenue avec une nouvelle étude sur cette espèce. Publiée dans le Journal of Arid Environments, elle est élaborée par Dr Alexander Sliwa du zoo de Cologne, Saad Azizi et Mahmoud Zine Eddine du zoo de Rabat et Grégory Breton de Panthera France. L'étude fournit le plus grand ensemble de données jamais enregistré sur le domaine vital de ces félins. L'étude rappelle que Felis margarita est une petite espèce de félin qui reste «la mieux adaptée aux habitats désertiques». Sa présence a été documentée dans 24 pays, de l'Afrique du Nord à l'Asie centrale et du sud-ouest en passant par le Moyen-Orient, mais elle n'a pas été signalée dans quatre d'entre eux depuis 2000. «Sa répartition reste mal connue, limitée à des zones de présence disjointes», ajoute-t-on. Récemment, la taxonomie de l'espèce a été réexaminée, suggérant seulement deux sous-espèces, F. m. margarita en Afrique et F. m. thinobius en Asie, en raison du peu de justification génétique pour la différenciation des formes du Moyen-Orient, de l'Asie centrale et de l'Asie du Sud en tant que sous-espèces distinctes précédemment décrites. Des félins «tolérants les uns envers les autres et probablement non-territoriaux» La même source note qu'il existe «peu d'études écologiques et comportementales sur le chat des sables dans son aire de répartition naturelle». «Jusqu'à présent, seules des estimations incomplètes de la taille du domaine vital existent à partir de quelques spécimens munis de colliers émetteurs», ajoute-t-on, alors que d'autres informations sur les déplacements saisonniers, le régime alimentaire et l'activité de chasse, le comportement social et reproductif, les menaces et la prédation sont soit «absentes soit, au mieux, rares». Les experts indiquent que les données sur les chats des sables africains Felis margarita ont été collectées dans le Sahara marocain, entre Dakhla et Aousserd, entre décembre 2015 et décembre 2019. Au cours de ces quatre années, un total de 47 chats des sables ont été observés, 41 ont été capturés et 22 ont été équipés de colliers radio VHF et suivis sur différentes périodes. Des estimations de la taille du domaine vital ont ainsi été calculées pour 10 chats des sables adultes avec plus de 30 fixations indépendantes. Il en ressort ainsi que ces félins restent «tolérants les uns envers les autres et probablement non-territoriaux», indiquent les rédacteurs de l'étude, en se basant sur l'analyse et l'observation des 41 chats capturés et qui ne présentaient aucune blessure, très peu de cicatrices et aucune dent cassée. «Notre compréhension de leur écologie reste cependant limitée et leur organisation sociale et leur mode d'accouplement presque inconnus. D'importantes recherches futures devraient se concentrer sur le régime alimentaire, l'organisation sociale sous-jacente et la parenté des chats des sables, en relation avec les conditions environnementales et les facteurs anthropogéniques», ajoutent-ils. Une espèce qui doit être considérée comme «menacée» Dans un article sur le site de Panthera, Grégory Breton explique, concernant le domaine vital de l'espèce, que «cela est probablement dû aux conditions écologiques». «Lorsque la végétation (y compris les proies) est relativement abondante et que l'habitat est ininterrompu, les chats des sables peuvent prospérer dans des domaines vitaux plus petits», déclare-t-il. «Cependant, lorsque la végétation et les populations de rongeurs s'effondrent en raison des conditions météorologiques et/ou lorsqu'elles sont dérangées par les activités humaines, le bétail ou d'autres carnivores habitant un paysage, les chats des sables peuvent s'aventurer très loin et augmenter leur aire de répartition. Certains de nos résultats nous amènent même à penser que cette espèce pourrait être semi-nomade, ce qui n'a jamais été signalé pour aucun félin sauvage.» Grégory Breton Pour la conservation de l'espèce, les chercheurs appellent à reclasser le chat des sables comme espèce «quasi-menacée», rappelant que les chats des sables étaient classés comme tels, avant d'être placés dans la catégorie des espèces avec «préoccupation mineure» dans la liste de l'UICN. «Les chats des sables sont classés comme Préoccupation mineure par l'UICN. Cependant, cela suppose qu'ils sont présents de manière égale dans l'habitat désertique et maintiennent des domaines vitaux plus petits que ne le révèle notre étude. Si les domaines vitaux sont effectivement plus grands et qu'ils n'occupent que certaines parties du désert, comme le suggère notre étude, ils pourraient raisonnablement être reclassés comme quasi menacés, ce qui nous obligerait à redoubler nos efforts de conservation», plaide Grégory Breton. «Il y a encore tant à apprendre sur les chats des sables. Avec l'avenir vient plus d'occasions de comprendre la taille de leur domaine vital et le nouveau territoire que nous laissons encore inexploré. Pour l'instant, je continuerai à partager des vidéos et des photos de ce chat charismatique. Pour leur conservation, ils en ont besoin», conclut-il.