«Rendre les médicaments plus accessibles». C'est le titre du dernier rapport établi par le cabinet londonien Oxford Business Group sur la situation du marché pharmaceutique au Maroc. Selon ses analystes, les prix élevés des médicaments bloquent toujours l'accès aux médicaments ou du moins le rend plus difficile. Les pharmaciens, eux, n'entendent pas les choses de la même oreille. Dans son rapport intitulé «Maroc : Rendre les médicaments plus accessibles», Oxford Business Group (OBG) tire la sonnette d'alarme. Rendue publique le 25 octobre dernier, l'analyse livrée par le cabinet international d'intelligence économique, basé à Londres, pointe, en effet, les prix des médicaments jugés encore trop chers par rapport au pouvoir d'achat du consommateur marocain. Une tarification trop chère «La consommation est de 24 euros par an et par personne au Maroc et de 41 euros en Tunisie soit une différence de 70%», a indiqué à OBG Patrice Fuster, directeur général du groupe pharmaceutique Sanofi Aventis Maroc. A l'échelle mondiale, la dépense annuelle par citoyen s'élève à 98 euros, selon OBG, soit un peu plus de 1000 dirhams. Pour le cabinet londonien, le faible niveau de consommation du citoyen marocain est «en partie» dû à «la tarification des médicaments, dont le prix de vente au détail est une préoccupation constante pour les clients». Mais pour faciliter l'accès aux médicaments, le gouvernement marocain doit faire face à «une réalité à deux vitesses», souligne le quotidien Les Echos. Avant de prendre les mesures adéquates pour faire baisser les prix des médicaments, le gouvernement doit, en effet, trouver un compromis avec les fabricants qui, eux, ne voient pas les choses du même œil. A commencer par la Fédération nationale des syndicats des pharmaciens (FNSP) qui représente l'ensemble de la profession au Maroc. Les pharmaciens inquiets Pour les pharmaciens marocains, les prix des médicaments ne sont pas du tout élevés au royaume, «sauf pour les molécules innovantes». «Aujourd'hui, tous les médicaments commercialisés ont en moyenne 15 à 20 génériques qui sont vendus à un prix inférieur à 50 dirhams. Pourquoi alors parler de cherté du médicament, alors que les génériques représentent plus de 35% du marché pharmaceutique. Ils sont donc accessibles», explique Oualid Aamri, président de la FNSP, contacté par La Vie Eco. «Ce n'est pas la baisse qui va améliorer l'accessibilité aux médicaments mais plutôt l'extension, par exemple, de la couverture médicale qui reste le principal frein à un large accès aux soins», assure-t-il. Le laboratoire danois Novo Nordisk est également du même avis. «L'industrie pharmaceutique a fait des propositions de réformes concernant la structure des prix mais celles-ci ne seront efficaces que si d'autres changements sont réalisés, notamment au niveau de l'organisation des canaux de distribution», a déclaré son directeur général au Maroc Eric Reurts, cité par le rapport. Le gouvernement marocain en «équilibriste» «C'est un véritable exercice d'équilibriste auquel se livre actuellement le secteur pharmaceutique marocain, qui tente à la fois d'améliorer l'accès aux médicaments tout en tenant compte des inquiétudes des fabricants et des pharmaciens face au recouvrement des coûts», conclut Oxford Business Group dans son rapport. Et d'ajouter : «La production locale joue un rôle essentiel dans la satisfaction de la demande intérieure mais le marché s'est longtemps montré préoccupé par les prix des produits de marque, entrainant de la part du gouvernement une augmentation de la distribution des médicaments génériques et une politique de baisse des prix pour l'utilisateur final». En tout cas, le gouvernement a entamé récemment des négociations avec les associations et syndicats du secteur, et les laboratoires pharmaceutiques. Le but étant «de parvenir à une nouvelle série de réduction des prix d'ici la fin décembre 2012, ce qui permettrait de faire baisser le prix de tous les médicaments de 30% à 60%», explique la même source. Cette baisse, devant concerner au total quelques 400 médicaments, le ministre de la Santé El Hossein El Ouardi l'avait annoncé en juillet dernier pour une entrée en vigueur prévue dès le 1e décembre 2012. Aujourd'hui, cette date semble avoir été repoussée à janvier 2013.