Camara Laye, coordinateur du Conseil des Migrants Subsahariens au Maroc, a été interpelé samedi. Il est le troisième responsable associatif, en l'espace de quelque mois, à avoir été arrêté dans le cadre de ses actions militantes. Le juge a refusé, hier, de remettre en liberté conditionnelle Camara Laye, coordinateur du Conseil des Migrants Subsahariens au Maroc (CMSM), poursuivit pour vente d'alcool et de cigarettes sans autorisation. La première audience de son procès a eu lieu, mardi 23 octobre au tribunal correctionnel de première instance de Rabat. «La pression sur les défenseurs des droits des migrants et les leaders communautaires subsahariens a fortement augmenté depuis la rentrée», souligne Stéphane Julinet, chargé de programme droits des étrangers et plaidoyers, pour le Groupe antiraciste d'accompagnement et de défense des étrangers et migrants (GADEM). Camara Laye a été arrêté, dans la nuit du samedi au dimanche 21 octobre, par la police. «Il a fallu attendre la première audience du procès, hier, pour savoir ce qu'on lui reprochait. C'est évidemment une affaire montée de toutes pièces pour justifier les poursuites», estime Stéphane Julinet, car aucune preuve n'a été saisie lors de la fouille de l'appartement de Camara Laye. Le secrétaire général du CMCM n'est pas le premier militant des droits des migrants à avoir été interpelés ces derniers mois pour son activisme. 3 arrestations de responsables associatifs La veille, le 19 octobre, le secrétaire général de l'ALECMA, Pascal Mpélé, a été également interpelé. Quelques jours plus tôt, «un foyer réunissant des membres de l'ALCEMA [association de migrants fondés en mai 2012, ndlr] a été fouillé par une bande de jeunes non identifiés. La police est intervenue, mais au lieu de défendre les habitants des lieux, elle en a rajouté et a embarqué 3 migrants», indique Stéphane Julinet. «Depuis son arrestation, vendredi, nous n'avons plus aucune nouvelle de Pascal Mpélé, rapporte Eric William, l'un des membres de l'ALECMA ; nous savons seulement qu'il a été refoulé à la frontière.» Auparavant, le 10 juin, Marcel Amiyeto, réfugié congolais de RDC, a été interpelé par la police, lors d'une manifestation, à Rabat, intitulée «la marche de la colère». «Je m'apprêtais à faire un discours à la tribune quand 4 hommes en civil m'ont demandé de les suivre», se rappelle M. Anieto. Arrivés au commissariat, les policiers lui expliquent qu'ils veulent simplement vérifier que c'est bien lui qui a incité une quinzaine de personnes, arrêtées au même moment, à se rendre à la manifestation. «J'ai reconnu que c'était bien moi ; à ce moment là il était 10h30, mon interrogatoire a duré jusqu'à 17h, raconte Marcel Anieto. Objectif : tout savoir de ses activités syndicales. «Au final, j'ai accepté de signer une déclaration où je renonçais à militer car la loi ne me permettait pas de le faire, en échange de la libération des 15 autres personnes interpelées», explique Marcel Anieto. Peine perdue, le 1er juillet, le militant congolais est devenu le premier secrétaire général de la section «travailleurs immigrés» de l'ODT. «Depuis mon arrestation je reçois régulièrement des appels de la police qui me rappelle ce que j'ai signé et m'interdit de militer, mais je reste serein parce que je sais que je ne fais rien d'illégal», conclut le secrétaire général de l'ODT-travailleurs immigrés. Soutien algérien En réaction à ces arrestations des militants des droits des migrants, le GADEM a publié, hier, mardi 23 octobre, un communiqué de soutien cosigné par de nombreuses associations marocaines et étrangères. «Les organisations exigent la libération du coordinateur du Conseil des migrants subsahariens au Maroc et l'abandon des poursuites engagées contre lui. Elles dénoncent la répression ciblée qui s'abat sur les responsables des organisations de migrants au Maroc depuis quelques jours», indique le communiqué. «Dépourvus de toute aide, ni des institutions des deux pays ni d'associations ou ONG internationales du côté algérien, les migrants prisonniers de cette bande frontalière, vont perdre une aide précieuse, celle du soutien des ONG marocaines qui militent de plus en plus pour leurs droits, suite à la répression qui s'abat sur les défenseurs des migrants », accuse, de l'autre côté de la frontière algéro-marocaine, Fouad Hassam, président du SNAPAP en charge du dossier migration.