A quelques jours de l'organisation du 16ème congrès du Front Polisario, Bachir Dkhil et Mohamed Salem Abdelfattah restent unanimes quant au fait que l'Algérie a le dernier mot dans la désignation d'un chef du front séparatiste. Pour la première fois depuis sa création, le Front Polisario peine à trouver un candidat unique pour assumer sa direction au cours des quatre prochaines années, à quelques jours seulement de l'organisation du 16ème congrès, prévu du 13 au 17 janvier. Alors que Brahim Ghali s'accroche à son poste, d'autres dirigeants du mouvement séparatiste cherchent à l'écarter de ses fonctions, notamment au vu de son échec dans sa «guerre» qu'il a déclarée le 13 novembre 2020 contre le Maroc. Commentant les querelles des dirigeants du Polisario, Bachir Dkhil, l'un des fondateurs du front séparatiste, rappelle le «deuxième congrès» du Front de 1974 et qui a été «décisif» et qui a élu El-Ouali Moustapha Sayed en tant que secrétaire général. «Depuis, l'Algérie interférait pour utiliser le Polisario pour ses propres intérêts», ajoute-t-il. «Malgré l'organisation de congrès, le secrétaire général est toujours été désigné par l'Algérie. La position algérienne sera toujours décisive alors que le Polisario n'a pas la capacité de changer le fonctionnaire algérien qui est à sa tête.» Bachir Dkhil Il a souligné que «l'Algérie utilise toujours ses loyalistes ; ceux ayant organisé le coup d'Etat contre le Polisario original et le coup d'Etat contre El-Ouali Moustapha Sayed, tué en Mauritanie en 1976». «Malgré les différends que nous entendons, la situation restera telle qu'elle est et le dernier mot reviendra à l'Algérie», conclut Bachir Dkhil. Des désaccords autour des «postes» générant «des profits et de la richesse» Pour sa part, Mohamed Salem Abdelfattah, un Sahraoui qui s'est rendu dans les camps de Tindouf en 2004 après avoir été convaincu de la thèse du Polisario et travaillé dans ses médias, avant de décider de rentrer au Maroc en 2015, pointe l'état de division au sein du mouvement séparatiste. «L'escalade des différends après le dernier meeting du Polisario traduit l'état de division interne dans lequel vit le mouvement, surtout à l'approche de la date du congrès et les conflits autour du successeur de Brahim Ghali», nous déclare-t-il. Il rappelle aussi «le vide dans lequel vit la direction du front séparatiste, à la lumière de l'expiration de la carte Ghali, depuis la découverte de son transfert en urgence vers l'Espagne pour y être soigné et les poursuites engagées contre lui par la justice espagnole, qui comprennent des accusations très lourdes liées à son implication dans des affaires d'enlèvements, de disparitions forcées, de viol et de torture». «Ce qui approfondit également les divergences, c'est que même ses rivaux ne font pas l'affaire, compte tenu de leur implication dans le passé des graves violations commises par le Polisario, en plus des répercussions de la guerre des clans au sein du régime algérien sur le front, à la lumière de l'association de nombreux éléments dirigeants avec les différentes agences de sécurité et militaires algériens.» Mohamed Salem Abdelfattah Pour notre interlocuteur, «le facteur décisif au final, dans cette lutte pour diriger le Polisario, reste la position des services de sécurité et militaires algériens qui font confiance aux éléments qui leur sont affiliés, ou qui ont des soutiens à l'intérieur de l'Algérie». Des éléments qui «forment la cellule restreinte contrôlant le Polisario». Il ajoute que «les désaccords s'intensifient principalement, sur les postes de direction qui génèrent des profits et de la richesse et qui sont liés à la gestion des magasins d'armes, des lignes d'approvisionnement militaires, des magasins d'aide humanitaire et des pharmacies». «Ces sites génèrent d'énormes profits pour ceux qui en sont en charge, dans le cadre de l'intersection d'agendas avec des groupes armés et des gangs du crime organisé. Les aides humanitaires et les armes sont ainsi acheminées en contrebande vers les zones du Sahel et du Sahara, où l'emprise des gouvernements centraux fait défaut et où les groupes armés se propagent», conclut-il.