Depuis samedi dans la nuit, les membres de la Marine royale cherchent le corps d'un jeune yéménite mort en mer. Il aurait été violemment frappé par des agents de la Guardia civil et rejeté en mer, dès son arrivée près de la digue de Melilla depuis Beni Ensar. Lors de son retour à la nage, il n'a pu être sauvé, malgré les tentatives de son ami qui a survécu. A Nador, l'Association marocaine des droits humains (AMDH) ne décolère pas, depuis un drame survenu en mer dans la nuit de samedi. Jusqu'à mercredi 24 novembre, l'ONG, les amis d'un jeune yéménite mort noyé dans les eaux frontalières et les autorités locales restent sans nouvelles de la dépouille, encore introuvable en mer. L'organisation a rendu publics les faits, indiquant que la victime était accompagnée d'un deuxième concitoyen, dans une tentative de rejoindre Melilla à la nage. Mais tombés dans les mains de la Guarida civil, ils auraient été violentés et rejetés dans l'eau par trois agents espagnols. «Samedi 20 novembre vers 20 heures, deux ressortissants yéménites se sont rendus à Beni Ensar. Habillés de combinaisons de plongée et munis de palmes ainsi que de gilets de sauvetage, ils ont décidé de rejoindre Melilla à la nage», raconte à Yabiladi Omar Naji, membre de l'AMDH-Nador, chargé du dossier migration et asile. Après avoir traversé la digue principale de l'enclave, les deux jeunes auraient été interceptés par une embarcation de la Guardia civil, avec trois membres à bord. Ces derniers les auraient arrêtés, «pris à bord et roués de coups partout sur leur corps». Selon le militant qui relaye le témoignage du survivant, «leurs combinaisons leur ont été enlevées de force, leurs palmes et leurs gilets ont été confisqués, puis ils ont été rejetés vers la mer en pleine nuit et dans le froid pour rebrousser chemin». «Vu leur état après l'agression physique, les deux jeunes ont eu de grandes difficultés à rallier les côtes marocaines et en cours de chemin, l'un n'a pas pu tenir et son ami l'a vu se noyer, sans pouvoir le sauver», a encore déclaré Omar Naji. Deux migrants «torturés et condamnés à mourir en mer» Recueilli par la police marocaine, «le survivant a été relâché après un procès-verbal, il s'est rendu à l'hôpital où il a été examiné, certificat à l'appui, puis s'est tourné vers la section locale de l'AMDH pour faire part de son témoignage», rapporte Omar Naji. L'associatif ne cache pas son désarroi, son incompréhension et sa colère. «Sur toutes les années d'expérience sur le terrain en nous intéressant à la question des migrants, c'est la première fois qu'un tel cas de violence se présente. Nous le considérons comme un cas de torture sans précédent de la part de la Guardia civil au niveau des eaux de Melilla», a-t-il dénoncé. «Quand bien même des agents espagnols décident de renvoyer des personnes arrivées à la nage, nous ne voyons aucune raison justifiant que les jeunes soient sauvagement battus, défaits de leurs combinaisons, de leur matériel de plongée, puis rejetés à l'eau. On ne peut y avoir qu'une volonté délibérée de les envoyer à une mort certaine.» Omar Naji «Nous avons été tellement choqués par ce récit, que nous avons procédé à des vérifications. Les faits rapportés sont conformes à ce que nous avons dévouvert lors de nos investigations», affirme l'associatif. Et d'ajouter : «Hier encore, nous nous sommes rendus nous-mêmes auprès de la Marine royale marocaine pour en savoir plus sur les recherches du corps du défunt. Des agents nous ont confirmé que les riverains leur ont signalé un décès en mer par noyade, samedi dans la nuit, mais jusqu'à ce jour, la dépouille n'a pas été retrouvée, au vu des conditions météorologiques, des courants maritimes et des vents». Pour Omar Naji, ce «drame et cette torture sans précédent font redouter davantage les interventions des forces spéciales relevant de la Guardia civil en mer». Le militant précise par ailleurs que «deux des trois agents que le survivant met en cause étaient cagoulés». «De plus, les deux victimes n'ont cessé de déclarer qu'ils étaient du Yémen. Normalement, les autorités espagnoles accueillent les ressortissants de ce pays dans l'enclave, le temps qu'ils introduisent leur demande d'asile», souligne-t-il, regrettant que «ce qui s'est passé est inhumain à tous les niveaux».