L'enseignement public continue d'être le pôle principal pour l'éducation dès le jeune âge, mais de plus en plus de parents se tournent vers le privé. Cependant, l'évolution du secteur payant n'a pas été accompagnées par un système de régulation, particulièrement en termes de définition des responsabilités des établissements envers les apprenants. Le Conseil de la concurrence a récemment rendu un avis sur le système de l'enseignement privé au Maroc, où il fait état de «différences notables» en termes de qualité de prestations proposées par les établissements payants. Ce point fait partie d'un ensemble de remarques relevées par l'instance, qui a observé un manque de régulation protégeant les droits constitutionnels des apprenants à bénéficier d'une «éducation moderne, accessible et de qualité». Cette situation, pour le Conseil de la concurrence, questionne même sur «les missions de l'Etat en termes de conciliation entre l'encouragement de la diversification des offres d'enseignement scolaire et l'unification du contenu du service public d'enseignement nécessaire à la réduction des disparités sociales». Dans ce sens, l'institution a recommandé que l'Etat encadre le marché par des «normes garantissant la qualité des services tout en veillant à la répartition équitable et convenable des compétences du corps enseignant entre les différentes composantes du système éducatif, et à établir une organisation permettant aux ménages de choisir le mode d'éducation idoine pour leurs enfants». Un système privé perçu comme concurrent du public L'avis du CC a noté que des parties intervenant dans le marché de l'enseignement scolaire privé ont soutenu la fixation par l'Etat des tarifs d'accès à ces établissements, au vu du caractère de service public rendu par des institutions privées, afin de garantir un accès équitable, «sans focalisation sur l'objectif lucratif». Or, le Conseil a considéré que «la liberté de fixer les prix ou les frais de services de l'enseignement scolaire privé, et les soumettre à la logique de l'offre et de la demande demeurent un pilier fondamental pour garantir la concurrence sur le marché concerné et assurer son bon fonctionnement». Actuellement, les reproches persistent à l'égard des établissements scolaires privés, «perçus comme des concurrents de l'école publique, bénéficiant de soutien de l'Etat, perpétuant les inégalités sociales, et surchargeant les familles ayant fait le choix de ce type d'enseignement pour leurs enfants», relève le conseil, bien que la Charte nationale d'éducation et de formation considère le secteur libéral de l'enseignement comme un partenaire du public. Dans ce sens, le CC a estimé que «la mise en œuvre de cette Charte ayant concerné les diverses composantes du système de l'éducation nationale n'a pas été accompagnée par la mise en place d'un cadre contractuel ainsi que d'un plan d'action déclinant l'exécution des chantiers et des actions à entreprendre dans les délais impartis». L'importance de ce cadre demeure dans «la nécessité de doter les acteurs d'une vision claire sur les choix stratégiques, les priorités définies, et les objectifs intermédiaires ainsi que les moyens à mobiliser pour les atteindre suivant une feuille de route précisant la mise en place des mécanismes d'appui et d'accompagnement prévus, les rôles et les contributions des différentes parties prenantes, ainsi que les bases de l'évaluation des chantiers et de l'atteinte des objectifs», a encore noté l'avis. Un cadre normatif qui insiste peu sur la responsabilité des opérateurs privés Pour assurer la mise en œuvre des dispositions de la vision stratégique de réforme et de la loi-cadre n° 51.17, le conseil a ainsi préconisé de «concrétiser les dispositions de l'article 44 de ladite loi, et d'élaborer un cadre contractuel qui soit compatible avec les orientations stratégiques de promotion de ce type d'enseignement et l'accroissement de la compétitivité de ses établissements». Il recommande globalement de «recenser et identifier de manière claire les différentes mesures à prendre, qu'il s'agisse de la révision des textes législatifs et réglementaires, et mettre en place les mécanismes d'appui et d'accompagnement tout en dimensionnant les besoins de financement et identifiant les sources de financement, les partenaires et les donateurs à impliquer». Aussi, ce cadre normatif «n'a pas régi un aspect important prévu dans la charte nationale de l'éducation et la formation, qui concerne la mise en place d'un système méthodologique et transparent permettant de fixer un référentiel de qualité de l'enseignement privé», a rappelé la même source. Sur le terrain, nombre d'infractions non régies par le cadre législatif actuel ont été relevées, alors que «certaines dispositions ne sont pas entrées en vigueur, à l'image de l'article 33 de la loi 06.00 précitée stipulant la mise à disposition des établissements d'enseignement scolaire privé, dans les zones rurales et urbaines défavorisées, de locaux adaptés à ce genre d'enseignement, par les Académies régionales de l'éducation et de la formation». Des réformes législatives restent nécessaires, selon le Conseil, qui souligne que «la promulgation de la loi formant statut de l'enseignement scolaire privé et ses décrets d'application remonte au début des années 2000». Aujourd'hui, ces textes sont devenus obsolètes et «ne sont désormais plus adaptées aux besoins d'encadrement du fonctionnement des établissements scolaires privés et le renforcement de leur compétitivité», d'autant que «les prestations pédagogiques rendues et les défis qui leur sont attachés ont connu de profondes mutations», selon l'institution.