Le groupe de hackers «The Unknowns Morocco» vient de revendiquer une série de cyber-attaques contre les sites web de plusieurs médias marocains. Motivation du collectif : «frapper tous ceux qui soutiennent le dayoute Mokhtar Laghzioui». Pour rappel, la tête de ce journaliste avait été mise à prix la semaine passée par un cheikh oujdi après qu'il se soit déclaré en faveur des libertés individuelles, et notamment sexuelles. Les détails. Ils n'ont certainement pas dû bien saisir. Passer à côté du sens premier de l'initiative. Ou encore, occulter sciemment la visée du message à transmettre. De qui s'agit-il ? Des «Unkowns Morocco» («Les Inconnus Maroc»), un groupe de hackers anonymes qui vient de revendiquer, dans un communiqué envoyé cet après-midi-même à demainonline, une série de cyber-attaques synchronisées contre les sites du ministère des Habous et des affaires islamiques, du quotidien Al Ahdath Al Maghribia et de la chaîne de télévision officielle 2M. Objectif de la démarche : «frapper tous ceux qui soutiendront le 'dayoute' [ndlr. celui qui n'est pas jaloux] Mokhtar Laghzioui». «Le journaliste Mokhtar Larhizioui est un 'dayoute' et un 'dayoute' doit être tué» Petit rappel des faits : la semaine dernière, le rédacteur en chef du quotidien Al Ahdath Al Maghribia, Mokhtar Laghzioui déclare sur une chaîne satellitaire arabe être «favorable» aux libertés individuelles, notamment sexuelle, y compris lorsqu'il s'agit «de sa mère et de sa sœur». Tollé général dans les milieux conservateurs de l'islam tolérance zéro. A commencer par celui que fréquente le cheikh Adbellah Nhari. Dans son prêche du Vendredi à Oujda, l'imam déclare que le journaliste «est un dayoute» et «qu'en islam, le dayoute doit être tué». Une incitation ouverte à la violence qui entraîne aussitôt l'ouverture d'une enquête de la Cour d'Appel d'Oujda. Ce faisant, malgré la mise en branle de l'appareil judiciaire, la mèche ne peut plus être éteinte. Trop tard ! L'idée a été lancée et le groupe «The Unknowns Morocco» s'en saisit. Durant le week-end, il organise une série d'attaques ciblées et coordonnées contre les trois sites web sus-évoqués. Pourquoi s'en prendre au site du ministère des Habbous ? Au regard du déroulé des évènements, les motivations du collectif paraissent évidentes en ce qui concerne les attaques des sites de 2M, qui a pris parti pour le journaliste dans ses JT, et d'Al Ahdath Al Maghribia, dont le rédacteur en chef n'est autre que Laghzioui. Cela dit, comment expliquer le piratage du site web du ministère des Habous et des affaires islamiques qui, lui, n'a pris aucune position officielle en ce qui concerne le journaliste ? Dans son communiqué, «The Unknowns Morocco» répond : c'est «parce qu'en ne réagissant pas aux déclarations de Laghzioui, ce ministère lui apporte indirectement son soutien». Un raisonnement à la logique implacable qui, si poussé à l'extrême, n'explique pas pourquoi le collectif a épargné le site web du ministère de la Justice qui, lui, a bel et bien pris une position officielle en diligentant une enquête contre le Cheikh ? Comme les «Anonymous» ? … Hé bien, pas tout à fait. Mais qu'importe les motivations, intelligibles ou pas, du groupe. Pour le moment, «The Unknows Morocco» cherche à se faire un nom, et pour cela, est prêt à tout pour s'illustrer dans des actions d'éclat à fort retentissement médiatique. C'est que le collectif lorgne la renommée internationale de son «grand frère» européen (principalement), le collectif des Anonymous («les Anonymes»), dont il s'est probablement un tantinet inspiré pour créer son nom. Dommage que l'émulation s'en soit cantonnée à la forme d'ailleurs. Car le groupe de hackers marocains semble être passé à côté de l'essentiel : la finalité du message à transmettre. Pour leur gouverne, rappelons que la réputation des Anonymous s'est bâtie en luttant pour la liberté d'expression. Et non l'inverse.