Pris en première instance, le verdict annule les accords de pêche et d'association conclus avec le Maroc en intégrant le Sahara, sans effet immédiat en attendant un pourvoi en appel. Pour sa part, le Maroc et l'UE ont annoncé prendre «les mesures nécessaires afin d'assurer le cadre juridique qui garantisse la poursuite et la stabilité» de leurs relations commerciales. Le Tribunal de l'Union européenne (première instance) de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a publié, ce mercredi, sa décision concernant le recours du Front Polisario, visant à annuler les accords conclus entre le Maroc et l'Union européenne. Dans son verdict, le tribunal a décidé d'«annuler les décisions du Conseil (de l'UE) relatives, d'une part, à l'accord entre l'UE et le Maroc modifiant les préférences tarifaires accordées par l'UE aux produits d'origine marocaine ainsi que, d'autre part, à leur accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable». «Les accords approuvés par les décisions attaquées sont le résultat de négociations menées au nom de l'Union, avec le Maroc, à la suite de deux arrêts prononcés par la Cour», de décembre 2016 et février 2018, rappelle le tribunal. Les effets desdites décisions maintenus pendant une certaine période «D'une part, il s'agissait de conclure un accord modifiant les protocoles de l'accord d'association euro-méditerranéen, relatifs au régime applicable à l'importation dans l'Union européenne des produits agricoles originaires du Maroc et à la définition de la notion de "produits originaires", pour étendre aux produits originaires du Sahara occidental exportés sous le contrôle des autorités douanières marocaines, le bénéfice des préférences tarifaires octroyées aux produits d'origine marocaine exportés dans l'Union», note-t-il. D'autre part, «le but était de modifier l'accord de pêche entre la Communauté européenne et le Maroc et, notamment, d'inclure dans le champ d'application de cet accord les eaux adjacentes au territoire du Sahara occidental», ajoute la même source. Sur la forme, le Tribunal a estimé que «le rôle et la représentativité du requérant (le Front Polisario, ndlr) sont de nature à lui conférer la capacité d'agir devant le juge de l'Union». Quant au fond, il a statué que «les démarches entreprises par les autorités de l'Union avant la conclusion des accords litigieux ne peuvent être considérées comme ayant permis de recueillir le consentement du peuple du Sahara occidental à ces accords, conformément au principe de l'effet relatif des traités, tels qu'interprété par la Cour». Toutefois, le Tribunal de l'UE a décidé que «les effets desdites décisions sont maintenus pendant une certaine période», ne «pouvant excéder le délai de deux mois pour former un pourvoi ou la date de prononcé de l'arrêt de la Cour statuant sur un éventuel pourvoi». «Leur annulation avec effet immédiat est susceptible d'avoir des conséquences graves sur l'action extérieure de l'Union et de remettre en cause la sécurité juridique des engagements internationaux auxquels elle a consenti», explique l'instance. Une réaction conjointe du Maroc et de l'Union européenne Le verdict du Tribunal de l'Union européenne a déjà fait réagir le Maroc et l'Union européenne. Dans une déclaration conjointe publiée ce mercredi, le Haut représentant de l'UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell et le ministre marocain des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l'étranger, Nasser Bourita indiquent avoir «pris connaissance des arrêts rendus ce jour par le Tribunal». «Nous prendrons les mesures nécessaires afin d'assurer le cadre juridique qui garantisse la poursuite et la stabilité des relations commerciales entre l'Union européenne et le Royaume du Maroc», ajoute la déclaration. «Nous restons pleinement mobilisés pour continuer la coopération entre l'Union européenne et le Royaume du Maroc, dans un climat de sérénité et d'engagement, afin de consolider le partenariat euro-marocain de prospérité partagée, lancé en juin 2019. Nous continuerons à œuvrer pour développer les multiples dimensions de ce partenariat stratégique, dans le même esprit de mobilisation, de cohérence et de solidarité.» Déclaration conjointe Nasser Bourita et Josep Borrell ont rappelé que «ce partenariat d'égal à égal s'appuie, par ailleurs, sur une relation bilatérale solide, basée sur la confiance et le respect mutuel, entre le Royaume du Maroc et l'Union européenne, tout en contribuant en même temps au renforcement de cette relation et de celle avec les Etats membres». A noter que le verdict du Tribunal de l'UE reste une décision prise en première instance, ce qui permettra au Conseil de l'UE d'interjeter appel devant la Cour de justice, plus haute juridiction de l'Union européenne. En attendant, les accords restent ainsi maintenus et rien ne changera sur le terrain pour l'instant.